mardi, février 01, 2011

Côte d'Ivoire : la démocratie au bazooka?

Dans les conditions actuelles où l'on est sommé de choisir une partie contre l'autre selon l'impératif de la lutte à mort, il est difficile de dire quoi que ce soit sur la crise ivoirienne, ses causes historiques, ses significations pour l'Afrique postcoloniale, les modalités de sa possible résolution et ses conséquences sur l'équilibre de la sous-région sans susciter un déchaînement incontrôlé de passions, voire la violence des partisans des deux camps. Par Achille Mbembe et Célestin Monga

Raison et vociférations

Il est pourtant impératif d'apporter autant de clarté que possible sur ses enjeux ; de chercher à entendre raison, au-delà des tragiques événements au cours desquels des civils déjà fort appauvris perdent la vie dans des combats de rue, pendant que les chefs des factions bénéficient de protection et jouissent de toutes sortes d'immunités.

D'autre part, pour sortir de l'impasse, encore faut-il dépasser le dualisme Laurent Gbagbo-Alassane Ouattara. Le projet démocratique en Afrique ne saurait en effet être réduit à une simple mystique électorale, surtout dans les contextes où chefs de guerre sans foi ni loi, vieux fonctionnaires carriéristes et entrepreneurs politiques maniant à la fois l'eau bénite et le feu se servent avant tout des élections comme d'une voie royale pour le contrôle des rentes et toutes sortes d'accaparements.

La crise ivoirienne - tout comme d'autres qui l'ont précédée - impose par contre que l'opinion africaine et internationale se saisisse de nouveau des questions fondamentales qui détermineront l'avenir de la paix et la sécurité des peuples et des États dans cette région du monde. Ces questions sont les suivantes. Comment détermine et valide-t-on, de manière irrécusable, les résultats d'un scrutin dans un pays dont une bonne moitié du territoire est occupée par des rebelles armés combattant un gouvernement que la communauté internationale n'a pas déclaré illégitime ? À qui appartient le droit de statuer sur les contentieux électoraux en Afrique ? Comment fonctionne le principe universel de primauté entre droit national et droit international dans un État où la Constitution n'a pas été suspendue ? L'utilisation de la force militaire par des États voisins ou étrangers pour résoudre des conflits post-électoraux dans un pays indépendant se justifie-t-elle en droit ? Si oui, quels critères démocratiques doivent remplir les pays qui y envoient des soldats ? Et comment se fait-il qu'il y ait eu si peu d'interventions armées alors même que le dévoiement des élections est devenu une pratique courante, et que les contentieux post-électoraux n'ont cessé de se multiplier en Afrique au cours des vingt dernières années ?

Sur un plan similaire, quelle valeur faut-il attribuer aux prescriptions morales proclamées urbi et orbi par la communauté internationale sur un Continent où ses principes, son engouement, sa fermeté et ses sanctions s'appliquent différemment selon le pays et le moment, c'est-à-dire de façon inconsistante, voire arbitraire ? Plus précisément, de quelle légitimité peut se prévaloir une ancienne puissance coloniale qui, de jour, embrasse, soutient, finance, arme et décerne des satisfecits à des autocrates répugnants et, de nuit - juge et surtout partie - entretient des bases militaires dans des pays en conflit tout en se posant en donneuse de leçons de morale et en pontife de la démocratie ?

Poser ces questions alors que dans le cas ivoirien qui nous préoccupe la messe semble avoir été dite ne relève, ni de la provocation, ni de l'appel à l'inaction. Il s'agit au contraire de préalables qu'il faudrait intégrer à toute discussion sur la résolution d'une crise politique devenue le symptôme des déficits structurels des marchés politiques africains d'aujourd'hui, des errements d'une communauté internationale qui se rend trop souvent en Afrique avec le dilettantisme de gens qui vont en safari, et de l'immense colère qu'une décolonisation inachevée et pervertie a laissé dans les esprits de nombreux citoyens et intellectuels africains.

Par ailleurs, ce qui se joue à Abidjan n'est pas qu'une « affaire d'Africains ». Le différend ivoirien interpelle tous les peuples en quête de justice et de liberté. Alors que l'on s'accorde à dénoncer la crise du modèle démocratique y compris dans les vieux pays industriels, les leçons que l'on peut en tirer seraient donc utiles aux citoyens d'autres États de la planète. À l'heure de la mondialisation et des vives contradictions qu'elle ne cesse de produire, il s'agit en effet de redonner vie et substance au projet démocratique à la fois à l'échelle nationale et locale et à l'échelle planétaire, de remettre à jour les termes d'un contrat citoyen qui offre le cadre de stabilité à toute société humaine digne de ce nom, de circonscrire les conditions (forcément extrêmes) dans lesquelles le recours à la force peut être une option dans les relations entre États et au sein des États, et de réévaluer les conditions et modes d'engagement des acteurs internationaux dans les crises régionales et nationales.

Deux vérités incompatibles

Une élection a donc bel et bien eu lieu en Cote d'Ivoire. Officiellement, l'organisation des opérations pré électorales et du scrutin présidentiel ont duré trois ans (2007 à 2010). Elles auraient coûté 261 milliards de francs CFA, soit environ 57.000 francs CFA par votant. Sur cette somme, l'État de Cote d'Ivoire (c'est-à-dire les pauvres contribuables de ce pays où le revenu mensuel par habitant est de moins de 60.000 francs CFA aurait payé 242 milliards, soit 93%.

Élu en octobre 2000 lors d'un scrutin qu'il n'avait pas organisé, Laurent Gbagbo avait été finalement reconnu et accepté comme Président de la République par la classe politique ivoirienne. Moins de deux ans plus tard, alors que personne ne remettait plus en cause sa légitimité, son régime avait été la cible d'une sanglante tentative de coup d'état. Ni Alassane Ouattara, ni Henri Konan Bédié, ni la CEDEAO, ni la France, ni la communauté internationale n'avaient, à l'époque, proposé une intervention militaire pour protéger un gouvernement dont tous reconnaissaient pourtant la légalité.

Au contraire, les promoteurs du putsch avorté de septembre 2002 ont bénéficié des honneurs de la République. Ils ont occupé militairement la moitié nord du pays qu'ils ont gouverné à leur guise, et leur chef a fini par se faire nommer Premier ministre. Le mandat présidentiel de Laurent Gbagbo s'étant achevé en 2005, il est quand même resté au pouvoir, estimant à tort ou à raison que le contrôle d'une partie du territoire par la rébellion armée lui imposait de demeurer à la magistrature suprême jusqu'à ce qu'une solution de sortie de crise soit trouvée.

Nul ne conteste que l'élection présidentielle de 2010 s'est déroulée dans des conditions peu optimales - la « partition » de fait du territoire national, une souveraineté passablement ébréchée en conséquence de divers compromis boiteux, et un processus inachevé de désarmement de la rébellion. La Commission Électorale Indépendante (CEI) chargée, d'après la Constitution et la loi électorale d'organiser les élections et d'en proclamer les résultats provisoires selon le mode du « consensus » n'a pu le faire dans le délai officiel des 72 heures après la fermeture des bureaux de vote. Ses 31 membres n'ayant pas pu trouver le « consensus » requis par les accords signés par les parties, son Président s'est fait conduire en pleine nuit par deux ambassadeurs occidentaux au siège de campagne du candidat Alassane Ouattara pour proclamer unilatéralement ce dernier vainqueur.

S'appuyant sur des allégations d'irrégularité et de fraudes dans certaines régions du pays, le Conseil Constitutionnel qui, en tant qu'organe juridique suprême en matière électorale, avait seul la prérogative de proclamer les résultats définitifs, a annulé les résultats à ses yeux truqués du scrutin dans les trois départements de la Vallée du Bandama. Sans demander que les élections y soient reprises, que les chiffres sur les procès-verbaux soient revalidés ou que les votes y soient recomptés, il a proclamé Laurent Gbagbo vainqueur. Conséquence : les deux candidats s'arc-boutent chacun sur sa position malgré la frivolité des faits sur lesquels ils s'appuient, l'opprobre dont ils sont l'objet dans certaines zones de la Cote d'Ivoire, les menaces de guerre que leur entêtement fait peser sur le pays, et les risques mortels auxquels ils s'exposent et exposent leurs compatriotes.

Depuis lors, deux logiques incomplètes s'affrontent. Pour les uns, tout se ramène à une affaire de vandalisme électoral. Il suffit alors, comme le réclament à cor et à cris les hérauts de la « démocratie par procuration », que la « communauté internationale » se hisse à hauteur du défi. La mise en quarantaine, l'étranglement financier et l'interdiction de voyager ne suffisant pas, une petite intervention chirurgicale conduite par les armées de la sous-région viendrait s'ajouter à la panoplie des moyens nécessaires pour extirper l'usurpateur, contraindre le larron - unilatéralement désigné ? - à la fuite, procéder à son assignation devant la Cour Pénale internationale, voire le « liquider » simplement.

S'étant avérés incapables de mobiliser leurs troupes aux fins de défense de ce qu'ils affirment être les résultats du suffrage universel au besoin par la voie d'un soulèvement populaire, une partie des Ivoiriens et de leurs alliés externes cherche maintenant à sous-traiter la besogne à des supplétifs africains - eux-mêmes probablement originaires de pays où des élections démocratiques n'ont jamais eu lieu, tragique ironie aujourd'hui concevable seulement en Afrique. Sans doute armés, encadrés et soutenus sur le plan logistique par un cartel de pays occidentaux, ils sont invités à verser leur sang et celui de quelques milliers d'Ivoiriens dans une aventure dont les fondements en droit international et en droit ivoirien n'existent pas. Les apparences de la démocratie dans ce qui fut autrefois le joyau de l'Afrique francophone seraient ainsi sauves. Et chacun s'en irait la conscience allégée, mais sans que la vieille demande de justice universelle à l'égard de l'Afrique et des Africains - qui était au fondement de la lutte pour une véritable décolonisation - ait progressé d'un pas.

Pour d'autres encore, tout ceci n'est qu'un complot - un de plus - ourdi contre le dernier des prophètes anti-impérialistes, et peut-être un jour martyr de la lutte pour la « seconde indépendance » d'un continent pillé depuis des siècles par des prédateurs de tous bords.

Quant aux États occidentaux - ceux-là même qui n'ont cesse d'invoquer la liberté, les droits de l'homme et la démocratie, mais qui n'hésitent jamais à les fouler aux pieds chaque fois qu'il s'agit de vies de nègres - l'appui indéfectible et multiforme, actif ou silencieux, prodigué depuis 1960 aux régimes de partis uniques, aux caporaux et autres kleptocrates en civil, aux guerres de sécession (cas du Katanga et du Biafra en particulier) et à toutes formes de répressions sanglantes sur le Continent a fini d'oter toute crédibilité à leurs sermons.

Dans ce procès qui dure depuis un demi-siècle déjà, ce que l'on appelle « la communauté internationale » n'est pas en reste. Qui, toutes générations confondues, ne se souvient en Afrique du meurtre de Patrice Lumumba, premier Premier ministre démocratiquement élu de la République du Congo, assassiné le 17 janvier 1960 avec la complicité silencieuse de l'ONU ? Plus près de nous, cette « communauté internationale » n'a-t-elle pas fermé les yeux sur les génocides du Rwanda, au Darfour, ou en République Démocratique du Congo ? La liste est en effet longue des « bonnes dictatures » que les propriétaires de la bonne conscience mondiale continuent de sponsoriser à travers la planète et dont les dirigeants criminels sont reçus sur tapis rouges et à coups de fanfare à Paris, Londres, Washington ou Bruxelles.

