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samedi, octobre 22, 2011

Cameroun : l’étrange victoire à la soviétique de Paul Biya

L’actualité libyenne marquée par l'assassinat de Kadhafi a quelque peu chassé le reste des événements sur le Continent. Et pas des moindres. A l’instar de la réélection du dictateur Paul Biya qui briguait son 6ème mandat alors que cela fait presque 29 ans qu’il dirige le Cameroun d’une main de fer. D’après la cour suprême qui a rendu publique les résultats dans la nuit de vendredi, le sieur Biya aurait recueilli environ 78 % des voix devançant largement son principal adversaire John Fru Ndi, l’opposant historique qui n’a à peine recolté qu’un peu plus de 10 % des suffrages.

Curieusement la communauté internationale, spécialiste en donneuse de leçons démocratiques n’a pas trouvé à redire sur une élection pourtant contestée par les autres participants. On attend toujours les cris d’orfraie de cette bête immonde qu’est devenue la coalition des états impérialistes qui dicte sa loi aux restes de l’humanité. Dans un Cameroun en pleine mutation, avec une société civile très active, l’on n’imagine pas un seul instant que Paul Biya dont le bilan est plus que catastrophique à la tête de ce pays ait pu recueillir un tel plébiscite populaire. Chose curieuse également, l’absence de l’intelligentsia camerounaise qui a brillé par son silence tout au long de la campagne alors qu’elle s’était montrée nettement plus téméraire au sujet de la Côte d’Ivoire. A croire que les intellectuels camerounais voient mieux la paille qui est dans l’œil ivoirien que la poutre qui est dans leurs yeux. Ainsi, les Kelman, les Beyala, les Mbémbé ont presque disparu de la circulation au point de donner raison à leurs détracteurs qui les qualifient de panafricanistes de pacotille.

Que cela serve de leçon aux Africains. Les crises ivoiriennes ont montré que la révolution ne sera pas portée sur les fonts baptismaux par nos chers têtes pensantes ni par nos dirigeants dont les intérêts sont à coup sûrs désormais éloignés de ceux des peuples. L’exemple du printemps de la rue arabe est un précédent à méditer dans la mesure où il n’a pas accouché de véritables démocraties dans les trois pays que sont l’Egypte, la Tunisie et dans une moindre mesure la Libye. Mais en tout cas, la révolution par le bas (from bellow) comme disent les tenants des subaltern studies est quelque chose qui peut faire mal dans une Afrique qui aspire à sortir la tête de l’eau au XXIème siècle.

dimanche, mai 01, 2011

Thabo Mbeki: Qu'est ce que le monde s'est trompé en Côte d'Ivoire !

Une contribution de l'ancien président Sud-africain, M. Thabo Mbeki, parue dans le magazine Foreign Policy en date du 29 avril 2011, fait état de l’échec des Nation Unies dans la crise ivoirienne et encourage les Africains à prendre en main la résolution de leurs propres conflits.

Le second tour des élections présidentielles du 28 novembre 2010 en Côte d’Ivoire montés les uns contre deux autres de longue date des opposants politiques, Laurent Gbagbo et Alassane Ouattara. Pour cette raison d’une importance stratégique, il était inévitable que ce concours électoral décide de l’avenir à long terme du pays. Toutes les personnes concernées devraient avoir sondé très au sérieux la question critique: Est-ce que les élections de 2010 ont crée les conditions permettant d’établir la base d’un meilleur avenir possible pour le peuple ivoirien?

Ce qui n’a pas été fait

La communauté internationale a insisté pour que la Côte d’Ivoire mettre fin à la crise et organise des élections démocratiques, même si les conditions n’étaient pas réunies pour mener de telles élections. Bien qu’ils aient su que cette proposition était fondamentalement mauvaise, les Ivoiriens ne pouvaient pas résister à la pression internationale à la tenue des élections.

Cependant, la réalité objective est que les élections présidentielles ivoiriennes n’auraient pas dû avoir lieu au moment où elles se sont tenues. Il était parfaitement prévisible qu’elles ne feraient que renforcer le conflit, même s'il a été suggéré qu’elles y mettraient fin.

La rébellion de 2002 en Côte d’Ivoire a divisé le pays en deux parties, avec le nord contrôlé par les rebelles des Forces Nouvelles, qui a soutenu Alassane Ouattara, et le sud aux mains du gouvernement dirigé par Laurent Gbagbo. Depuis lors, la Côte d’Ivoire a eu deux gouvernements, deux administrations, deux armées, et deux leaders «nationaux».

Toutes élections tenues dans ces circonstances enracinent inévitablement les divisions et les animosités représentées et aggravées par la rébellion de 2002.

Les défauts structurels qui se trouvaient à la base de la rébellion de 2002 comprennent des questions inflammables telles que les tensions transnationales qui touchent en particulier la Côte d’Ivoire et le Burkina Faso, les antagonismes ethniques et religieux en Côte d’Ivoire, le partage du pouvoir politique, et l’accès au pouvoir et aux opportunités socio-économiques.

À cet égard, la communauté internationale a assidûment supprimé une juste appréciation des diverses allégations explosives qui, à tort ou à raison, ont informé et continueront d’informer l’opinion de la population partisane de Gbagbo dans le sud de la Côte d’Ivoire – ainsi qu’ une grande partie de l’Afrique francophone !

A savoir que Ouattara est un étranger né au Burkina Faso, qui, avec le Président Blaise Compaoré du Burkina Faso, a été responsable de la rébellion de 2002, que son accession au pouvoir se traduirait par la prise de contrôle du pays en particulier par des étrangers burkinabé, et que, historiquement, Jusqu’ici, il a été prêt à faire avancer les intérêts français en Côte d’Ivoire.

Prenant en compte tout cela, l’Union africaine a compris qu’une solution durable à la crise ivoirienne nécessitait un accord négocié entre les deux factions belligérantes, portant sur les questions interdépendantes de la démocratie, la paix, la réconciliation et l’unité nationales.

Après de longues négociations à partir de 2002, les Ivoiriens ont convenu que l’élection présidentielle ne se tiendrait pas avant que des conditions diverses aient été remplies. Il s’agissait notamment de la réunification du pays, la restauration de l’administration nationale à toutes les parties du territoire ivoirien, et le désarmement des rebelles et de toutes les milices et leur intégration dans le mécanisme de sécurité nationale, ceci au moins deux mois avant la tenue des élections présidentielles. Malgré le fait que rien de tout cela n’ait été honoré, les élections présidentielles ont été autorisées.

En fin de compte, Ouattara a été installé comme président de la Côte d’Ivoire. Gbagbo, et son épouse Simone, ont fini comme des prisonniers humiliés. Beaucoup d’Ivoiriens sont morts et ont été déplacés, de nombreuses infrastructures ont été détruites, et les animosités historiques ont été exacerbées à cette fin.

Beaucoup de choses ont été radicalement faussées tout le long de la route jusqu’à ce résultat.

Les accords portant sur ce qui aurait dû être fait pour créer les conditions d’élections libres et équitables ont été volontairement et dédaigneusement ignorés. Le Conseil constitutionnel ivoirien (CC) est le seul organisme habilité par la Constitution à déterminer le vainqueur dans une élection présidentielle et à installer le président, avec la Commission électorale indépendante (CEI), chargée de transmettre les résultats provisoires au CC. Toutefois, ceux-là mêmes qui insistent sur le caractère sacré du droit fondamental à toute pratique démocratique, ont choisi de façon illégale de reconnaître le résultat provisoire annoncé par un président de la CEI tout seul, comme le résultat authentique de l’élection présidentielle.