Les trafiquants d'élections en Irak, en Afghanistan, au Pakistan, en Biélorussie, en Libye, en Éthiopie, en Égypte, et dans de nombreux autres pays ne dorment-ils pas tranquilles ? La toute-puissante et généreuse communauté internationale ne continue-t-elle pas de leur déverser chaque année des dizaines de milliards de dollars d' « aide financière » ? Quant au Premier ministre kenyan Raila Odinga que l'Union africaine a affublé du titre pompeux de médiateur de la crise ivoirienne, rappelons simplement qu'il a accepté 1.500 morts dans son pays après l'élection présidentielle de décembre 2007 avant d'entrer dans le gouvernement d'un Président qu'il qualifiait la veille de « tyran sanguinaire ». Pour le reste, bien des dictateurs crapuleux n'ont pas hésité à enfourcher le cheval du nationalisme et du panafricanisme pour justifier désordre et chaos.

Le voleur de boeufs et le voleur de poules

Il faut donc revenir aux constats de fond. Le premier est qu'aux élections de 2010, la Cote d'Ivoire a été piégée par l'architecture juridico-politique dont elle s'est hâtivement dotée pour résoudre la crise des dix dernières années. Tant que cette architecture est en place, chaque consultation électorale majeure risque de déboucher sur les memes impasses.

Deuxièmement, il est désormais difficile, voire impossible, de déterminer avec exactitude lequel des deux candidats a gagné de manière incontestable le scrutin présidentiel des 31 octobre et 28 novembre. L'un et l'autre disposent de demi-arguments pour justifier leur position et défendre leur cause. Mais aucun ne dispose de toute la vérité.

Troisièmement, si guerre il doit y avoir, elle sera avant tout une guerre contre les civils, comme nous l'ont malheureusement appris tant d'expériences récentes.

Au demeurant, rivalisant de cynisme, les deux prétendants au trône (et leurs affidés) le savent parfaitement. Le premier semble se résigner à l'idée d'en être la première victime. Il rêve peut-être de célébrer ses propres funérailles à la manière des hommes riches au temps de l'esclavage - au milieu d'une flambée de sacrifices humains, en utilisant si nécessaire ses parents, clients et captifs comme gages et dommages collatéraux.

En appelant publiquement à une guerre d'extirpation menée par des armées étrangères dans son propre pays et contre une partie de ses compatriotes, le second voudrait accéder à la magistrature suprême par la fenêtre, en marchant sur les cadavres de ses concitoyens et en instrumentalisant vaille que vaille les instances sous-régionales et internationales, lorsqu'il ne se laisse pas instrumentaliser par elles, et en contractant auprès de ses soutiens externes une lourde dette secrète qu'il fera payer, le moment venu, par toutes sortes de capitations, privilèges extra-territoriaux et abandons de souveraineté.

Certes, celui qui appelle à la guerre n'a pas le même niveau de responsabilité morale que celui qui pourrait en être la principale cible. Mais tous les deux sont unis par une funeste dette de mort dont l'enjeu premier n'est pas la démocratie, mais l'accaparement des rentes sur fonds de relance des procédures de l'inégalité et, dans les deux cas, par le biais d'une intensification des conduites d'extraversion.

Il convient d'autre part de souligner que dans cette Afrique postcoloniale, la situation ivoirienne est somme toute prosaïque. Ce n'est pas la première fois - et ce ne sera sans doute pas la dernière - que l'on fait face à des perdants qui refusent de s'en aller et à des prétendants qui, voulant éviter le dur et patient travail de mobilisation de leur société, se démènent pour arriver au pouvoir dans les fourgons des armées étrangères d'occupation. Voleurs de boeufs contre voleurs de poules, c'était le cas récemment au Zimbabwe et, dans une large mesure, au Kenya. D'intervention armée, il n'y en eut point malgré l'ampleur du délit.

Que dire des successions de père en fils au Congo-Kinshasa, au Togo et au Gabon, ou encore des hold-ups électoraux à répétition au Cameroun et dans presque toutes les satrapies de l'Afrique centrale, en Guinée, au Burkina-Faso, en Mauritanie, en Ouganda, au Rwanda et au Burundi, en Éthiopie, en Érythrée et ailleurs ? La réponse de « la communauté internationale » ? Nul émoi. C'est qu'à l'heure actuelle, il n'existe, ni dans le droit international, ni dans les conventions africaines (ou d'ailleurs étrangères), aucune clause prévoyant le recours à une force extérieure pour fonder la démocratie ou restaurer celle-ci à la suite d'un contentieux électoral.

Le dévoiement des élections dans le cadre du multipartisme en Afrique est une question historique et structurelle. Le coût des élections en vies humaines n'a cessé d'augmenter au cours des vingt dernières années. Bien peu de ces exercices auront été conduits dans la transparence, dans des conditions de légitimité incontestables. Qui s'étonnera qu'en de si funestes circonstances, leurs résultats ne soient que rarement acceptés par tous les protagonistes ?

Pis, elles sont devenues le moyen privilégié de conduire la guerre par d'autres moyens. Dans maints pays en effet, nombreux sont ceux qui, mis dans l'impossibilité de voter, ont été pratiquement déchus de leur citoyenneté. Le formidable déséquilibre entre les ressources accaparées par les partis au pouvoir et celles des formations de l'opposition est tel que la compétition est faussée dès le départ. Tout est réquisitionné par les partis gouvernementaux : l'appareil d'Etat, la bureaucratie, la police, la garde prétorienne, l'armée et les milices, la télévision nationale, l'ensemble des magistrats et la cour constitutionnelle, sans compter les deniers publics.

Dans certains cas, il n'y a pas jusqu'à la « commission électorale indépendante » qui ne soit sous la botte du gouvernement. Par ailleurs, il n'est pas rare qu'elles soient précédées ou suivies par un couvre-feu, quand ce n'est pas par une déclaration d'état d'urgence. Alors qu'elles sont supposées consacrer l'idée de la souveraineté du peuple, peu nombreux sont les Etats qui peuvent les financer de manière autonome. La plupart des gouvernements dépendent partiellement ou entièrement de subsides étrangers pour en assurer l'organisation. Cette tutelle financière étrangère ne s'apparente pas seulement à de la corruption indirecte. Elle jette un discrédit sur la capacité des Africains à se gouverner eux-memes.

Hormis les rares cas de l'Afrique du Sud, du Botswana, de l'Ile Maurice et, dans une moindre mesure du Ghana, les élections constituent donc l'un des baromètres les plus trompeurs de la démocratisation des régimes africains postcoloniaux. Moment privilégié de cristallisation des conflits historiques, elles servent surtout à exacerber les antagonismes déjà présents au sein des pays considérés. Il est, de ce point de vue, significatif qu'elles aient été au point de départ des conflits meurtriers les plus récents, ou en tous cas de graves crises qui menacent durablement l'existence de maints États. Au cours des vingt dernières années, les violences pré- et post-électorales ont inévitablement conduit à des désordres civils et, souvent, à d'innombrables pertes en vies humaines, à des destructions spectaculaires de la propriété et à des déplacements parfois massifs de populations. Celles-ci sont ensuite abandonnées aux mains d'organisations humanitaires qui, pour justifier leur propre existence et activités, comptent de plus en plus sur la militarisation des désastres et catastrophes du Continent lorsqu'elles n'appellent pas directement à l'ingérence externe.

Quel droit d'ingérence ?

Parce qu'elle menace désormais la sécurité, la stabilité et le progrès des Africains, la question du respect du verdict des élections doit être abordée avec un minimum de profondeur historique et stratégique. Les contentieux électoraux ne seront pas réglés par la boite de Pandore que sont les interventions militaires ad hoc, mais par la constitution, sur la longue durée, de nouveaux rapports de force entre l'État et la société et entre les classes sociales en voie de cristallisation. Il appartient aux Africains et à eux seuls de conduire ce travail.

Aucun diktat d'aucune ex-puissance coloniale ne saurait s'y substituer. Les Africains seuls doivent décider s'ils veulent mettre un terme aux crises post-électorales à répétition. S'ils optent pour l'usage de la force (solution qui traduit par définition un déficit d'imagination morale), ils devront s'entendre au préalable sur des principes de droit collectivement négociés et qui s'appliqueraient à tous les cas sans exception. Pour être légitimes, de telles interventions armées (forcément rarissimes) devraient être entièrement financées par les Africains eux-memes.

Du Kosovo à l'Irak, de l'Iran à l'Afghanistan, du Moyen-Orient en Amérique Latine, l'on ne saurait oublier combien la politique des « deux poids, deux mesures » a plombé au long des années la légitimité des interventions des puissances occidentales dans les affaires d'autres États. À l'appliquer en Afrique, cette politique risque d'ouvrir de nouvelles fractures et fronts d'hostilité entre États du Continent. Quelle crédibilité auraient des soldats nigérians, nigériens, gambiens, togolais ou burkinabé arpentant les quartiers d'Abidjan à la recherche de la démocratie ? Il faut en effet faire preuve soit d'un strabisme notoire, soit de haine de soi ou de mépris invétéré des Africains pour justifier qu'au sein de la CEDEAO, des régimes issus de putsch militaires ou classés comme des dictatures sur l'indicateur Freedom House aillent « sauver la démocratie » dans des pays tiers.

En plus d'accentuer la logique qui fait des élections un jeu à somme nulle, la politique des « deux poids, deux mesures » encouragerait les tentatives d'instrumentalisation des instances internationales par des acteurs crapuleux, voire alimenterait guerres ethniques et tentatives de sécession - toutes choses absolument contraires aux intérêts de l'Afrique. L'alternance régulière au pouvoir en Afrique ne peut guère être fille du droit d'ingérence. Le « droit d'ingérence » n'est pas un droit. Il est une perversion du droit. Exception faite des situations d'extrémité (cas des génocides), les appels au « droit d'ingérence » visent surtout à consacrer l'asymétrie au coeur des relations internationales. Dans le cas de l'Afrique, il faut craindre que le « droit d'ingérence » ne soit, in fine, que l'équivalent du « droit de conquête » et d'occupation qui, au temps de la colonisation, justifiait l'asservissement des « races inférieures », c'est-à-dire justement celles qui, de force, avaient été déclarées incapables de se gouverner par elles-mêmes.

Sortir du piège électoral

Serions-nous par conséquent condamnés à la paralysie et à l'inaction ? Non, certes.

Dans le cas de la Cote d'Ivoire, il ne reste malheureusement qu'une palette de mauvaises solutions. S'il est désormais impossible de déterminer de façon indiscutable sur la base de procès-verbaux non falsifiés qui a gagné les élections ; si les deux prétendants au trône peuvent compter chacun sur une certaine force militaire et mettre dans la rue des dizaines de milliers de partisans convaincus de leur bon droit et décidés à en découdre, alors le scénario d'une révolution démocratique visant à neutraliser Gbagbo ou Ouattara n'a pas beaucoup de chances de réussite. D'ailleurs, il est de plus en plus évident, quelle que soit l'issue de la confrontation, qu'aucun des deux hommes ne pourra, à moyen ou long terme, gouverner sereinement la Cote d'Ivoire entière et tenir les rênes de l'État sans se lancer dans des « purges » de l'administration et des chasses aux sorcières dans l'armée ou au sein de la population, faisant ainsi le lit de la prochaine rébellion ou de la prochaine tentative de putsch.

L'on pourrait, à la limite, envisager la partition du pays et un divorce par consentement mutuel, à l'exemple de l'ancienne Yougoslavie. Mais une telle solution n'est pas seulement écartée par les deux « Présidents ». Les grands ensembles ethno-régionaux de Cote d'Ivoire - notamment dans le sud - sont très hétérogènes et les populations y sont tellement mélangées que les déchirements et le coût économique et humain d'un éclatement seraient insupportables.

Le bras de fer qui consiste à étouffer le régime de Laurent Gbagbo à coup de sanctions internationales, de retraits d'accréditation d'ambassadeurs nommés par lui, d'exclusion de ses représentants au sein des instances politiques et économiques régionales - y compris de l'Union économique et monétaire ouest-africaine et de la Banque centrale des États d'Afrique de l'ouest -, de fermeture des guichets de la BCEAO, de menaces d'embargo sur les exportations de cacao qui sont avant toute chose la principale source de revenu de millions de pauvres paysans, pourrait plonger davantage la Cote d'Ivoire dans une crise économique et financière profonde et durable dont souffrirait l'ensemble de la sous-région. À cet égard, le recours à l'asphyxie monétaire comme instrument de combat politique révèle les véritables enjeux de la Zone franc. Celle-ci montre enfin au grand jour son vrai visage d'union monétaire asymétrique, de vestige du pacte colonial, de camisole de force bridant la compétitivité et la flexibilité des économies africaines et de piège politique pour tout adversaire désigné à la vindicte des pontifes de la bonne conscience internationale.

Si l'on écarte l'hypothèse d'un nouveau coup d'état militaire à la Nigérienne qui neutraliserait les deux principaux protagonistes du conflit actuel et certains de leurs affidés, il reste alors une dernière (mauvaise) solution - celle qui consisterait à reprendre le second tour de l'élection présidentielle, dans de meilleures conditions de surveillance et de décompte des voix, notamment par les Ivoiriens eux-mêmes.

Dans tous les cas, si les Ivoiriens doivent sortir de l'impasse dans laquelle ils se trouvent et retrouver les chemins d'une réconciliation durable, il n'y a guère d'alternative à une négociation entre les parties en conflit, à un renouveau de l'imagination morale et institutionnelle, et à une refonte radicale de leur système politique. Cette réforme pourrait prendre la forme d'une conférence nationale de laquelle sortirait une assemblée constituante. À une nouvelle constitution fondée sur le principe d'une décentralisation fédérative viendrait s'ajouter une réforme du scrutin. Celle-ci inclurait, de nécessité, une dose de proportionnelle à même d'assurer une représentation minimum de la diversité des « terroirs », tandis qu'un président fédéral honorifique serait élu au suffrage universel.

Cela dit, il n'y aura pas de progrès de la démocratie en Afrique tant que les Africains ne seront pas à même de choisir librement leurs dirigeants, c'est-à-dire, également, de congédier ceux d'entre eux dont ils ne veulent plus. Afin de parvenir à un renouvellement des élites, de la culture et des pratiques du pouvoir, il est absolument impératif que le nombre de mandats à la tête de l'État soit limité et que l'alternance au pouvoir devienne une réalité. L'une des raisons de l'enkystement des structures politiques africaines est bel et bien l'impossibilité dans laquelle se trouvent bien des peuples de se débarrasser pacifiquement de tyrans décidés à mourir au pouvoir.

Mais pour que les conditions d'une alternance pacifique soient réunies, il faut repenser de fond en comble la politique, l'économie et l'architecture des élections. Ce remodelage doit être l'œuvre des Africains eux-mêmes qui se doteraient, à l'occasion, d'un cadre juridique et de moyens de pression contre les pouvoirs délinquants. Ces moyens de contrainte pourraient inclure - dans de très rares cas étroitement circonscrits - des interventions militaires. La démocratie ne se réduit cependant, ni au multipartisme, ni aux élections même si elle est impensable sans ces ingrédients. De graves divisions traversent les sociétés africaines contemporaines. La plupart sont exacerbées par l'accélération de leur structuration objective en classes antagonistes, même si pour le moment, la conscience de classe est sinon détournée, du moins subsumée par d'autres formes de subjectivation. Dans ces conditions, le jeu démocratique dans le continent ne saurait être un jeu à somme nulle. Il est par conséquent impératif que soient « constitutionalisés » les statuts et droits de l'opposition et que, là où cela est possible, le gouvernement par coalitions l'emporte sur l'arithmétique purement majoritaire.

De façon plus décisive encore, un effort intellectuel colossal doit être consacré non seulement à l'approfondissement du sens de la démocratie elle-même, mais aussi à une extension progressive de ses multiples dénotations dans les conditions africaines contemporaines. Ceci implique que, dans la mise en forme des institutions de la démocratie, l'on prenne au sérieux la morphologie complexe des sociétés et surtout les pratiques quotidiennes par le biais desquelles les gens s'efforcent de soigner le lien social là où il a été endommagé, d'entretenir le minimum de cohésion nécessaire à la reproduction de la vie, bref de « faire communauté ».

Si les Africains veulent devenir les initiateurs d'une impulsion potentiellement innovatrice pour la démocratie dans le monde de notre temps, alors ils doivent arrêter de réciter les catéchismes et de psalmodier les versets des autres et faire oeuvre de créativité et d'imagination philosophique, politique et institutionnelle. Ils doivent forger une alternative historique à un modèle postcolonial de pouvoir qui, un demi-siècle après la décolonisation, ne sait toujours se nourrir que de la mystique du sang versé et ne sait, en conséquence, vivre que de la mort en masse de ceux qu'il est supposé servir.

Dans un contexte où l'inégalité des personnes semble mieux tolérée que l'exclusion des sujets, c'est au principe représentatif lui-même qu'il faut donner un nouveau contenu politique et juridique. Le but en la matière ne serait certes pas de pérenniser l'inégalité en tant que telle, mais de multiplier les répertoires grâce auxquels l'on conjuguerait désormais systématiquement différence et inclusion, afin justement que nulle composante du corps politique ne soit abandonnée sur le bord du chemin. Au demeurant, compte tenu des réalités socio-anthropologiques du Continent, aucune expérience d'auto-gouvernement ne saurait faire fi de l'existence objective d'une pluralité de corps titulaires de pouvoirs divers. Il n' y a pas jusqu'à l'idée même de société civile qui ne doive être repensée en fonction de cette multiplicité. Faute d'un déplacement substantiel de ses différentes dénotations dans différents contextes, l'idée de la démocratie en Afrique sera réduite à l'état de simple surface, vidée de tout contenu positif ; et loin de refléter la volonté du peuple, les élections resteront des moments de condensation explosive de conflits anciens - la guerre de tous contre tous.

Pour le reste, le besoin de transformations radicales n'a jamais été aussi pressant qu'aujourd'hui. Mais les forces sociales capables de porter ces transformations semblent manquer à l'appel. C'est à les rassembler et à les nourrir qu'appelle le présent. Telle est l'aride tâche à laquelle doivent s'astreindre les mouvements sérieux d'opposition et la coalition de tous ceux qui, contre la spirale dégénérative, veulent entreprendre la construction d'une liberté neuve en Afrique. Celle-ci doit redevenir son propre centre, sa force propre. Si, pour y parvenir, la guerre est inévitable, alors le Continent devra apprendre à choisir judicieusement ses guerres, faute de quoi consciemment ou non, il se fera chaque fois enrôler dans celles d'autrui, avec des conséquences chaque fois plus catastrophiques pour son avenir.

Achille Mbembe est l'auteur de Sortir de la longue nuit. Essai sur l'Afrique décolonisée (Paris, La Découverte, 2010).

Célestin Monga est l'auteur de Nihilisme et négritude (Paris, PUF, 2009).

Sources : médiapart

mercredi, janvier 26, 2011

La rue arabe en ébullition montre le chemin aux peuples d’Afrique noire

Après la Tunisie, à qui le tour ? L’Egypte est en train de suivre le chemin tracé par son voisin. L’impatience légitime des peuples arabes cadenassés depuis de longues années par des régimes autoritaires, corrompus, népotistes, s’est transformée en lueur d’espoir. Ces révolutions arabes qu’aucun pays impérialiste, à l’exception des Etats-Unis, n’a eu le temps de prendre la mesure, sont en train de modifier considérablement le visage du Maghreb. Et de l’Afrique, on peut l’espérer. S’il est encore difficile de présumer de quoi que ce soit, il va sans dire qu’elles sont annonciatrices de profonds changements. L’aval des Etats-Unis est sans doute pour quelque chose. Mais déjà plusieurs éléments permettent de comprendre ces révolutions.

Les régimes autoritaires ne sont plus une garantie pour contenir la poussée islamiste

Les pays occidentaux avaient fait le pari sur le soutien aux régimes corrompus en échange de la lutte anti-terroriste. Or presque 10 ans après les événements du 11 septembre 2001, les états majors de ces pays en sont réduits à constater que les foyers terroristes se multiplient et sont loin de s’éteindre. Bien au contraire. Les Etats-Unis l’ont bien compris. L’islamisme radical a un allié qui est la dictature. Il se nourrit incontestablement de l’autoritarisme des régimes au sein duquel il prospère au lieu de le contenir. Certains pays continuent de penser le contraire. A l’instar de la France qui a cru bon de renouveler sa confiance au dictateur déchu Ben Ali alors que ce dernier était acculé dans ses derniers retranchements.
Après les échecs cuisants des pays occidentaux de venir à bout du terrorisme islamiste, et après avoir payer un lourd tribut sur les terres afghanes, il semble que ces derniers soient revenus à la raison démocratique. L’idée que la démocratisation dans les pays concernés pourra endiguer la poussée islamiste fait donc son chemin. Car on peut se demander, qu’arrive-t-il à un jeune sans travail et à qui on dit de la fermer alors que sa bouche a faim ? Au pire il se remet à Dieu.

L’autoritarisme ne fait pas bon ménage avec la pauvreté

Les dictateurs ont tendance à l’oublier même soutenus par des puissances extérieures, il y a un temps pour le peuple. Et ce temps, c’est celui de la colère. Il est vrai que le dynamisme économique de façade de beaucoup de pays du Maghreb nous avait presque laissé sans voix sur fond d’immobilisme politique. L’on se disait finalement que le modèle chinois (libéralisme économique à la sauce autoritaire) pouvait être exportable. En réalité, ce n’était qu’un mirage. Un songe dans une longue nuit blanche.