Comme prévu par la loi, Gbagbo a contesté la régularité des élections dans certaines parties du pays, surtout dans le nord. Le CC, à tort ou à raison, a accepté la majorité des plaintes déposées par Gbagbo, a identifié d’autres irrégularités, a annulé les votes dans certains districts, et a déclaré Gbagbo vainqueur. Le président de la CEI n’a pas pris ces prétendues irrégularités en compte et a décidé que Ouattara avait gagné.

L’envoyé de l’ONU, le Secrétaire général Ban Ki-moon, et son collègues sud-coréen, RSSG Young-jin Choi, ont également déterminé que Ouattara avait gagné, mais sur la base de moins de voix que celles annoncées par la CEI, après avoir déterminé que certaines des plaintes déposées par Gbagbo étaient légitimes. En termes de suffrages exprimés pour les deux candidats, la CEI, le CC, et le représentant spécial de l’ONU ont fait trois mesures différentes
Gbagbo a proposé que pour résoudre cette question, qui porte sur l’importante question de la volonté du peuple ivoirien, une commission internationale devrait être établie pour vérifier les résultats des élections, avec la condition préalable importante que lui et Ouattara doivent accepter la décision de la commission.

Cette proposition a été rejetée par la communauté internationale – en dépit du fait qu’elle aurait réglé le contentieux électoral, sans recourir à la guerre, et malgré le fait que certains observateurs électoraux aient émis des doutes quant à l’équité des élections, en particulier dans le nord de la Côte d’Ivoire.

Par exemple, rapportant aux élections dans le Nord, la mission d’observation électorale de l’Union africaine dirigée par Joseph Kokou Kofigoh, ancien Premier ministre du Togo, indépendant de la société civile Société Civile Africaine pour la Démocratie et l’assistance électorale dirigée par Seynabou Indieguene de Sénégal, et la coordination des experts électoraux en Afrique (CAEE) du Cameroun, Sénégal, Bénin, Mali, Maroc, Gabon, Togo et dirigée par Jean-Marie Ongjibangte du Cameroun, tous ont sonné l’alarme au sujet des élections dans le Nord.

Par exemple, le CAEE a déclaré: "Après le partage d’informations avec d’autres observateurs électoraux nationaux et internationaux, nous vous informons que le second tour de l’élection présidentielle en Côte d’Ivoire a eu lieu au milieu des problèmes majeurs dans différentes régions du Nord ..."

” Ces problèmes étaient le vol des urnes, l’arrestation des représentants des candidats, le vote multiple, le refus d’admettre des observateurs internationaux pour assister aux comptages des bulletins de vote, et l’assassinat des représentants des candidats. A cet effet, nous déclarons que le second tour de scrutin n’a pas été libre, justes et transparents dans ces localités (nord). ”

Pour sa part, à ce jour, la mission d’observation électorale de la CEDEAO n’a pas publié son rapport sur le deuxième tour de l’élection présidentielle! Pourquoi ?

Il est clair que la Commission internationale indépendante proposée par Laurent Gbagbo aurait pu être établie et habilitée à prendre une décision définitive et contraignante sur ce qui s’était passé. Le temps nous dira pourquoi cela n’a pas été fait!

En outre, le Représentant spécial de l’ONU a pris la décision extraordinaire de dépasser son mandat en déclarant qui avait remporté l’élection présidentielle, contrairement à ses attributions comme indiqué par le Conseil de sécurité. Cette décision a positionné la Mission des Nations Unies en Côte d’Ivoire (ONUCI) en tant que partisan dans le conflit ivoirien, plutôt qu’artisan de la paix neutre, à égale distance des parties belligérantes.

A partir de cet instant, l’ONUCI n’avait pas d’autre choix que de travailler activement pour l’installation de Ouattara en tant que président du pays et la suppression de Gbagbo. En fin de compte, cela s’est matérialisé dans l’utilisation flagrante de ses capacités militaires pour ouvrir la voie aux Forces nouvelles afin de vaincre les forces pro- Gbagbo et la capture Gbagbo, sous le prétexte sans vergogne de pour protéger les civils.

Bien que dans l’obligation de respecter son mandat de maintien de la paix, qui consistait à maintenir les forces belligérantes à part, l’ONUCI n’a rien fait pour arrêter avancée des Forces Nouvelles parties du nord au sud, et jusqu’à Abidjan. Ni l’ONUCI , ni les forces françaises Licorne, tel que mandaté par les Nations Unies, n’ont agit pour protéger les civils dans la région de Duékoué, où, évidemment, la plus forte concentration d’assassinat de civils a eu lieu! Cela rappelle l’incapacité de l’Organisation des Nations Unies à mettre fin au plus catastrophique assassinat et abus de civils dans l’est de la République démocratique du Congo!

Les points de la réalité ivoirienne ont un certain nombre de conclusions irréfutables.

Les conditions convenues pour la tenue d’élections démocratiques en Côte d’Ivoire n’ont pas été créées. Malgré les fortes allégations de fraudes électorales, la communauté internationale a décidé de ne mener aucune vérification du processus et des résultats annoncés. Cela a laissé sans réponse la question d’une importance vitale à savoir qui a gagné les élections, et les responsabilités de Ouattara dans les fraudes commises.

L’Organisation des Nations Unies a décidé d’abandonner sa neutralité en tant que conciliateur et décidé d’être un belligérant partisan dans le conflit ivoirien.

La France a utilisé sa place privilégiée au sein du Conseil de sécurité afin de se positionner pour jouer un rôle important dans la détermination de l’avenir de la Côte d’Ivoire, son ancienne colonie dans laquelle, entre autres, elle a d’importants intérêts économiques. Elle a rejoint l’Organisation des Nations Unies pour veiller à ce que Ouattara émerge en tant que vainqueur dans le conflit ivoirien.

Cette initiative répond à des intérêts nationaux de la France, conformément à ses politiques françafricaines, qui visent à perpétuer une relation particulière avec ses anciennes colonies africaines. Cela est conforme aux observations faites par l’ancien président français François Mitterrand, quand il dit: «Sans l’Afrique, la France n’aurait pas d’histoire au 21e siècle», ce que l’ancien ministre des Affaires étrangères français Jacques Godfrain a confirmé quand il a dit: “Un petit pays [France ], avec une petite quantité de force, nous pouvons déplacer une planète à cause [de nos] ... relations avec 15 ou 20 pays d’Afrique... ”

L’UA n’est pas non plus sans reproche, car elle n’a pas su s’affirmer pour convaincre tout le monde à travailler pour parvenir à la réconciliation entre les Ivoiriens, et donc à une paix durable. Malheureusement, les résultats qui ont été réalisés en Côte d’Ivoire consacrent un conflit endémique dans ce pays. Ceci parce qu’elle a placé entre les mains exclusives de la rébellion de 2002 le droit de déterminer de l’avenir du pays, là où la situation objective exigeait et exige encore que les peuples de Côte d’Ivoire s’ engagent les uns les autres comme égaux afin de déterminer leur destinée commune.

Au cours de la décennie durant laquelle il a servi comme président de la Côte d’Ivoire, Laurent Gbagbo n’avait aucune possibilité d’agir de son propre chef pour réunifier le pays et réaliser la réconciliation entre ses diverses populations, malgré l’existence d’accords négociés à cet égard. Comme il sert en tant que président du pays, Ouattara ne réussira pas à réaliser ces objectifs, en agissant de son propre chef, en dehors du contexte d’un accord honnête avec les sections de la population ivoirienne représentée par Gbagbo.

Ce qui devait arriver avait été prévu par l’ambassadeur des États-Unis d’alors en Côte d’Ivoire, Wanda L. Nesbitt. En Juillet 2009, elle en informait le gouvernement des États-Unis :

“Il semble maintenant que l’accord de Ouaga IV, [le quatrième accord de l'accord politique de Ouagadougou, qui prescrit que le désarmement doit précéder les élections], est fondamentalement un accord entre Blaise Compaoré [Président du Burkina Faso] et Laurent Gbagbo à partager le contrôle du nord jusqu’à après l’élection présidentielle, en dépit du fait que le texte appelle les Forces Nouvelles à rendre le contrôle du nord au gouvernement et à achever le désarmement complet deux mois avant les élections..."