Ces révolutions arabes : un modèle de lutte pour les peuples sud-sahariens

Les Africains qui souffrent des quatre coins du continent doivent s’inspirer de la rue arabe. Il est possible de chasser les dictateurs qui s’enrichissent sur leur dos en pillant, bradant sans relâche nuit et jour les ressources de leurs pays. Au profit de leur petit clan familial. Ceci dit, les dictatures du sud de l’Afrique ont encore de la marge. Les jeunesses arabes sont cultivées, disposent des ressources intellectuelles et ont accès aux technologies modernes de communication. Ce qui n’est pas le cas des jeunesses africaines, pauvres, sans ressources intellectuelles et végétant dans une sorte de misère technologique. L’état des universités arabes n’est pas comparable avec celui de beaucoup de pays sud-sahariens. A l’image du Congo Brazzaville où les dirigeants de ce pays ont délibérément assassiné l’un des outils de formation de la jeunesse.

lundi, janvier 17, 2011

La lettre testament de Patrice Lumumba

Comme tous les grands hommes, Il savait sûrement quand il allait être livré aux rapaces
Je sais et je sens au fond de moi-même que tôt ou tard mon peuple se débarrassera de tous ses ennemis intérieurs et extérieurs, qu’il se lèvera comme un seul homme pour dire non au capitalisme dégradant et honteux, et pour reprendre sa dignité sous un soleil pur.

Nous ne sommes pas seuls. L’Afrique, l’Asie et les peuples libres et libérés de tous les coins du monde se trouveront toujours aux côtés de millions de congolais qui n’abandonneront la lutte que le jour où il n’y aura plus de colonisateurs et leurs mercenaires dans notre pays. A mes enfants que je laisse, et que peut-être je ne reverrai plus, je veux qu’on dise que l’avenir du Congo est beau et qu’il attend d’eux, comme il attend de chaque Congolais, d’accomplir la tâche sacrée de la reconstruction de notre indépendance et de notre souveraineté, car sans dignité il n’y a pas de liberté, sans justice il n’y a pas de dignité, et sans indépendance il n’y a pas d’hommes libres.

Ni brutalités, ni sévices, ni tortures ne m’ont jamais amené à demander la grâce, car je préfère mourir la tête haute, la foi inébranlable et la confiance profonde dans la destinée de mon pays, plutôt que vivre dans la soumission et le mépris des principes sacrés. L’histoire dira un jour son mot, mais ce ne sera pas l’histoire qu’on enseignera à Bruxelles, Washington, Paris ou aux Nations Unies, mais celle qu’on enseignera dans les pays affranchis du colonialisme et de ses fantoches. L’Afrique écrira sa propre histoire et elle sera au nord et au sud du Sahara une histoire de gloire et de dignité. Ne me pleure pas, ma compagne. Moi je sais que mon pays, qui souffre tant, saura défendre son indépendance et sa liberté.

Vive le Congo ! Vive l’Afrique !

Patrice Lumumba

vendredi, janvier 14, 2011

Tunisie : du miracle au mirage économique


Je ne peux pas m’empêcher de commencer ce billet sans vous rappeler cet anecdote sur Itélé lors de l’émission de débat « les poings sur l’Info, encore une de ces émissions surréalistes où on analyse ce qui se passe ailleurs à partir des bruits de couloir du Quai d’Orsay. Pitoyable. En effet Joseph Macé Scaron affrontait Yves Thréard. Et c’est l’attitude de ce dernier qui m’a interpellé. Selon analyse : ce qui se passait en Tunisie n’était pas un mouvement du peuple, mais une contestation qui serait téléguidée par des communistes alliés aux islamistes. Donc il fallait faire attention. En réalité son point de vue était celui des autorités françaises depuis le début des émeutes en Tunisie qui consistait à ne rien dire pour ne pas fâcher un ami de la France qui nous a promis de contenir la poussée islamiste en échange d’un soutien ??? aveugle au régime ???.

Mon Dieu comment peut-on avoir des yeux remplis de caca à ce point Mesdames et messieurs, Ben Ali est en fuite ? Vers un paradis terrestre sûrement. Celui des cieux ne lui sera sans doute pas clément. Avis aux roitelets africains qui s’accrochent au pouvoir en pillant leur pays pour le bonheur de leur petit clan familial, le peuple aura toujours le dernier mot. Ce qui se passe en ce moment sur le continent africain en ce début d’année 2011 est un signe avant coureur des mutations profondes voire sanglantes. La Côte d’Ivoire qui ne sait pas toujours à quel roitelet s’accrocher médite encore son sort. Mais bientôt la vérité sera nue. En Guinée où s’est déroulé un semblant de scrutin, pourvu que le calme dure. Ce qui est sûr c’est que le visage de Dieu est grave, sans doute l’heure est grave pour les fils et filles d’Afrique habitués aux humiliations qu’elles viennent de l’extérieur ou de l’intérieur.

Le geste de Dieu

Dieu n’a pas encore dit le dernier mot. Je parle de Dieu comme une métaphore. On ne peut impunément continuer à violer, tromper, voler, humilier des masses sans qu’un jour la loi de dieu frappe. Ceux qui ne l’ont pas compris en auront pour leurs frais. Trop, c’est trop. L’acte de Mohamed Bouazizi qui s’est immolé par le feu est celui par qui la Tunisie va peut être connaître un peu de vrai soleil méditerranée. Terreur, pillage des ressources du pays par le clan familial, clientélisme, corruption tous azimuts, voilà ce que Ben Ali a laissé au peuple tunisien.


Moralité :


Moralité : quand on sert les boulons trop fort, il faut s’attendre que ça pète de tous les côtés

mardi, janvier 11, 2011

Côte d’Ivoire : Les 10 erreurs de Ouattara


1) Ouattara est sorti de la légalité constitutionnelle aussitôt le verdict des urnes proclamé par la CEI. Au lieu de placer son combat sur le terrain juridique en contestant par exemple les annulations effectuées par le Conseil constitutionnel et en réclamant de nouvelles élections transparentes dans toutes zones où il y a eu fraudes, il s’est engagé dans un bras de fer avec le pouvoir sortant. Comme si son souci était d’abord le pouvoir et non la reconnaissance par le peuple ivoirien de sa victoire. Ce n’est pas la communauté internationale qui décrète la légitimité d’un dirigeant, mais le contrat tacite passé entre le futur représentant et le peuple qui lui accorde sa confiance via son suffrage.

2) Il s’est entouré de rebelles après sa victoire pourtant reconnu par la communauté internationale. Or il aurait été plus simple pour lui de se placer sur le terrain de la réconciliation nationale avec un premier ministre neutre. Il a pris Soro, l’ex-rebelle, opportuniste et imposé comme premier ministre par cette même communauté internationale à Gbagbo, qui est une épine dans son pied. Ce qui le décrédibilise complètement en tant que démocrate puisque les intentions de Soro sont connues de tous.

3) Avoir laissé sa communication aux diplomates mandatés par la communauté internationale et à Soro le rebelle aux premières heures de la crise post-électorale. Il aurait dû s’affirmer comme seul maître à bord. Aujourd’hui il apparaît non pas comme un candidat indépendant mais un comme un pion de l’Occident, de la communauté internationale aux mains liées, dans une Afrique plus qu’excédée par les outrances impunies de ce curieux arbitre. Encore une erreur d’apprenti communiquant.

4) Avoir crié haut et fort pour les armes contre Gbagbo alors que son adversaire optait pour le dialogue. Encore une erreur d’apprenti démocrate.

5) Avoir écrit au Conseil constitutionnel qui l’a désavoué alors que sa légitimité semblait sortir des Urnes. Erreur de débutant.

6) Avoir cautionné que les résultats soient rendus publiques à l’Hôtel du Golf où il est retranché avec ses amis. Il aurait exigé que ces résultats mêmes partiels aient été donnés dans un endroit neutre et vierge de tout soupçon.

7) De parler au nom de la communauté internationale dans chacune de ses déclarations et non au nom de l’intérêt supérieur du peuple ivoirien. Dans toutes ses déclarations il mentionne « la communauté internationale nous a donné raison ». Or on sait de quoi elle est constituée cette fameuse communauté internationale. S’il cherche un conseiller en communication, il peut me contacter.

8) D’avoir négligé son allié de circonstance Henri Konan Bédié dont le report de voix au second lui a sans doute été bénéfique. Ce qui a été très mal perçu par les électeurs de Bédié qui lui ont fait confiance, maintenant ils lui tournent le dos au nom du refus de la vassalisation de la CI par la Communauté internationale. Exemple : l’appel à la désobéissance civile n’a même pas été suivi.

9) De n’avoir pas su faire confiance aux institutions ivoiriennes représentant le peuple ivoirien et de s’être rangé derrière la voix de la communauté internationale.

10) Son double discours. Lorsqu’on est démocrate, on va jusqu’au bout de sa logique quand les moyens de contestation le permettent. Il ne l’a pas fait. Lorsque vous êtes persuadé que le droit est avec vous, il ne faut jamais abandonner. La justice finit toujours par triompher.

Moralité : Il faut se méfier des faiseurs de roi, ils ont toujours une idée derrière la tête. Qu’il soit placé par la communauté internationale par tous les moyens au poste de président, Ouattara vient s'ajouter à la longue liste des présidents africains installés de la pire manière au pouvoir par l’Occident dans l’Afrique post-indépendance. Et Gbagbo, mort ou vivant, celui qui aura dit non aux puissances occidentales. Même si cette assertion reste infondée.


Abidjan, comment ça va avec la douleur postélectorale ?

Les dernières News sur la CI font état d'un possible gouvernement d'union national (voir article sur Grioo.om). On change de fusil d'épaule ? Après l'échec de l'appel à la désobéissance civile, après l'échec de la menace militaire, il semble que le camp Ouattara revient progressivement vers la raison.

Le sieur ADO vient peut être de comprendre que l'Afrique a changé, et que l'on ne se décrète pas président sous prétexte que l'on a reçu l'onction de la communauté internationale. Une communauté internationale de plus en plus détestée par la jeunesse panafricaine à cause de ses agissements sans cohérence, paternalistes, impérialistes, voire négrophobes. Il est vrai que Laurent GBAGBO n'est peut être pas l'homme qu'il faut à la Côte d'Ivoire, comme le sont de nombreux roitelets tropicaux. Mais de là à vouloir imposer un président à un état souverain au mépris des conventions internationales relève de l’amateurisme au mieux du brigandage diplomatique.

Il est loin le temps où il suffisait entre pays occidentaux de se passer de coups de fils pour déloger les dirigeants africains récalcitrants. Sauf que désormais les peuples africains ont bien compris la leçon. Endormis hier par manque d’information et de formation, ils ne se risquaient pas à attendre de pied ferme les décisions unilatérales imposées par la violence par les puissances impérialistes. Aujourd’hui ils osent se faire entendre et c’est une bonne chose. Dommage que cela se fasse au profit d’individus aussi peu recommandables que Gbagbo lui-même qu’il ne faut pas vite ranger dans la case de pseudo panafricanistes même s’il a bradé les leviers de l’économie ivoirienne aux hommes d’Affaires français et étrangers.