"Mais les 5.000 soldats des Forces Nouvelles qui doivent être « désarmés », et regroupés dans des casernes dans quatre grandes villes dans le nord et l’ouest jusqu’à ce qu’une nouvelle armée nationale soit créée, représentent une capacité militaire sérieuse que les FAFN [Forces Nouvelles] ont l’intention de garder bien formés et en réserve jusqu’à la fin de l’élection. La remise du pouvoir administratif des FAFN aux autorités civiles du gouvernement était un pré-requis pour les élections, mais, comme les voyageurs vers le nord (y compris le personnel des ambassades) confirment: les FAFN conservent de facto le contrôle de la région en particulier quand il s’agit de finances."

L’incapacité à résoudre les “pré-requis aux les élections” prédéterminent leurs résultats. Les rebelles au «contrôle» du Nord, cité par l’Ambassadeur Nesbitt, déterminait par le résultat de l’élection présidentielle de 2010. De même, c’était les “capacités militaires” de la rébellion, dont l’Ambassadeur Nesbitt faisait mention, qui ont été utilisées pour s’assurer que Ouattara devienne président de la Côte d’Ivoire.

Il n’est pas étonnant qu’au plus fort de la crise post-électorale, Laurent Gbagbo ait crié: j’ai été trahi!

À la fin de tout cela, il y a de nombreuses victimes.

L’une d’entre elles est l’Union africaine. Les événements tragiques en Côte d’Ivoire ont confirmé la marginalisation de l’union dans sa capacité à résoudre les défis les plus importants d’Afrique.

Au lieu de cela, l’UA a affirmé la capacité des grandes puissances à intervenir pour résoudre ses problèmes à l’aide de leurs capacités différentes pour légitimer leurs actions en persuadant l’Organisation des Nations Unies d’autoriser leurs interventions égoïstes.

L’ONU a gravement compromis son acceptabilité comme une force neutre dans la résolution des conflits internes, comme celui en Côte d’Ivoire. Il sera désormais difficile pour l’Organisation des Nations Unies de convaincre l’Afrique et le reste du monde en développement que ce n’est pas un simple instrument entre les mains des grandes puissances du monde. Cela a confirmé l’urgence de la nécessité de restructurer l’organisation, basée sur l’idée que dans sa structure actuelle les Nations Unies n’a pas la capacité d’agir en tant que représentant véritablement démocratique de ses États membres.

Ainsi, de diverses manières, les événements en Côte d’Ivoire pourraient servir à un moment déterminant en termes de l’urgente nécessité de restructurer le système des relations internationales. Ils ont mis en évidence la réalité de l’équilibre et l’abus de pouvoir dans la période post-électorale, et mis fin à la fiction que les grandes puissances respectent la primauté du droit dans la conduite des relations internationales, même telle que défini par la Charte des Nations Unies, et que, en tant que démocrates, ils respectent les opinions des peuples du monde.

Nous ne pouvons qu’espérer que Laurent et Simone Gbagbo et le peuple ivoirien ne continuent pas à souffrir, victimes maltraitées et humiliées d’un système mondial qui, dans son intérêt, tout en criant haut et fort les droits universels de l’homme, ne cherche qu’à perpétuer la domination du plus grand nombre par quelques-uns qui disposent de la prépondérance du pouvoir politique, économique, militaire et médiatique.

Vues les procédures perverses et toxiques qui ont frappé la Côte d’Ivoire, on peut se poser la question d’urgence: Combien de violations flagrantes du pouvoir l’Afrique et le reste des pays en développement devront expérimenter avant que la vision d’un système démocratique de la gouvernance mondiale ne soit réalisée ?

mercredi, avril 27, 2011

Côte d'Ivoire : règlement de comptes camp Ouattara, l'ex-putschiste dit IB tué

Cela s'appelle la démocratie au bazooka ou encore remerciement à la loyale. Et c'est pas fini, ce n'est que le début. Quand on lit dans certains blogs pro-ouattaristes que c'est le début de la normalisation, de quoi suffoquer d'indignation. La guerre entre dozos et autres illétrés du camp Ouattara n'est qu'à son début. Sans compter les déçus du clan Bédié qui vont se rendre compte bientôt qu'ils ont dîné avec le diable.

Côte d'Ivoire: l'ex-putschiste IB tué par les forces pro-Ouattara

ABIDJAN - L'ex-putschiste Ibrahim Coulibaly, dit IB, chef d'un groupe armé baptisé commando invisible, a été tué mercredi soir à Abidjan par les forces du président ivoirien Alassane Ouattara, a déclaré à l'AFP le porte-parole du ministre de la Défense.

Après l'opération de sécurisation et de pacification lancée mercredi matin par les Forces républicaines (FRCI) dans les quartiers d'Abobo et d'Anyama (nord), +IB+ est allé se réfugier dans une cour non loin d'une usine à PK-18 (secteur nord d'Abobo), a indiqué le capitaine Léon Alla Kouakou.

Dans cette cour, Ibrahim Coulibaly a pris en otage toute une famille. Les FRCI ont effectué des tirs de sommation à deux reprises et il a réagi avec des tirs nourris. Les FRCI n'ont eu d'autre choix que de riposter, et la rispote lui a été fatale, a ajouté le porte-parole.

L'affrontement qui a eu lieu vers 20H00 (locales et GMT) a fait deux soldats tués et plusieurs blessés côté FRCI, et sept morts dans le camp adverse, dont IB lui-même, a-t-il précisé.

Le commando invisible avait contribué à la chute de l'ex-président Laurent Gbagbo le 11 avril, en déstabilisant son régime par la prise de contrôle progressive du nord d'Abidjan au début de l'année.

Le président Ouattara avait appelé vendredi l'ex-putschiste de 2002 à désarmer ses hommes, sous peine d'y être contraint par la force.


(©AFP / 28 avril 2011 01h01)


samedi, avril 16, 2011

La crise politique ivoirienne, miroir de l’effondrement ontologique de l’homme africain

Patriotes victimes de bombardments onusiens et de la force française Licorne à la Résidence présidentille de Cocody-Ambassade

Dans le flot des discours qui ont suivi la chute de Laurent Gbagbo, il est des mots qui reviennent comme des leitmotivs obsédants : « L’Afrique humiliée », « l’Afrique bafouée », « l’Afrique violée ». Transpirant la colère, ces mots, au goût de bile ravalée, de fierté étouffée, accompagnent la glose de ceux qui ont soutenu le baroud d’honneur du désormais célèbre « boulanger d’Abidjan » dont la sortie pitoyable et ridicule continue d’interpeller plus d’un africain, y compris ses farouches adversaires, de l’intérieur comme de l’extérieur qui l’ont mis, comme ils disent, aux arrêts. Mais ces mots traduisent bien plus qu’un simple cri de révolte de ceux qui ont voulu faire endosser à l’ex-président ivoirien l’uniforme de martyr à la Lumumba. Signe d’un ras le bol certain, ils trahissent notre impuissance devant ce mal incurable qui ronge le Nègre. Cette crise ontologique qui prend la forme de notre insoutenable et révoltante faiblesse qui fait de nous, ces « individus-chose », « individus-déchet », au milieu des nations, devenus dans les mains de l’ancien maître ce « jouet », cette chose insignifiante, qu’il peut retourner, défaire, manipuler à sa guise au gré de son humeur et de son intérêt le plus immédiat.


Mais la causa fiendi de cette faiblesse porte un nom : le déficit de conscience historique de l’homme africain de sa propre « valeur ontologique » en tant qu’être humain jouissant des mêmes droits et devoirs que n’importe quel individu sur cette planète. Parmi les signes évidents de ce déficit, c’est l’effondrement moral qui l’accompagne qui fait que tout Africain devient un coupable potentiel, de crimes pas seulement politiques mais aussi culturels et économiques contre la terre ancestrale. Une terre désormais maculée de sang, legs des forfaits impunis de ceux qui l’ont érigé en vache à lait de la planète. Aux plaies béantes de celles-ci, la réponse de cet homme-déchet se résume à la surdité, à l’amnésie, à l’aveuglement, à l’appât facile du gain, au troc de sa propre dignité en échange d’un hypothétique statut provisoire de président ami (ami de la France, ami des Etats-Unis etc…). Même la mémoire de la violence des épreuves historiques subies ne peut le faire changer de trajectoire. Amnésique, l’homme africain reste pourtant dyspeptique. A l’image de nos deux protagonistes de la crise ivoirienne. A l’image de tous ceux qui ont applaudi à l’ingérence étrangère et se sont réjoui du dénouement de cette crise. A l’image de tous ceux qui ont mis la Côte d’Ivoire à feu et à sang au nom de leur petite gloire personnelle. A l’image de tous ceux qui ont voulu privilégier cette voie sans issue en contractant une nouvelle dette auprès de l’ancien colonisateur qui attend patiemment son heure pour réclamer son dû.


Mais Gbagbo comme Ouattara n’ont pas été les seuls acteurs du déshonneur de l’Afrique dans cette triste fresque tropicale. L’Union Africaine, ce « machin » dont il faudra un jour repenser les fondements, a été aussi humiliée tout en déchirant un peu plus le voile de la honte de son folklore diplomatique. Mais à quoi fallait-il s’attendre ? Finalement à pas grand-chose. On ne fouille qu’une seule fois le sac de l’idiot du village, disent les Kongo. Les dirigeants de l’Union africaine dans le rôle de pauvres pantins et commis dévoués à la cause non pas de leur peuple, mais au service d’intérêts étrangers, ont couvert l’Afrique de honte et de ridicule. De la même manière que certains roitelets africains avaient participé au commerce des esclaves, les avaient même traqués avant de les livrer à des brigands européens, nos dirigeants actuels perpétuent ce travail de mise à mort du Continent à travers leurs compromissions, leur traitrise, leur perfidie et leur insouciance notoire. Ces vérités là il va falloir les entendre, les accepter, les digérer pour mieux comprendre cette faillite ontologico-morale de l’africain. Que l’on se garde de considérer ce problème avec dédain du fait qu’il met à nu notre nature profonde. Ce masochisme ontologique de l’Africain qui fait de lui un être irrémédiablement petit, mesquin, sans conscience historique, rongé par la jalousie, le complexe d’infériorité et pour finir dépourvu du sens de l’honneur.


Ce problème est une véritable maladie et elle atteint chez certains africains son sommet le plus sublime comme l’on a pu l’observer chez de nombreux acteurs de la crise ivoirienne. « Faire l’animal », « montrer que l’on est garçon » jusqu’à marcher sur les corps de ses propres parents. Profaner ces corps et les livrer au voyeurisme planétaire. Sans jamais se demander mais pour qui et pourquoi je fais ce boulot de merde ? Ailleurs on s’interroge. Mais ces quoi ces nègres qui s’entretuent ? Des bêtes ? Non. Des hommes-chose assoiffés de pouvoir mais dans le rôle d’éternels valets. Des hommes-déchet, acteurs d’un ignoble ballet pantomime. Le maître applaudit. Je le tiens ce négro, aime-t-il à répéter. Pauvre pantin encore encombré de chaînes et de boulets, la bête en lui y est logée confortablement.


Sans vouloir instruire ici le procès politique de qui que ce soit, la libération de la Côte d’Ivoire par l’ancien bourreau, l’on n’y croit pas un seul instant. Mais c’est le propre de l’homme-déchet. Il lui est difficile de résister aux sirènes de la division de l’ancien maître qu’il préférera toujours au tambour local de l’unité et du dialogue. Il n’y a que la haine de soi qui peut pousser l’esclave à se faire des illusions, disait Thomas Sankara, sur la condescendance suspecte d’un maître qui prétend le libérer. C’est se moquer de son propre sort y compris celui des millions d’Ivoiriens que de vouloir prendre possession d’une maison en tant que père de la Nation sans en avoir les clefs. Le vrai captif n’est peut être pas celui qu’on a cru voir sur toutes les télévisions du monde entier. Si Gbagbo est en résidence surveillée, Ouattara n’échappera pas à la présidence surveillée. Mais c’est le prix à payer lorsque l’on s’entête à vouloir faire de la politique en Afrique avec les habits du passé, en réclamant son filet de sécurité auprès de l’ancien maître. La libération de la Côte d’Ivoire dans un bunker version Gbagbo, l’on n’y a pas cru un seul instant. Non plus. Surtout lorsqu’on a joué au larbin de service pendant 10 ans. Si l’on salue la combativité de Gbagbo, l’on doute de la sincérité de ce combat au regard d’importants marchés concédés à ceux là même qui ont savamment et copieusement orchestré sa chute. Quel paroxysme d’absurdité. Autant de signes de cette maladie.


Crier au loup blanc ne servira pas à remettre de l’ordre dans la maison Afrique. L’homme africain a un problème à régler avec lui-même avant de régler celui de « l’homme blanc » accusé à tort ou à raison de tirer les ficelles. Se rendre maître de son destin consistera également à se départir de cette fausse naïveté qui habite encore un certain nombre d’entre nous qui croient béatement à la bonté originelle de notre nature qui fait de nous par essence des êtres solidaires. Or cette solidarité, nous l’avons longtemps cherchée dans les luttes de nos aînées restées de simples parenthèses dans l’histoire, d’interminables éructations de fierté de soi sporadiques et par à-coup de l’homme-déchet.


Auteur : C. M. citoyen panafricain

mardi, avril 05, 2011

Ouattara : une victoire à la Pyrrhus

No comment. Nous tenons à préciser que cette photo est un montage.
Attention, images insoutenables de tueries attribuées aux rebelles d'Alassane Ouattara. Ames sensibles s'abstenir

jeudi, mars 31, 2011

Côte d’Ivoire : au royaume des aveugles, les fous sont rois

Le combat des deux fous de la Côte d’Ivoire n’est pas encore terminé, mais les « soignants » qui guettent encore l’issue prémédité de celui-ci jubilent loin des lieux où ils ont encaserné ces deux là. Ils ont bien amusé la galerie, disent-ils. Arborant blouses blanches, et lunettes de professeur tournesol, on dirait qu’ils connaissaient bien les deux malades de la C.I., on dira leurs cobayes. En réalité, le combat n’eut pas lieu. Une simple mise en scène qui a déchaîné passions et crimes. Pour le plus grand plaisir des « soignants » qui se sont arrogés le droit de vie et de mort sur les « hommes-déchets » que sont devenus les trois quarts de l’humanité. Au nom du bien être des citoyens du Nord qui ne doivent manquer de rien. Tant pis si cela se fait au détriment de cette « pourriture », ces restes de l’humanité, qui empêche l’Occident de continuer sa danse macabre sur la scène de l’univers.


Mais le pire n’est pas tant que les soignants, ces détenteurs de la science, de la technologie, ces garants de l’ordre mondial, imposent comme il se doit leur loi aux cobayes. Mais que ces derniers acceptent de jouer le rôle que les soignants leur imposent. Ce qui donne le sentiment terrible d’une confusion pour l’ensemble des téléspectateurs que nous sommes de connaître le vrai du faux, de séparer le bon grain de l’ivraie, de savoir de quel côté se trouve finalement le vrai fou. Qui est vraiment malade ? Les « soignants » ou les « fous » qui ont accepté cette camisole de gré ou de force ? J’ai bien peur que le mal qui ronge les soignants soit définitivement incurable depuis le crime du Yovodah, où l’on a vu à l’œuvre ce mal, cette férocité occidentale.