Ce qui est sûr quelque soit l’issue de ce bras de fer Ouattara-Gbagbo, il est préférable de dire Puissances euro-occidentales contre Gbagbo, via UA et CEDEAO caporalisées, les deux hommes ont contracté une dette envers les peuples africains qu’ils se doivent d’honorer le paiement au risque d’être définitivement rangés dans la case de fossoyeurs des intérêts ivoiriens et africains.

dimanche, janvier 09, 2011

Côte d'Ivoire : la France arme des mains noires

Côte d'Ivoire - Les signes évidents d'une imminente attaque contre la Côte d'Ivoire sont perceptibles. Les chiens de guerre venus de l'Irak et de l'Afghanistan se mettent progressivement en place sur le territoire ivoirien. Deux containers de munitions embarqués depuis le port de Dakar et destinés à l'armée française en Côte d'Ivoire ont été récemment saisis par les autorités ivoiriennes.

Mais la France qui, cette fois-ci, refuse de se salir les mains comme ce fut le cas en novembre 2004 à l'Hôtel Ivoire, à Abidjan où l'armée française a tiré et tué 67 jeunes Ivoiriens aux mains nues, a changé de fusil d'épaule.

On se rappelle encore l'image affreuse de ce jeune homme dont la tête a été broyée par les tirs des chars français, laquelle image a fait le tour du monde. Tirant les leçons de cette entreprise criminelle qui a davantage terni son image sur le continent noir, la France et ses dirigeants actuels, ont décidé d'opposer, cette fois, les Africains, les éternels souffre-douleurs des pays occidentaux, les uns aux autres.

Comme s'il aimait la Côte d'Ivoire plus que les Ivoiriens eux-mêmes, le président français, Nicolas Sarkozy sous le fallacieux prétexte que «Gbagbo refuse de quitter le pouvoir», manoeuvre ferme pour assassiner le président ivoirien. Aussi, ce fils d'immigré a-t-il armé des Africains donc des mains noires aux fins d'accomplir au nom de la France, cette mission macabre.

Pour ce faire, Nicolas Sarkozy a dépêché en Côte d'Ivoire, précisément à Bouaké, la capitale de la rébellion ivoirienne, des cargos militaires qui assurent le transport des éléments de Guillaume Soro et d'Alassane Ouattara en direction du Burkina, du Sénégal et du Nigéria, là où les attendent des instructeurs français chargés de la formation de ces bandes armées.

D'où, la reconstitution de l'Ecomog. Mais à la vérité, ce sont les rebelles ivoiriens qui vont constituer le gros lot de cette force que l'Elysée s'active à déployer en Côte d'Ivoire et dont la mission spécifique serait de déloger le président élu, Laurent Gbagbo et d'installer dans le fauteuil présidentiel ivoirien, Alassane Ouattara, candidat malheureux à la présidentielle de novembre 2010 en Côte d'Ivoire.

Une mission somme toute périlleuse pour toute l'Afrique de l'Ouest et pour laquelle la France refuse d'assumer les conséquences en agissant en sous main sous le couvert de la Cedeao qu'elle a caporalisée. Et dire que la recolonisation de l'Afrique noire a repris de plus belle, il n'y a qu'un pas.

Robert Krassault
Sources : Afrique en ligne

Appel pour une République multiculturelle et postraciale


Lilian Thuram, François Durpaire, Rokhaya Diallo, Marc Cheb Sun et Pascal Blanchard lancent L'Appel pour une République multiculturelle et postraciale, suivi de 100 propositions pluricitoyennes. En kiosque dès le 20 janvier 2010 en supplément au nouveau Respect Mag !

Cinquante ans après l’indépendance des Etats africains, il est temps de poser un juste regard sur un passé qui a des résonances contemporaines sur notre société. L’enjeu : que chacun se sente légitime dans le présent, puisse s’approprier une histoire commune.

Il y a cinq ans, les ‘événements’ dans les quartiers pointent déjà les clivages qui, aujourd’hui encore, menacent l’équilibre de notre société. La société française, riche de la pluralité de ses talents, s’est profondément renouvelée. Par contraste, les élites – politiques, économiques, culturelles – ne parviennent pas à intégrer cette nouvelle dynamique.

Il y a un an, jour pour jour, Barack Obama est investi 44ème Président des États-Unis. L’Amérique prouve alors que l’on peut transcender le poids des traumatismes. Les Français se réjouissent de constater les évolutions de la société américaine longtemps déchirée par les préjugés racistes et la ségrégation. Mais nos élites interrogent-elles leur propre faculté à dépasser le poids des héritages ?

Ce même 20 janvier 2009 est aussi le début de la crise politique qui touche les départements ultramarins d’Amérique et de l’Océan Indien. A cette occasion, les Français de l’Hexagone découvrent la situation des outre-mers, la crise sociale, politique et mémorielle qui les traverse.

La société française peine à intégrer sa dimension post-raciale et multiculturelle. Le débat sur « l’identité nationale » s’impose au pays. Notre mécanique se heurte à un défi majeur : comment ouvrir la République à tous les citoyens qui la composent?

François Durpaire, Lilian Thuram, Rokhaya Diallo, Marc Cheb Sun et Pascal Blanchard lancent mercredi 20 janvier l’Appel pour une République multiculturelle et postraciale, afin d’initier un mouvement citoyen en mesure de tracer la voie du changement. Forts de leurs héritages, les auteurs n’ont pas souhaité réunir des doléances, mais recueillir des propositions constructives, destinées à rapprocher la République de ses principes.

Les signataires de l’Appel ont demandé à 100 personnalités, scientifiques ou chercheurs, responsables politiques ou associatifs, acteurs de la société civile ou militants dans les domaines les plus divers, de formuler une proposition concrète pour irriguer de solutions pratiques une nécessaire réflexion sur notre société.

Les 100 propositions nourrissent l’idée que la « diversité », ne doit pas rester « une bonne intention » cantonnée à « un dossier à part », ou devenir « un terme à la mode », mais être envisagée comme une question propre à reconfigurer l’ensemble de la République, dans le sens du mieux-vivre ensemble.

L’Appel pour une République multiculturelle et postraciale suivi des 100 propositions pluricitoyennes sera diffusé en supplément à Respect Mag (numéro de Janvier/Février/Mars), en kiosque à partir du 20 janvier 2010.

Les 5 auteurs ont cosigné l'appel et ont réuni 100 personnalités pour 100 propositions :

Abdellah Aboulharjan, Souria Adele, Marijo Alie, Salah Amokrane, Clémentine Autain, Najat Azmy, Linda Baha, Bams, Sylviane Balustre d’Erneville, Nicolas Bancel, Pascal Bernard, Pascal Blanchard, Ben Salama, Nicole Bénessiano, Noria Belgherri, Suzanne Bellnoun, Esther Benbassa, Gilles Boëtsch, Pascal Boniface, Jean-Marc Borello, Ahmed Boubeker, Jeanette Bougrab, Nedjma Boutlelis, Olivia Cattan, Nicole Cyprien, Carole Da Silva, Karima Delli, Richard Descoings, Jean-Christophe Desprès, Bilguissa Diallo, Rokhaya Diallo, Nassimah Dindar, Mamadou Diouf, Disiz, Adoum Djibrine-Peterman, Faycal Douhane, Françoise Driss, François Durpaire, Romuald Dzomo Nkongo, Hakim El Karoui, Réjane Ereau, Mercedes Erra, Anne Esambert, Eric Fassin, Bétoule Fekkar-Lambiotte, Lionel Florence, Maud Fontenoy, Yannick Freytag, Armelle Gardien, Alain Gavand, Nacira Guénif-Souilamas, Mohamed Hamidi, Dawari Horsfall, Simon Houriez, Jean-Paul Huchon, Nicolas Hulot, Marc Jolivet, Anne Jaworowicz, Almamy « Mam » Kanouté, Sevgi Karaman, Bariza Khiari, Aminata Konaté, Eléonore de Lacharrière, Bruno Laforestrie,Amirouche Laïdi, George-Pau Langevin, Laurence Lascary, Luc Laventure, Anne Littardi, Naïma M’Faddel, Alain Mabanckou, Fadila Mehal, Laurence Méhaignerie, Nordine Nabili, Ousmane Ndiaye, Pascal Obispo, Alexandra Palt, Carole Reynaud-Paliguot, Valérie Pécresse, Alexis Peskine, Pascal Perri, Christophe Robert, Sonia Rolland, Ryadh Sallem, Marie-Laure Sauty de Chalon, Claudy Siar, Patrick Simon, Guillaume Silvestri, Etienne Smith, El Yamine Soum, Fodé Sylla, Christiane Taubira, Jean-Claude Tchicaya, Séverine Tessier, Benoît Thieulin, Louis-Georges Tin, Claudine Tisserand,Aurélien Tricot,Catherine Tripon,Françoise Vergès, Paul Vergès, Dominique Versini, Michel Wieviorka, Rama Yade.


L'ONU recolonise l'Afrique par Tierno Monénembo

Une tribune publiée par le Journal Le Monde daté du 04 janvier 2011

Pauvre Afrique, hier, on lui imposait ses dictateurs, aujourd'hui, on lui choisit ses "démocrates". Les rappeurs, ces Prévert des nouveaux temps, viennent d'inventer un néologisme qui fait fureur d'un bout à l'autre du continent : la démocrature. Entendez, ce système hybride (le visage de la démocratie, le corps diabolique de la dictature) qui a le don de déchaîner les passions et d'ajouter à la confusion.



Qui a gagné les élections en Côte d'Ivoire, qui les a perdues en Guinée ? Cette question qui a l'air d'embraser l'univers n'a aucun sens dans les faubourgs de Conakry et d'Abidjan où, bon an, mal an, la vie politique n'aura jamais qu'un seul régime, la disette, et une seule loi : "tout ce qui n'est pas obligatoire est interdit", pour reprendre le fameux mot de Léon Campo. Là-bas, on préfère d'expérience les mauvaises élections aux guerres civiles bien réussies. Mieux vaut encore Bokassa et Mobutu que les drames du Liberia ou de la Sierra Leone ! La bête humaine s'habitue à l'enfer du despotisme, certainement pas aux massacres à la rwandaise !

Or, les démons de la violence et de la haine hantent à nouveau la Côte d'Ivoire. Comme en 2000, le pays va se couper en deux, il va brûler comme une paille, plus rien ne peut l'empêcher. La faute à qui ? Au monde entier et d'abord et avant tout à cette fameuse communauté internationale qui n'est jamais mieux dans son rôle que quand elle rallume les incendies qu'elle est censée éteindre.

Formellement, ce "machin" derrière lequel se cachent les grosses griffes des Etats-Unis et de l'Union européenne ne pèse pas plus que le poids d'un arbitre. Son rôle se limite à prévenir les conflits et à proposer une solution négociée lorsque ceux-ci s'avèrent inévitables. Aucune circonstance exceptionnelle ne lui permet de déborder de ce cadre-là. C'est du moins ce que croyaient les néophytes, les sorciers de la diplomatie, eux ne manquant jamais d'arguments pour justifier l'injustifiable.

Disons-le clairement : l'ONU n'a pas à décider qui est élu et qui ne l'est pas à la tête d'un pays (le cas ivoirien compte peu en l'occurrence). Le faisant, elle outrepasse ses droits, ce qui lui arrive de plus en plus. Au point que derrière le langage feutré de ses diplomates, on distingue des bruits de bottes coloniales. A la manière dont Barack Obama, Nicolas Sarkozy ou Ban Ki-moon, traite ce pauvre Laurent Gbagbo, on croit revoir Gosier-d'Oiseau (célèbre personnage du Vieux nègre et la médaille, roman du Camerounais Ferdinand Oyono) transpirer sous son casque en engueulant ses nègres dans une plantation d'Oubangui-Chari.