Le western comme l’a titré « le Patriote », un journal pro Ouattara, est terminé. Ce dernier est en passe de réussir son combat contre Gbagbo, l’autre spécimen de ce duo, pas du tout en odeur de sainteté avec ses thérapeutes. Ce malade rebelle n’a jamais eu la confiance de son personnel soignant. Pourtant ce ne sont pas les garanties qui ont manqué. N’oublions pas le troisième homme du duo qui est en réalité un trio, Guillaume Soro, l’homme pressé. On devrait plutôt l’appeler Guillaume « sorrow ». Espérons seulement que le mal ne dégénère

lundi, mars 14, 2011

Côte d’Ivoire : Zuma rate son entrée dans l’histoire

Alors que le président sud-africain était très attendu sur le dossier ivoirien pour avoir afficher une attitude digne des pharaons, voilà qu’une petite visite à Paris, le 2 et 3 mars dernier, à l’invitation de son homologue français fait de lui le dernier des parias. L’actuel héritier des combats noirs contre l’apartheid vient de se disqualifier aux yeux de l’histoire. La terre des Zulu ne le reconnaît plus. Zuma n’est qu’un usurpateur. Lâchement, il vient de refermer la porte de la libération de l’Afrique qui se joue symboliquement en terre ivoirienne. La suite nous la connaissons, le panel rend un rapport entérinant la victoire de Ouattara, celui qui aura apporté la division et la guerre au pays d’Houphouët. L’histoire retiendra et lui tiendra rigueur. Ceux qui continuent à en douter n’ont qu’à constater les fiançailles postélectorales de ce dernier avec la rébellion armée du Nord célébrées avec l’onction d’une communauté internationale plus que discréditée. En attendant le mariage à venir, sûrement au lendemain d’une victoire militaire hypothétique qui plongera la Côte d’Ivoire définitivement dans une interminable guerre civile. Puisque les armes lourdes résonnent depuis déjà plusieurs jours dans Abidjan et l'ouest du pays.


Le cadeau de Sarkozy à Zuma

Le président français avait bien senti que l’affaire ivoirienne risquait de signer l’acte de décès de la françafrique. Pour couper court à ce qui allait devenir le début de la fin des coups bas contre les Africains, la diplomatie française a sorti l’artillerie lourde. Il fallait tuer la tête du rouleau compresseur de la françafrique constitué du géant sud-africain et de l’Angola. Résultat des courses : Zuma revoit sa copie et s’aligne sur les positions des puissances occidentales décidées à donner une petite fessée postcoloniale au subalterne Gbagbo. Mais l’on se demande encore qu’est ce que Zarkozy a bien pu proposer à Zuma ? Selon notre analyse, l’Afrique du sud pourrait bien bénéficier d’un coup de pouce de la France pour un poste au conseil de sécurité, même s’il siège déjà comme membre non permanent. Mais ce deal que le Zulu a accepté est-il judicieux ? La seule chose que l’on sait, c'est que la honte emportera tous les Africains qui se seront prostitués avec l’avenir de leurs frères.

mardi, février 22, 2011

Côte d'Ivoire : mission impossible pour l'UA, mission divine pour Gbagbo ?

L’Union Africaine : la mission impossible ?

Après sept tentatives de médiation qui se sont toutes soldées par un échec, voici un panel de quatre chefs d’états membres de l’organisation africaine au chevet de la Côte d’Ivoire. Le panel qui devait au départ être composé de cinq membres a été réduit à quatre en raison du désistement du burkinabé Blaise Campaoré, jugé persona non grata en Côte d’Ivoire par les partisans de Laurent Gbagbo. Au final, c’est un quatuor composé de Mohamed Ould Abdel Aziz (Mauritanie), Jacob Zuma (Afrique du Sud), Idriss Déby (Tchad) et Jakaya Kikwete (Tanzanie) qui est arrivé à Abidjan depuis ce lundi pour tenter de recoller les morceaux de ce qui reste de cette crise politique postélectorale. C’est la mission de la dernière chance avant l’embrasement total de ce pays de cocagne ouest africain. Embrasement, le mot est peut être fort. Mais la politique de la terre brûlée décidée par la communauté internationale pour endiguer et étouffer le camp Gbagbo y ressemble bien à s’y méprendre. Fermeture des banques, injonction à des entreprises internationales de ne pas s’approvisionner en cacao ivorien etc… C’est du lourd. Dans l’histoire des relations internationales, on n’a jamais vu une telle débauche de sanctions s’abattre sur un seul pays et pour une historiette de contentieux postélectoral. Une « simple histoire d’élections », comme dirait Calixthe Beyala…

La communauté internationale, l’UA en manque de crédibilité…

Il ne fait aucun doute que la communauté internationale et l’UA, soient aujourd’hui des entités totalement décrédibilisées aux yeux des peuples africains pour leur partialité dans cette crise. L’UA, après plusieurs hésitations, a fini par s’aligner sur les positions de son bailleur de fonds qui n’est autre que l’Union européenne. La question qui se pose : quelles cartes en main dispose ce panel pour tenter d’éteindre le feu en Côte d’Ivoire ? S’il s’agit d’intimer l’ordre à Gbagbo de quitter le pouvoir, les quatre chefs d’état, à coup sûr, recevront, une fin de non recevoir. S’il s’agit de proposer un gouvernement d’union nationale, la médiation peut réussir à condition que les parties en présence acceptent ce deal par défaut qui pourrait éviter à la Côte d’Ivoire de sombrer encore plus. Mais quelque soit la solution, ce sera une victoire à la Pyrrhus. Trop de rancœurs, trop de haine, trop de tergiversations, trop de morts, trop d’ingérence qui finiront par exploser tôt ou tard.

Dans ce salmigondis postélectoral, certains intellectuels estiment à tort ou à raison que l’avenir de l’Afrique se joue en ce moment en Côte d’Ivoire. Calixthe Beyala qui s’est beaucoup mouillée dans cette crise appelle même les ivoiriens à faire preuve d’imagination. Ce qu’ils vivent va servir à l’ensemble des peuples africains qui ont du mal à couper le cordon ombilical avec le système de la Françafrique. En gros il faut saisir l’occasion pour ne plus se plaindre de la domination et la main mise extérieure.

Côte d’Ivoire en mission divine ?

Si l’UA est en mission impossible avec son panel, la Côte d’Ivoire elle semble aux yeux de certains en mission divine. Des voix s’élèvent partout pour exhorter le peuple ivoirien à un courage titanesque. Facile à dire, difficile à faire surtout lorsque l'on sait que les africains font davantage confiance à leur ventre qu’à leur conscience. Il se lit sur cette crise quelque chose qui nous dépasse. Tous les peuples africains ont les yeux rivés sur la CI. Et ce n’est pas un hasard. D’aucuns disent qu’une mission a été donné au peuple ivoirien de servir de guide à l’Afrique entière. C’est l’occasion rêvée de reconquérir la dignité piétinée des fils et filles d’Afrique avec la complicité des nôtres au profit de lugubres intérêts étrangers. Le temps de la peur, de la mendicité est révolu. Il est même conseiller au président Gbagbo de créer une monnaie ivoirienne afin de rompre définitivement avec le Franc colonial.

Un « boulanger » rentre dans l’histoire

Le boulanger le plus célèbre de l’histoire de la politique mondiale est-il en train de réussir sa pâte ? La réponse n’est pas facile, même les nombreux soutiens dans toute l’Afrique y compris dans le monde arabe dont il bénéficie rend cet homme presque providentiel. En tous les cas, Gbagbo, mort ou vivant, le restaurateur de la paix en Côte d’Ivoire est définitivement entré dans l’histoire pour avoir dit non aux injonctions et diktats de la communauté des intérêts des pays impérialistes qualifiée abusivement de communauté internationale. Celui qui a donc mis fin à l’hernie nationaliste de l’ivoirité en permettant la tenue d’élections libres sous la houlette d’une commission noyautée et infiltrée par d’opposants notoires sortira ainsi par la grande porte. Laurent Gbagbo ne sera certainement pas le messie que la Côte d’Ivoire attend ni l’Afrique entière qui lui a témoigné son soutien massif malgré une campagne médiatique internationale particulièrement hostile à son égard. Il n’est pas un saint, mais qui l’est dans ce monde rempli d’opportunistes ?

jeudi, février 03, 2011

« Dictateur toi-même » : l’insulte à la mode dans les cours des palais présidentiels africains


Le ridicule ne tue pas, dit le dicton populaire. Il semble que nos satrapes des tropiques, au sud du Sahara, aient définitivement érigé ce dicton en principe de gouvernement. Malgré leurs exploits en « do cambua » diplomatique sur la crise ivoirienne, nos roitelets se retrouvent bien comme Gros-jean comme devant. Qui l’eut cru, toute honte bue, ils en sont tous réduits maintenant à l’insulte, « dictateur toi-même », qu’ils se balancent désormais entre eux, pendant que le peuple ivoirien se meurt à petit feu. Il fallait s’y attendre. A cette descente aux abysses « troufignonnesques ». Car dans ce salmigondis postélectoral ivoirien, où pontifes internationaux et pupazzis panafricanistes se prennent encore les pates, aucun monarque ne se risquerait à chercher à paraître plus qu’on ne vaut. Normal, on ne critique pas le chieur d’en face quand on a soi même fait caca dans son froc.

« Dictateur toi-même », quel dictateur tropical peut fièrement promener son derrière en se vantant d’avoir instauré une vraie démocratie chez lui. Aucun. Mis à part l’Afrique du sud et le Ghana dans une moindre mesure, les satrapies tropicales sont des mornes dictatures tranquilles sous perfusion. Avec la complicité des peuples affamés qui cherchent d’abord salut dans la débrouillardise que dans la revendication d’un changement démocratique. Pendant que la rue arabe se mobilise, les rues africaines sont encore endormies par les émanations des derrières par trop encombrés des autocrates africains. Mais pour combien de temps encore…

mardi, février 01, 2011

Côte d'Ivoire : la démocratie au bazooka?

Dans les conditions actuelles où l'on est sommé de choisir une partie contre l'autre selon l'impératif de la lutte à mort, il est difficile de dire quoi que ce soit sur la crise ivoirienne, ses causes historiques, ses significations pour l'Afrique postcoloniale, les modalités de sa possible résolution et ses conséquences sur l'équilibre de la sous-région sans susciter un déchaînement incontrôlé de passions, voire la violence des partisans des deux camps. Par Achille Mbembe et Célestin Monga

Raison et vociférations

Il est pourtant impératif d'apporter autant de clarté que possible sur ses enjeux ; de chercher à entendre raison, au-delà des tragiques événements au cours desquels des civils déjà fort appauvris perdent la vie dans des combats de rue, pendant que les chefs des factions bénéficient de protection et jouissent de toutes sortes d'immunités.

D'autre part, pour sortir de l'impasse, encore faut-il dépasser le dualisme Laurent Gbagbo-Alassane Ouattara. Le projet démocratique en Afrique ne saurait en effet être réduit à une simple mystique électorale, surtout dans les contextes où chefs de guerre sans foi ni loi, vieux fonctionnaires carriéristes et entrepreneurs politiques maniant à la fois l'eau bénite et le feu se servent avant tout des élections comme d'une voie royale pour le contrôle des rentes et toutes sortes d'accaparements.

La crise ivoirienne - tout comme d'autres qui l'ont précédée - impose par contre que l'opinion africaine et internationale se saisisse de nouveau des questions fondamentales qui détermineront l'avenir de la paix et la sécurité des peuples et des États dans cette région du monde. Ces questions sont les suivantes. Comment détermine et valide-t-on, de manière irrécusable, les résultats d'un scrutin dans un pays dont une bonne moitié du territoire est occupée par des rebelles armés combattant un gouvernement que la communauté internationale n'a pas déclaré illégitime ? À qui appartient le droit de statuer sur les contentieux électoraux en Afrique ? Comment fonctionne le principe universel de primauté entre droit national et droit international dans un État où la Constitution n'a pas été suspendue ? L'utilisation de la force militaire par des États voisins ou étrangers pour résoudre des conflits post-électoraux dans un pays indépendant se justifie-t-elle en droit ? Si oui, quels critères démocratiques doivent remplir les pays qui y envoient des soldats ? Et comment se fait-il qu'il y ait eu si peu d'interventions armées alors même que le dévoiement des élections est devenu une pratique courante, et que les contentieux post-électoraux n'ont cessé de se multiplier en Afrique au cours des vingt dernières années ?

Sur un plan similaire, quelle valeur faut-il attribuer aux prescriptions morales proclamées urbi et orbi par la communauté internationale sur un Continent où ses principes, son engouement, sa fermeté et ses sanctions s'appliquent différemment selon le pays et le moment, c'est-à-dire de façon inconsistante, voire arbitraire ? Plus précisément, de quelle légitimité peut se prévaloir une ancienne puissance coloniale qui, de jour, embrasse, soutient, finance, arme et décerne des satisfecits à des autocrates répugnants et, de nuit - juge et surtout partie - entretient des bases militaires dans des pays en conflit tout en se posant en donneuse de leçons de morale et en pontife de la démocratie ?

Poser ces questions alors que dans le cas ivoirien qui nous préoccupe la messe semble avoir été dite ne relève, ni de la provocation, ni de l'appel à l'inaction. Il s'agit au contraire de préalables qu'il faudrait intégrer à toute discussion sur la résolution d'une crise politique devenue le symptôme des déficits structurels des marchés politiques africains d'aujourd'hui, des errements d'une communauté internationale qui se rend trop souvent en Afrique avec le dilettantisme de gens qui vont en safari, et de l'immense colère qu'une décolonisation inachevée et pervertie a laissé dans les esprits de nombreux citoyens et intellectuels africains.

Par ailleurs, ce qui se joue à Abidjan n'est pas qu'une « affaire d'Africains ». Le différend ivoirien interpelle tous les peuples en quête de justice et de liberté. Alors que l'on s'accorde à dénoncer la crise du modèle démocratique y compris dans les vieux pays industriels, les leçons que l'on peut en tirer seraient donc utiles aux citoyens d'autres États de la planète. À l'heure de la mondialisation et des vives contradictions qu'elle ne cesse de produire, il s'agit en effet de redonner vie et substance au projet démocratique à la fois à l'échelle nationale et locale et à l'échelle planétaire, de remettre à jour les termes d'un contrat citoyen qui offre le cadre de stabilité à toute société humaine digne de ce nom, de circonscrire les conditions (forcément extrêmes) dans lesquelles le recours à la force peut être une option dans les relations entre États et au sein des États, et de réévaluer les conditions et modes d'engagement des acteurs internationaux dans les crises régionales et nationales.

Deux vérités incompatibles

Une élection a donc bel et bien eu lieu en Cote d'Ivoire. Officiellement, l'organisation des opérations pré électorales et du scrutin présidentiel ont duré trois ans (2007 à 2010). Elles auraient coûté 261 milliards de francs CFA, soit environ 57.000 francs CFA par votant. Sur cette somme, l'État de Cote d'Ivoire (c'est-à-dire les pauvres contribuables de ce pays où le revenu mensuel par habitant est de moins de 60.000 francs CFA aurait payé 242 milliards, soit 93%.