Nous ne soutenons pas Laurent Gbagbo, nous nous contentons de rappeler un principe. D'ailleurs, le pestiféré d'Abidjan n'a pas besoin de notre soutien : l'arrogance des chancelleries et l'hystérie des médias travaillent pour lui. La diabolisation dont il est l'objet a fini par le rendre sympathique aux yeux de ses pires détracteurs. "A force de jeter une grenouille de plus en plus loin, on finit par la jeter dans une mare", dit un proverbe peul...

Nous ne contestons pas non plus l'élection d'Alassane Ouattara (nous sommes même convaincus que psychologiquement et techniquement, il est mieux outillé que n'importe lequel de ses concurrents pour gouverner). Nous disons simplement que le rôle de la communauté internationale ne revient pas à prendre des positions partisanes et à se répandre en déclarations intempestives encore moins dans une situation aussi explosive que celle de la Côte d'Ivoire. Pourquoi le défi et la menace du canon là où la discrétion, la ruse, la prudence et le tact bref, l'art de la diplomatie, auraient suffi ?

Nous n'allons pas apprendre à des géopoliticiens de métier que la Côte d'Ivoire est la pierre angulaire de la sous-région et que, si elle sombre, elle risque d'entraîner ses voisins, alors que la Guinée tente une périlleuse expérience démocratique et que Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI) a déjà ses sanctuaires au Burkina Faso et au Mali. La situation paraît d'autant inquiétante qu'il plane sur la région un "non-dit" tribal lourd de menaces pour l'avenir : tout sauf un Dioula au pouvoir à Abidjan ; tout sauf un Peul au pouvoir à Conakry.

La Côte d'Ivoire mérite-t-elle de brûler pour les besoins des statistiques ou pour les beaux yeux de Laurent Gbagbo ou d'Alassane Ouattara ? Non, assurément non !

Henri Konan Bédié, Laurent Gbagbo, Alassane Ouattara, où est la différence ? Ils forment le trio maléfique qui a ruiné le pays d'Houphouët-Boigny. A Bédié, le poison de l'ivoirité, à Ouattara, celui de la sécession, à Gbagbo celui de la confiscation du pouvoir. Chacun de ces caïds a montré combien il était prêt à sacrifier sa patrie au profit de son pouvoir personnel. De ce point de vue, ils n'ont rien d'exceptionnel.

La quasi-totalité des chefs d'Etat africains sont au pouvoir à la suite d'un putsch sanglant ou d'une élection truquée. Une loi non écrite permet à chacun de tuer, de voler et de tricher pour arriver au pouvoir. La nouveauté, ce sont les "scrupules" avec lesquels les grands de ce monde regardent cela. Congo, Rwanda, Somalie, jusqu'ici ils ont encouragé les trucages électoraux et les putschs et fermé les yeux sur les pires atrocités au gré de leurs intérêts. Et voilà que ces messieurs sont soudain pris d'un excès d'états d'âme !

Eh bien, s'ils sont devenus aussi vertueux qu'ils le prétendent, pourquoi ne vont-ils pas fouiller dans les cuisines électorales du Burkina, de la Tunisie ou de l'Egypte ? Sont-ils sûrs que les dynasties présidentielles du Gabon et du Togo sont sorties de la vérité des urnes ? Se seraient-ils comportés ainsi s'il s'était agi de l'Iran, de la Birmanie ou de la Chine ?

Ce raffut fait autour de Ouattara est tel qu'il en devient suspect. Que veut sauver la communauté internationale, à la fin : la Côte d'Ivoire ou un de ses protégés ? Ouattara et Gbagbo sont les loups-jumeaux de la politique ivoirienne : même teint, même sourire carnassier, même poids électoral (l'un contrôlant la Commission électorale et l'autre la Cour suprême). Il y a cependant entre eux une différence de taille : le carnet d'adresses. Dans le monde mesquin et corrompu qui est le nôtre, plus besoin de formule magique, ce joujou-là suffit à ouvrir les plus secrets des sésames.

Ancien directeur adjoint du Fonds monétaire international (FMI), Ouattara se trouve au coeur du complexe réseau qui gouverne ce monde alors que, modeste professeur d'histoire, Gbagbo, hormis un bref exil à Paris, n'est jamais sorti de chez lui. Ce petit détail-là explique mieux que tout (les longs couplets sur la démocratie par exemple) pourquoi une simple élection africaine a pris une dimension mondiale. Le village global est bel et bien là : la planète des copains et des coquins ! Et ses lois s'appliquent partout aussi bien en Côte d'Ivoire que dans la Guinée voisine où, Alpha Condé, le président "élu" est un ami des présidents africains et un vieil habitué des ministères parisiens.

"Je ne me vois pas échouer cette élection", affirma le nouveau président guinéen au lendemain du premier tour alors qu'il accusait un retard de près de 25 points sur son concurrent. Il ne croyait pas si bien dire : l'élection fut prolongée de cinq mois, le temps sans doute que le "bon" candidat soit prêt avec à la clé, l'incendie de la Commission nationale électorale indépendante, les vols du fichier informatique, le tout suivi d'un véritable nettoyage ethnique. Il n'y eut aucune enquête et ces sourcilleux jurés de la communauté internationale n'y trouvèrent rien à redire. Comme pour confirmer ce que tout le monde savait déjà : pour être élu en Afrique, pas besoin de mouiller la chemise. Avec un peu de chance et quelques copains bien placés à l'ONU, à la Maison Blanche, à l'Elysée ou au Quai d'Orsay, vous êtes sûr de passer même à 18 %.

Tierno Monénembo, écrivain guinéen, Prix Renaudot 2008 pour "Le Roi de Kahel" (Seuil)

jeudi, décembre 30, 2010

Lettre ouverte de Calixthe Beyala à Bechir Ben Yahmed : Jeune Af…rique, ce en quoi je crois, ou pas.


Lettre ouverte de Calixthe Beyala à Bechir Ben Yahmed : Jeune Af…rique, ce en quoi je crois, ou pas.

D’aussi loin que me porte ma mémoire, il me semble qu’une seule et unique fois, je fus en désaccord avec vous, très cher Béchir Ben YAHMED. Et je vous le fis savoir.

C’était il y a fort longtemps, mais lorsque passe trop de temps, ce dernier ne revêt plus aucune importance ; je l’avoue humblement, je n’ai nullement le sens du temps. C’était au sujet du nom du journal « Jeune Afrique ». Il me souvient que vous lui attribuiez alors le titre de «L’intelligent». Mes yeux fulminaient de colère lorsque je vous en parlai. Aujourd’hui encore, je ne puis oublier votre sourire ; et cette manière très pétillante de me rétorquer que j’aurais dû vous écrire pour vous dire mon sentiment. Depuis ces temps si lointain, aucune particule, aucune ride ne s’est point posée sur le respect et l’amitié qui nous lient… Au moins, c’est CE QUE JE CROIS.

Voilà que pour la deuxième fois, un sujet nous oppose : les élections Présidentielles en Côte d’Ivoire.

Je ne crois pas que Monsieur Alassane OUATTARA soit le Président élu de la Côte d’Ivoire car pour cela, il eût fallu que sa victoire fût reconnue par le Conseil Constitutionnel de son pays ; il me semble que ce n’est point le cas, me tromperais-je ? Aucune commission électorale, aussi noble soit-elle, ne saurait proclamer le vainqueur d’une élection, d’autant que dans le cas de la Côte d’Ivoire, cette commission électorale était constituée aux 2/3 par les membres de l’opposition.…

Vous me rétorquerez que le Président du Conseil Constitutionnel Ivoirien est un homme du Président GBAGBO. Oui, sans aucun doute. Mais n’est-ce point le cas dans tous les pays du monde et même en France ? On se souvient tous du cas des U.S.A où s’opposait alors AL GORE et W. BUSH. La Cour suprême trancha en faveur de ce dernier alors qu’il bénéficiait de moins de voix que son adversaire. Il me semble n’avoir pas entendu des cris d’orfraie des démocrates du monde entier, me tromperais-je ? Il me semble que l’ONU ne battit pas un cil pour condamner cette « usurpation de pouvoir. »

Je ne crois pas que le Président Français Nicolas Sarkozy aime tant l’Afrique et ses habitants qu’il veille à la démocratisation du continent, voire au bien être de ses peuples. Je n’ai pas oublié le discours de Dakar… Je n’ai pas oublié les élections au Gabon. Ne fut-il pas le premier à féliciter BONGO fils ? Pourquoi ne fustigea-t-il pas ce dernier ? Pourquoi le félicita-t-il, alors que l’opposition contestait, preuve à l’appui, les résultats des Urnes ? Il me semble avoir raté, -ce qui m’étonne-, votre édito lapidaire sur ce hold-up électoral. Et j’ajoute que le documentaire sur la Françafrique a clairement démontré les impostures, les magouilles et les mille manigances de mon pays la France, pour placer et maintenir au pouvoir quelques despotes dévoués corps et âme à notre mère patrie.

Je ne crois pas en l’ONU, ce minuscule Club d’Etats riches où aucun pays d’Afrique ne siège en son Conseil de Securité ; je ne crois pas que L’UNION AFRICAINE soit libre de ses propos d’autant que malheureusement pour les africains, celle-ci est financée par l’Union Européenne.

Je ne crois pas que les dirigeants Africains soutiennent activement Alassane OUATTARA ; il me semble n’avoir vu aucune félicitation émanant d’un Chef d’Etat du continent, adressée au Président désigné par la Communauté Internationale. Mais qui se cache derrière cette nébuleuse ? Seraient-ce les mêmes qui croisent les bras pendant qu’on bombarde l’Irak ou l’Afghanistan ?

Je ne crois pas à ce souci d’alternance démocratique dont ils veulent nous abreuver. Combien de chefs d’Etats ont changé la constitution de leur pays pour pouvoir être élu pour la énième fois ? Combien d’entre eux occupent le poste de Président depuis vingt voire trente ans ? Pourquoi la soi disant communauté Internationale ne les condamne-t-elle pas ? Et la France, qu’en dit-elle ?

Rien. Silence ! On exploite !

Je crois et permettez-moi de reprendre vos propos « la légende selon laquelle GBAGBO serait le grand défenseur de la souveraineté nationale et que ses positions tranchées lui ont valu l’hostilité de la France, » Il s’agit d’une réalité, vérifiée et palpable, confirmée en outre ces derniers jours par le documentaire français « la Françafrique. » Avez-vous oublié les implications de la France dans le coup d’état contre GBAGBO en 2002, ainsi que les multiples complots qui s’ensuivirent ?
Je crois que tous les Panafricanistes croient au complot contre la Côte d’Ivoire.

Il suffit pour s’en convaincre de regarder les deux manifestations organisées à Paris pour le soutien à la souveraineté de la Côte d’Ivoire et qui a réuni près de cinq mille personnes, battant le macadam dans le froid hivernal parisien. Donc GBAGBO n’est pas seul. Il a le peuple Africain à ses côtés.