Élu en octobre 2000 lors d'un scrutin qu'il n'avait pas organisé, Laurent Gbagbo avait été finalement reconnu et accepté comme Président de la République par la classe politique ivoirienne. Moins de deux ans plus tard, alors que personne ne remettait plus en cause sa légitimité, son régime avait été la cible d'une sanglante tentative de coup d'état. Ni Alassane Ouattara, ni Henri Konan Bédié, ni la CEDEAO, ni la France, ni la communauté internationale n'avaient, à l'époque, proposé une intervention militaire pour protéger un gouvernement dont tous reconnaissaient pourtant la légalité.

Au contraire, les promoteurs du putsch avorté de septembre 2002 ont bénéficié des honneurs de la République. Ils ont occupé militairement la moitié nord du pays qu'ils ont gouverné à leur guise, et leur chef a fini par se faire nommer Premier ministre. Le mandat présidentiel de Laurent Gbagbo s'étant achevé en 2005, il est quand même resté au pouvoir, estimant à tort ou à raison que le contrôle d'une partie du territoire par la rébellion armée lui imposait de demeurer à la magistrature suprême jusqu'à ce qu'une solution de sortie de crise soit trouvée.

Nul ne conteste que l'élection présidentielle de 2010 s'est déroulée dans des conditions peu optimales - la « partition » de fait du territoire national, une souveraineté passablement ébréchée en conséquence de divers compromis boiteux, et un processus inachevé de désarmement de la rébellion. La Commission Électorale Indépendante (CEI) chargée, d'après la Constitution et la loi électorale d'organiser les élections et d'en proclamer les résultats provisoires selon le mode du « consensus » n'a pu le faire dans le délai officiel des 72 heures après la fermeture des bureaux de vote. Ses 31 membres n'ayant pas pu trouver le « consensus » requis par les accords signés par les parties, son Président s'est fait conduire en pleine nuit par deux ambassadeurs occidentaux au siège de campagne du candidat Alassane Ouattara pour proclamer unilatéralement ce dernier vainqueur.

S'appuyant sur des allégations d'irrégularité et de fraudes dans certaines régions du pays, le Conseil Constitutionnel qui, en tant qu'organe juridique suprême en matière électorale, avait seul la prérogative de proclamer les résultats définitifs, a annulé les résultats à ses yeux truqués du scrutin dans les trois départements de la Vallée du Bandama. Sans demander que les élections y soient reprises, que les chiffres sur les procès-verbaux soient revalidés ou que les votes y soient recomptés, il a proclamé Laurent Gbagbo vainqueur. Conséquence : les deux candidats s'arc-boutent chacun sur sa position malgré la frivolité des faits sur lesquels ils s'appuient, l'opprobre dont ils sont l'objet dans certaines zones de la Cote d'Ivoire, les menaces de guerre que leur entêtement fait peser sur le pays, et les risques mortels auxquels ils s'exposent et exposent leurs compatriotes.

Depuis lors, deux logiques incomplètes s'affrontent. Pour les uns, tout se ramène à une affaire de vandalisme électoral. Il suffit alors, comme le réclament à cor et à cris les hérauts de la « démocratie par procuration », que la « communauté internationale » se hisse à hauteur du défi. La mise en quarantaine, l'étranglement financier et l'interdiction de voyager ne suffisant pas, une petite intervention chirurgicale conduite par les armées de la sous-région viendrait s'ajouter à la panoplie des moyens nécessaires pour extirper l'usurpateur, contraindre le larron - unilatéralement désigné ? - à la fuite, procéder à son assignation devant la Cour Pénale internationale, voire le « liquider » simplement.

S'étant avérés incapables de mobiliser leurs troupes aux fins de défense de ce qu'ils affirment être les résultats du suffrage universel au besoin par la voie d'un soulèvement populaire, une partie des Ivoiriens et de leurs alliés externes cherche maintenant à sous-traiter la besogne à des supplétifs africains - eux-mêmes probablement originaires de pays où des élections démocratiques n'ont jamais eu lieu, tragique ironie aujourd'hui concevable seulement en Afrique. Sans doute armés, encadrés et soutenus sur le plan logistique par un cartel de pays occidentaux, ils sont invités à verser leur sang et celui de quelques milliers d'Ivoiriens dans une aventure dont les fondements en droit international et en droit ivoirien n'existent pas. Les apparences de la démocratie dans ce qui fut autrefois le joyau de l'Afrique francophone seraient ainsi sauves. Et chacun s'en irait la conscience allégée, mais sans que la vieille demande de justice universelle à l'égard de l'Afrique et des Africains - qui était au fondement de la lutte pour une véritable décolonisation - ait progressé d'un pas.

Pour d'autres encore, tout ceci n'est qu'un complot - un de plus - ourdi contre le dernier des prophètes anti-impérialistes, et peut-être un jour martyr de la lutte pour la « seconde indépendance » d'un continent pillé depuis des siècles par des prédateurs de tous bords.

Quant aux États occidentaux - ceux-là même qui n'ont cesse d'invoquer la liberté, les droits de l'homme et la démocratie, mais qui n'hésitent jamais à les fouler aux pieds chaque fois qu'il s'agit de vies de nègres - l'appui indéfectible et multiforme, actif ou silencieux, prodigué depuis 1960 aux régimes de partis uniques, aux caporaux et autres kleptocrates en civil, aux guerres de sécession (cas du Katanga et du Biafra en particulier) et à toutes formes de répressions sanglantes sur le Continent a fini d'oter toute crédibilité à leurs sermons.

Dans ce procès qui dure depuis un demi-siècle déjà, ce que l'on appelle « la communauté internationale » n'est pas en reste. Qui, toutes générations confondues, ne se souvient en Afrique du meurtre de Patrice Lumumba, premier Premier ministre démocratiquement élu de la République du Congo, assassiné le 17 janvier 1960 avec la complicité silencieuse de l'ONU ? Plus près de nous, cette « communauté internationale » n'a-t-elle pas fermé les yeux sur les génocides du Rwanda, au Darfour, ou en République Démocratique du Congo ? La liste est en effet longue des « bonnes dictatures » que les propriétaires de la bonne conscience mondiale continuent de sponsoriser à travers la planète et dont les dirigeants criminels sont reçus sur tapis rouges et à coups de fanfare à Paris, Londres, Washington ou Bruxelles.

Les trafiquants d'élections en Irak, en Afghanistan, au Pakistan, en Biélorussie, en Libye, en Éthiopie, en Égypte, et dans de nombreux autres pays ne dorment-ils pas tranquilles ? La toute-puissante et généreuse communauté internationale ne continue-t-elle pas de leur déverser chaque année des dizaines de milliards de dollars d' « aide financière » ? Quant au Premier ministre kenyan Raila Odinga que l'Union africaine a affublé du titre pompeux de médiateur de la crise ivoirienne, rappelons simplement qu'il a accepté 1.500 morts dans son pays après l'élection présidentielle de décembre 2007 avant d'entrer dans le gouvernement d'un Président qu'il qualifiait la veille de « tyran sanguinaire ». Pour le reste, bien des dictateurs crapuleux n'ont pas hésité à enfourcher le cheval du nationalisme et du panafricanisme pour justifier désordre et chaos.

Le voleur de boeufs et le voleur de poules

Il faut donc revenir aux constats de fond. Le premier est qu'aux élections de 2010, la Cote d'Ivoire a été piégée par l'architecture juridico-politique dont elle s'est hâtivement dotée pour résoudre la crise des dix dernières années. Tant que cette architecture est en place, chaque consultation électorale majeure risque de déboucher sur les memes impasses.

Deuxièmement, il est désormais difficile, voire impossible, de déterminer avec exactitude lequel des deux candidats a gagné de manière incontestable le scrutin présidentiel des 31 octobre et 28 novembre. L'un et l'autre disposent de demi-arguments pour justifier leur position et défendre leur cause. Mais aucun ne dispose de toute la vérité.