Je crois qu’autrefois, la France et ses acolytes organisaient des coups d’Etats armés pour déloger les Chefs d’Etats Africains qui ne correspondaient pas à leurs critères de sélection. Je crois que la forme de renversement des pouvoirs indésirables a évolué ; elle est plus subtile. Me permettez-vous d’introduire la notion de « Coup d’ Etat électoral ? » Et si le Président GBAGBO en était une des dignes victimes? Y aviez-vous songé ?

Je crois que la stratégie géopolitique voudrait que le Golfe de Guinée soit totalement sous contrôle Occidental. L’épuisement des puits pétrolifères dans le Golfe Persique et la résistance armée dans ces régions, justifient que l’Europe se tourne vers l’Afrique. Pour son pétrole. Pour ses matières premières. Pour ses innombrables richesses. Et aussi- il ne s’agit pas d’un argument moindre,- sa capacité de soumission bas-ventrale… Je crois que tous les pays du Golfe de Guinée connaîtront le même sort que la Côte d’Ivoire dans un avenir plus ou moins proche. Je crois tout simplement qu’Alassane OUATARA est pour les Occidentaux l’homme de confiance et que pour atteindre leurs objectifs, à savoir lui faire revêtir le costume de président de la Côte d’Ivoire, ils sont prêts à tout…

Je crois enfin que GBAGBO ainsi que le peuple Ivoirien se battront jusqu’au bout pour ne point se faire dépouiller… en témoigne le peu d’enthousiasme qu’a suscité l’appel à la mobilisation d’Alassane OUATARA.

Je ne sais pas s’ils y réussiront.

Voilà, cher Béchir Ben YAHMED, ce en quoi je crois. Ou pas.

mercredi, décembre 29, 2010

Côte d'Ivoire : la France montrée du doigt commence à douter de son choix pro Ouattara

Que ceux qui ont voulu crier avec les loups se rassurent. La France est en train de revoir sa position. Voici les déclarations d’un sarkozyste. Preuve qu’au sein de la majorité présidentielle, le doute s’installe.


La mise en garde d’un député sarkozyste

La position officielle de la France sur la situation ivoirienne n'est pas partagée par l'ensemble des parlementaires. À gauche, certains élus, comme Henri Emmanuelli, François Loncle ou l'ancien ministre Hubert Védrine, s'interrogent. Au sein de l'UMP aussi, certains députés estiment que la position de la France devient dangereuse pour ses intérêts en Afrique. Didier Julia, député UMP de Seine-et-Marne et membre de la commission des affaires étrangères, nous a fait savoir qu'il a sondé ses collègues et que 30 à 40% d'entre eux commençaient à changer de ligne. Il a décidé de briser la chape de plomb et il a accordé son premier entretien sur cette affaire à Kernews, mardi 28 décembre, au micro de Yannick Urrien.

Kernews : Tous vos collègues parlent de l’accrochage que vous auriez eu avec Michèle Alliot-Marie lors de la dernière réunion du groupe UMP de l’Assemblée nationale, quelques jours avant Noël… Que s’est-il passé ?

Didier Julia : J'ai eu l'occasion, lors de la réunion du groupe UMP qui rassemble tous les députés, en l'absence de François Fillon, de poser trois questions à Madame Alliot-Marie, ministre des Affaires étrangères. Ma première question était de savoir pourquoi la France s'engage-t-elle au premier plan dans un problème de politique intérieure qui concerne la Côte d'Ivoire. La deuxième question : pourquoi le gouvernement français envisage-t-il de prendre des mesures de rétorsion à l'égard de l'entourage du président sortant de Côte d'Ivoire, qui serait à Paris, en leur retirant leurs visas et leurs passeports, alors que cela peut mettre en danger les 15 000 Français qui sont en Côte d'Ivoire et qui subiraient la même procédure. La troisième question : si les soldats français devaient ouvrir le feu sur des Ivoiriens pour un problème de politique intérieure ivoirienne, ce serait une abominable image pour la France, un recul de 50 ans, époque de la canonnière de la colonisation. Au XXIème siècle, ne serait-ce pas vraiment une régression du point de vue historique ? Ces trois questions ont suscité une colère extrêmement violente de Madame Alliot-Marie et cela m'a beaucoup étonné de la part d'un ministre qui se présente comme étant de tradition gaulliste. Le fait pour la France de s'identifier à la position américaine, qui est anti Gbagbo, parce qu'ils n'ont jamais pu conquérir les marchés de Côte d'Ivoire, ce n'est pas une position gaulliste. La position gaulliste, c'est d'abord le respect des pays et de leur indépendance. Ensuite, nous ne sommes pas des supplétifs des Américains dans la politique mondiale. J'ai été frappé par cette réaction passionnelle. J'ai eu l'occasion de passer une note au premier ministre François Fillon en lui disant que l'intérêt de la France et la morale en politique voulaient que nous laissions les pays de l'Union africaine s'occuper de la Côte d'Ivoire et que ce n'était certainement pas à l'ancienne colonie d’imposer son point de vue. Le premier ministre partage tout-à-fait cette approche du problème ivoirien.

Selon certaines indiscrétions émanant de vos collègues, Michèle Alliot-Marie, en privé, aurait des doutes sur la sincérité du scrutin annoncé par l'ONU… Qu'en pensez-vous ?

Notre problème, ce n'est pas d'être pro Gbagbo ou pro Ouattara… Nous nous interrogeons tous en commission des affaires étrangères et je peux dire que l'opinion majoritaire, de tous ceux qui s'intéressent au problème, est de dire qu'il y avait d’un côté une commission soi-disant indépendante, qui était sous le contrôle des Américains, en tout cas sous le contrôle des opposants au président Gbagbo et, de l’autre, un Conseil constitutionnel dont on dit que ce sont des amis de Monsieur Gbagbo, mais c'est quand même le Conseil constitutionnel… Par conséquent, je connais le nord de la Côte d'Ivoire qui est entre les mains de chefs de guerre qui pratiquent, comme chacun sait, le racket sur le coton et le diamant, et il était impossible aux populations qui sont sous leur tutelle de voter autrement que ce qu'elles ont voté. Donc, le problème de la légalité discutable dans le Nord est un réel problème.

Nous avons reçu des témoignages précis d'assesseurs représentant le candidat Gbagbo qui ont dû quitter le bureau de vote à 9 heures du matin parce qu'on les menaçait avec une kalachnikov…

Oui, au sein de la commission indépendante aussi, il y avait deux assesseurs représentant le candidat Gbagbo, contre dix, et ils ont aussi fait l'objet de menaces. Par conséquent, les conclusions de la commission indépendante posent vraiment un problème. Mais je n'en veux pas à Michèle Alliot-Marie. C'est une femme pour laquelle j'ai de l'amitié et une certaine admiration. Ce qui m'inquiète plutôt, c'est qu'elle incarne une tradition gaulliste et, si son attitude l'amenait à soutenir aveuglément le point de vue américain et à ne pas respecter la réalité du scrutin pour des raisons qui m'échappent, eh bien, je dis que son image en pâtirait.

Comment analysez-vous l'influence des médias sur ce dossier ? Il n'y a aucune explication précise sur le fond de l'affaire, on n’entend aucun discours contradictoire, mais une dialectique de guerre et de diabolisation…

Les médias agissent de la même façon dans tous les domaines. Tout le monde a hurlé contre Éric Woerth en le qualifiant d’escroc, de voleur, de menteur, de truqueur, de profiteur… Aujourd'hui, plus personne n'en parle. Lorsqu'ils s'apercevront tous qu’ils se sont trompés, il y en a pas un qui aura l'honnêteté de le dire. Il y aura une petite ligne disant que Monsieur Woerth n'était finalement pas concerné par les problèmes sur lesquels il était critiqué. J'ai connu cela à propos de l'affaire irakienne : ils se sont déchaînés contre nous pendant dix jours ! Le procureur général et les juges ont conclu que l'accusation de collusion avec une puissance étrangère pour intenter aux intérêts fondamentaux de la France était une affaire purement ubuesque et sans fondement. Nous avons été totalement relaxés et nous avons eu droit à trois lignes dans les journaux… Regardez, toute la presse s'est déchaînée sur le problème des retraites. A l'étranger, certains pensaient que la France était sens dessus dessous et que c'était la révolution dans la rue… Tout le monde nous interrogeait sur le désordre de la société française et plus personne ne parle des retraites aujourd'hui ! Dans la presse française, tout le monde va dans le même sens et, lorsqu'ils feront marche arrière, on va passer à autre chose…

Alors, faisons un peu de prospective, car chaque opération de désinformation qui a été entreprise a des conséquences sur une décennie. La conséquence de la première guerre du Golfe a été l'émergence de l'islamisme radical et des attentats du 11 septembre 2001…

C’est vrai…

La deuxième guerre a entraîné le massacre des chrétiens d'Irak et d'Orient, qui doivent fuir leurs pays respectifs…

Oui…

Alors, quelles seront les conséquences de cette affaire ivoirienne ?

J'ai dit à Michèle Alliot-Marie que si nous continuons dans cette voie, les Français seront tous remplacés par les Chinois, les Brésiliens, les Indiens, et la France disparaîtra de l'Afrique. C'est très dommage. J'ai aidé le président Sarkozy à être élu, je soutiens son action réformatrice très méritante en France, mais je ne peux pas suivre une politique mondiale lorsqu'elle met en cause l'influence et la crédibilité de la France dans un continent, surtout l'Afrique, qui est le continent d'avenir. En 2050, l'Afrique sera plus peuplée que la Chine. C'est un continent en pleine expansion économique, qui est en train de s'organiser, dont les ressources sont considérables, et c'est vraiment un continent d'avenir. La France risque de se couper pendant longtemps d'un pays d'avenir. Si cela s'amplifiait, ce serait une grave régression.
Sources Kernews

mercredi, décembre 22, 2010

Halle Berry dénonce le racisme à Hollywood

Dans une interview accordée au magazine Hollywood Reporter l'actrice de 44 ans revient sur le racisme présent à Hollywood. De quoi ternir les paillettes !

Halle Berry, première actrice afro-américaine à remporter un Oscar en 2001, partage l'affiche du Hollywood Reporter avec Sidney Poitier, le premier acteur noir à avoir été oscarisé en 1963. Dans cette interview, l'actrice de 44 ans revient sur les discriminations raciales qui règnent encore à Hollywood. L'arrivée du cinéma en couleur dans les années 70 n'a pas changé les esprits. Se faire une place dans le temple du 7ème art n'est toujours pas évident quand on est noir. L'élection de Barack Obama n'y changera rien !

"Il y avait des rôles que je voulais vraiment jouer, et j'ai dû écouter des producteurs me dire 'Nous ne voulons pas une black pour ce rôle-là parce que si elle est noire, ça change toute l'histoire...qui seront alors leurs parents ?... Ça devient un film de black, et qui ira le voir ?" déclare Halle Berry devenue malgré ça une star du cinéma. L'actrice avoue que ces considérations ont eu une répercussion sur sa propre vision des choses : "en tant que jeune femme noire, c'est triste à dire, mais je n'avais pas une image positive de ce qu'étaient les hommes noirs". De quoi entacher le glamour Hollywoodien.

Ces discriminations n'ont pas entamé le moral de Halle Berry qui déclaire que "voir un homme comme Sidney Poitier avec sa grâce et sa dignité m'a vraiment inspirée." Après des débuts difficiles, l'actrice a gagné le cœur du public et de la critique. Avec un Oscar pour le film A l'ombre de la haine et même un rôle de James Bond Girl, Halle semble désormais bien loin de ces propos racistes. En 2011, elle sera à l'affiche de Dark Tide de Kate Mathieson et Frankie & Alice de Geoffrey Sax. On l'annonce aussi dans le prochain film de Garry Marshall aux côtés de Sarah Jessica Parker et Zac Efron. Tout roule pour Halle !



Johanna BARTOLO - le 18/12/2010 - 17h24

Sources Plurielles.fr

mardi, décembre 21, 2010

Libération crache sur Gbagbo, Henry et Anelka





Le journal bobo fait le coup de trois nègres à cramer sur le gril du journalisme de caniveau. C’est par ce genre de « Une » que l’on s’enfonce tous les jours. Libération n’est pas à sa première tentative. Déjà en août 2008, ce même torchon, avait traîné dans la boue Lilian Thuram. Je vais finir par croire qu’une négrophobie bon teint sévit à Libération.

jeudi, décembre 16, 2010

CI : Gbagbo est-il en train d’enterrer l’Afrique de Papa ?


On signale quatre morts après la marche funèbre orchestré par l’ancien rebelle Guillaume Soro ex premier ministre du Boulanger et renouvelé à ce même poste par Ouattara, le président du Golf du nom de l’hôtel où il a élu domicile avec ses sbires en attendant la fin du boulot par la soldatesque de l’ONU. Au moins le garçon ne perd pas le nord, il sait orienter son bec là où le vent(re) tourne.

Gbagbo est-il entré dans l’histoire ? Je rappelle que je ne suis ni pour Gbagbo ni pour Ouattara. Les deux ne sont que des malheureux dindons de la farce occidentalo-françafricaine. Chacun a sa manière et à un moment donné servi d’idiot utile aux intérêts occidentaux en Côte d’Ivoire contre le peuple ivoirien. Mais Ouattara pour avoir été désigné par la communauté des intérêts occidentaux que défend le sieur Obama, un enfant d’Afrique aussi par son père, a peut être été meilleur soldat que Gbagbo que d’aucuns ont vite rangé dans le cercle très select et fermé des enfants dignes du Continent à l’image de Sankara, Lumumba etc…

En tout cas une chose est sûre, le Boulanger alias Gbagbo qu’il réussisse ou pas son combat contre les nervis intérieurs et extérieurs à la Côte d’Ivoire, il rentre incontestablement dans l’histoire. Pour avoir démontré que la communauté internationale n’était pas crédible pour oser donner des leçons aux dirigeants africains. Car cette communauté a toujours de manière sélective défendu la démocratie comme bon lui semblait au nom des ses propres intérêts. C’est pour cette raison qu’elle est devenue de plus en plus ridicule. Si la communauté internationale était crédible, elle aurait montré sa fermeté partout où le droit des peuples avait été violé. Or, que constatons-nous ? C’est le deux poids deux mesures. Gabon, Guinée, Congo, Egypte, Togo, Niger, Tunisie etc. dans ces pays ont eu lieu des scrutins pour le moins contestables. Mais c’est en vain qu’on a attendu une levée des boucliers de la part des gendarmes du monde. Pas un bruit, ni vu ni connu. Tant qu’elle continuera ainsi, elle sera de moins en moins crédible et les peuples africains qui ont déjà pris acte de ces tergiversations, feront de plus en plus confiance aux dictateurs téléguidés ou pas qu’à des institutions dont le seul intérêt est de nuire aux intérêts des peuples africains.

L’Acte I de la vraie indépendance se joue peut être en ce moment en CI. En attendant l’acte II…

lundi, décembre 13, 2010

Documentaire France 2, Françafrique : la raison d’Etat de Patrick Benquet



50 ans sous le sceau du secret

Pour les plus avertis d’entre vous, vous n’apprendriez rien que vous ne sachiez. Pour les moins avertis, le choc risque d’être total de voir les roitelets africains malaxés dans la marmité du grand bouillon Françafricain. Une triste réalité que résume bien cette phrase, de Maurice Delauney, ambassadeur au Gabon, et un des protagonistes de cette surréaliste fresque tropicale : « il y a des moments où la politique passe avant la morale ». De la morale justement il n’est guère question dans ce jeu diabolique et méprisant orchestré par les autorités françaises au lendemain des pseudo-indépendances octroyées aux pays africains. L’enjeu : garder la main mise sur les richesses énergétiques du sol et du sol africain au profit des grands groupes hexagonaux.

A la fin du documentaire, vous resterez sans voix. Si vous êtes lucide, vous vous diriez que la vie continue. Si vous êtes fataliste, vous maudirez le jour où vous êtes nés en vous disant je crois que le nègre est maudit. Vous irez même plus loin en vous disant que le gêne de la docilité et de la bêtise est en chaque africain. Lorsque vous verrez le journaliste détailler par le menu l’installation au pouvoir de Bongo, de Léon Mba, du putsch raté du mercenaire Bob Denard au Benin, de l’assassinat de Félix Moumié, de la déstabilisation du Nigéria pendant la guerre du Biafra et de la Guinée de Sékou Touré par l’introduction de faux billets, de l’éviction de l’empereur Bokassa, vous risqueriez une suffocation.

Ce documentaire est fort intéressant et instructif. Le seul hic est qu’il pêche par son côté marxisant en négligeant les motivations réelles des dignes héritiers de l’Afrique de Papa que sont les roitelets tropicaux. Car dans cette histoire, la France protège bien ses intérêts tout servant la soupe à ces derniers. Une bonne soupe bien grasse. Il serait intéressant de creuser sous le vernis des ambitions de ces derniers. Certains diront vite le pouvoir, l’argent. Mais, il n’y a pas que cela. Car pour oser accepter de jouer le rôle d'inverti et de sodomite tropical à la solde de barbouzes sans foi ni loi tout en leur livrant cette terre ancestrale, il faut une sacrée bonne dose de haine de soi. Dans ce domaine, il semble qu'il n’y a pas mieux au monde que les Africains. Des individus faciles et lâches.

La première partie a été diffusée le 09 décembre 2010, la deuxième interviendra le 16/12 sur France 2 vers 23H

samedi, décembre 04, 2010

Côte d’Ivoire : le scénario du pire… ?

La sagesse africaine voudrait qu’en pareille situation, le silence soit la seule parole du chef du village. Mais nous allons tordre le cou, une fois n’est pas coutume, à cette adage, héritage ancestral, venu des temps immémoriaux. La situation l’exige. Dans le flot continu des informations qui nous viennent de la Côte d’Ivoire, il est un sentiment auquel nous succombons tous : la passion. Or celle-ci fait parfois perdre la raison. Voilà un pays dans une situation ubuesque alors qu’il semblait avoir renoué avec la paix. Mais les signaux du ciel semblent nous indiquer le contraire. Certains se déchaînent contre le président réélu Laurent GBAGBO par le Conseil constitutionnel, accusé de tous les maux. Putschiste, tricheur, dictateur etc. Les qualificatifs vont bon train. Un blogueur bien connu de la place y allé même de son couplet le traitant de faire preuve d’amateurisme. D’autres en revanche chargent le vainqueur sorti des urnes à savoir Alassane Ouattara. Là aussi les qualificatifs sont légion : vendu, pion des Occidentaux, diviseur, l’ami des intérêts maffieux de ceux qui ne veulent pas l’Afrique des Africains. Bref, de tous les côtés, il se déchaîne une haine indescriptible. Mais qui croire devant cette marmite bouillante dont le couvercle risque d’exploser à tout moment ?

L’union africaine a dépêché d’ores et déjà l’ancien président sud africain Thabo Mbeki. Il est attendu sur place. Mais que va-t-il en sortir ? des ersatz de Marcoussis bis ? Non. Tout porte à croire que la CI s’enfonce dans ce que nous tous redoutions depuis le début : la violence. Le scénario du pire que personne ne veut voir en tous les cas a sorti son gros nez. Le ralliement de l’ancien chef rebelle et ex premier ministre Guillaume Soro à ADO est un signe qui ne trompe pas. La CI est au bord de l’implosion. La bataille électorale a quitté les urnes et le verbe de la constitution. Désormais ce sont d’autres stratégies qui sont à l’œuvre. Des stratégies du pire…

vendredi, décembre 03, 2010

Côte d’Ivoire : on n’y voit rien…


Ce soir, la CI est vraiment un cas KO. Laurent Gbagbo a été proclamé vainqueur de la présidentielle ivoirienne par le Conseil constitutionnel après avoir invalidé les résultats provisoires qui donnaient vainqueur l’ancien premier ministre Alassane Ouattara. Le président déjà en place, vainqueur de l'élection du 28 novembre aurait obtenu 51,45% des suffrages, après annulation de 7 circonscriptions du Nord de la Côte d’Ivoire, accusées d’être le fief des ex-rebelles.
La confusion est donc totale. Deux présidents s’affrontent désormais par médias nationaux et internationaux sous l’œil critique de la « fameuse communauté internationale ». Le terme est d’ailleurs un abus de langage, la notion de « communauté d’intérêts occidentaux » serait plus appropriée. Car en effet dans ce duel qui se joue désormais hors des urnes, c’est l’avenir du pays qui risque d’être en suspens. La bataille des légitimités des deux frères ennemis va continuer si aucune volonté manifeste pour trouver un terrain d’entente ne s’entrevoit.

Un casse tête juridico-institutionnel

Les fast thinkers ont déjà qualifié cette victoire de GBAGBO comme étant un putsch institutionnel de surcroît émaillé de fraudes. De même que la victoire de ADO ne pouvait être qualifiée de franche tant les images de violence au Nord du pays attestées par les autorités militaires du pays ne plaidaient en sa faveur. Si Laurent GBAGBO peut se prévaloir d’une décision du Conseil constitutionnel, il n’empêche qu’il s’agit là d’une véritable victoire à la Pyrrhus entachée de forts soupçons de manipulations. La question désormais qui se pose, comment les deux présidents vont-ils cohabiter et quelle suite va –t-il y avoir ? L’équation politico-électorale est d’autant plus difficile qu’elle comporte plusieurs inconnus.

Les inconnus… ?

Le premier inconnu c’est d’abord l’attitude de la fameuse communauté internationale dont sait déjà le parti pris. Son comportement décidera de la suite politique. Va-t-elle aider Laurent Gbagbo à travailler de manière à garantir la paix dans ce pays ? ou au contraire va-t-elle soutenir le vainqueur proclamé des urnes au risque de provoquer une scission définitive du pays ? Si cette possibilité se confirme, il va de soi que le Nord du pays grand perdant de ces élections va de nouveau plonger dans l’incertitude. On sait que les rebelles du Nord n’ont jamais été désarmés.

L’autre inconnu et pas des moindres, c’est la nouvelle gouvernance que va mettre en place le président Gbagbo. Si ce dernier s’engage dans une politique de la main tendue, encore faut-il que le camp d’en face l’accepte, le pire peut être évité à ce grand pays de l’Afrique de l’ouest. En revanche, si le pouvoir reste une affaire du camp Gbagbo, les choses vont davantage se compliquer du moins sur le plan extérieur avec un risque d’isolement politique du pays.