Troisièmement, si guerre il doit y avoir, elle sera avant tout une guerre contre les civils, comme nous l'ont malheureusement appris tant d'expériences récentes.

Au demeurant, rivalisant de cynisme, les deux prétendants au trône (et leurs affidés) le savent parfaitement. Le premier semble se résigner à l'idée d'en être la première victime. Il rêve peut-être de célébrer ses propres funérailles à la manière des hommes riches au temps de l'esclavage - au milieu d'une flambée de sacrifices humains, en utilisant si nécessaire ses parents, clients et captifs comme gages et dommages collatéraux.

En appelant publiquement à une guerre d'extirpation menée par des armées étrangères dans son propre pays et contre une partie de ses compatriotes, le second voudrait accéder à la magistrature suprême par la fenêtre, en marchant sur les cadavres de ses concitoyens et en instrumentalisant vaille que vaille les instances sous-régionales et internationales, lorsqu'il ne se laisse pas instrumentaliser par elles, et en contractant auprès de ses soutiens externes une lourde dette secrète qu'il fera payer, le moment venu, par toutes sortes de capitations, privilèges extra-territoriaux et abandons de souveraineté.

Certes, celui qui appelle à la guerre n'a pas le même niveau de responsabilité morale que celui qui pourrait en être la principale cible. Mais tous les deux sont unis par une funeste dette de mort dont l'enjeu premier n'est pas la démocratie, mais l'accaparement des rentes sur fonds de relance des procédures de l'inégalité et, dans les deux cas, par le biais d'une intensification des conduites d'extraversion.

Il convient d'autre part de souligner que dans cette Afrique postcoloniale, la situation ivoirienne est somme toute prosaïque. Ce n'est pas la première fois - et ce ne sera sans doute pas la dernière - que l'on fait face à des perdants qui refusent de s'en aller et à des prétendants qui, voulant éviter le dur et patient travail de mobilisation de leur société, se démènent pour arriver au pouvoir dans les fourgons des armées étrangères d'occupation. Voleurs de boeufs contre voleurs de poules, c'était le cas récemment au Zimbabwe et, dans une large mesure, au Kenya. D'intervention armée, il n'y en eut point malgré l'ampleur du délit.

Que dire des successions de père en fils au Congo-Kinshasa, au Togo et au Gabon, ou encore des hold-ups électoraux à répétition au Cameroun et dans presque toutes les satrapies de l'Afrique centrale, en Guinée, au Burkina-Faso, en Mauritanie, en Ouganda, au Rwanda et au Burundi, en Éthiopie, en Érythrée et ailleurs ? La réponse de « la communauté internationale » ? Nul émoi. C'est qu'à l'heure actuelle, il n'existe, ni dans le droit international, ni dans les conventions africaines (ou d'ailleurs étrangères), aucune clause prévoyant le recours à une force extérieure pour fonder la démocratie ou restaurer celle-ci à la suite d'un contentieux électoral.

Le dévoiement des élections dans le cadre du multipartisme en Afrique est une question historique et structurelle. Le coût des élections en vies humaines n'a cessé d'augmenter au cours des vingt dernières années. Bien peu de ces exercices auront été conduits dans la transparence, dans des conditions de légitimité incontestables. Qui s'étonnera qu'en de si funestes circonstances, leurs résultats ne soient que rarement acceptés par tous les protagonistes ?

Pis, elles sont devenues le moyen privilégié de conduire la guerre par d'autres moyens. Dans maints pays en effet, nombreux sont ceux qui, mis dans l'impossibilité de voter, ont été pratiquement déchus de leur citoyenneté. Le formidable déséquilibre entre les ressources accaparées par les partis au pouvoir et celles des formations de l'opposition est tel que la compétition est faussée dès le départ. Tout est réquisitionné par les partis gouvernementaux : l'appareil d'Etat, la bureaucratie, la police, la garde prétorienne, l'armée et les milices, la télévision nationale, l'ensemble des magistrats et la cour constitutionnelle, sans compter les deniers publics.

Dans certains cas, il n'y a pas jusqu'à la « commission électorale indépendante » qui ne soit sous la botte du gouvernement. Par ailleurs, il n'est pas rare qu'elles soient précédées ou suivies par un couvre-feu, quand ce n'est pas par une déclaration d'état d'urgence. Alors qu'elles sont supposées consacrer l'idée de la souveraineté du peuple, peu nombreux sont les Etats qui peuvent les financer de manière autonome. La plupart des gouvernements dépendent partiellement ou entièrement de subsides étrangers pour en assurer l'organisation. Cette tutelle financière étrangère ne s'apparente pas seulement à de la corruption indirecte. Elle jette un discrédit sur la capacité des Africains à se gouverner eux-memes.

Hormis les rares cas de l'Afrique du Sud, du Botswana, de l'Ile Maurice et, dans une moindre mesure du Ghana, les élections constituent donc l'un des baromètres les plus trompeurs de la démocratisation des régimes africains postcoloniaux. Moment privilégié de cristallisation des conflits historiques, elles servent surtout à exacerber les antagonismes déjà présents au sein des pays considérés. Il est, de ce point de vue, significatif qu'elles aient été au point de départ des conflits meurtriers les plus récents, ou en tous cas de graves crises qui menacent durablement l'existence de maints États. Au cours des vingt dernières années, les violences pré- et post-électorales ont inévitablement conduit à des désordres civils et, souvent, à d'innombrables pertes en vies humaines, à des destructions spectaculaires de la propriété et à des déplacements parfois massifs de populations. Celles-ci sont ensuite abandonnées aux mains d'organisations humanitaires qui, pour justifier leur propre existence et activités, comptent de plus en plus sur la militarisation des désastres et catastrophes du Continent lorsqu'elles n'appellent pas directement à l'ingérence externe.

Quel droit d'ingérence ?

Parce qu'elle menace désormais la sécurité, la stabilité et le progrès des Africains, la question du respect du verdict des élections doit être abordée avec un minimum de profondeur historique et stratégique. Les contentieux électoraux ne seront pas réglés par la boite de Pandore que sont les interventions militaires ad hoc, mais par la constitution, sur la longue durée, de nouveaux rapports de force entre l'État et la société et entre les classes sociales en voie de cristallisation. Il appartient aux Africains et à eux seuls de conduire ce travail.

Aucun diktat d'aucune ex-puissance coloniale ne saurait s'y substituer. Les Africains seuls doivent décider s'ils veulent mettre un terme aux crises post-électorales à répétition. S'ils optent pour l'usage de la force (solution qui traduit par définition un déficit d'imagination morale), ils devront s'entendre au préalable sur des principes de droit collectivement négociés et qui s'appliqueraient à tous les cas sans exception. Pour être légitimes, de telles interventions armées (forcément rarissimes) devraient être entièrement financées par les Africains eux-memes.

Du Kosovo à l'Irak, de l'Iran à l'Afghanistan, du Moyen-Orient en Amérique Latine, l'on ne saurait oublier combien la politique des « deux poids, deux mesures » a plombé au long des années la légitimité des interventions des puissances occidentales dans les affaires d'autres États. À l'appliquer en Afrique, cette politique risque d'ouvrir de nouvelles fractures et fronts d'hostilité entre États du Continent. Quelle crédibilité auraient des soldats nigérians, nigériens, gambiens, togolais ou burkinabé arpentant les quartiers d'Abidjan à la recherche de la démocratie ? Il faut en effet faire preuve soit d'un strabisme notoire, soit de haine de soi ou de mépris invétéré des Africains pour justifier qu'au sein de la CEDEAO, des régimes issus de putsch militaires ou classés comme des dictatures sur l'indicateur Freedom House aillent « sauver la démocratie » dans des pays tiers.

En plus d'accentuer la logique qui fait des élections un jeu à somme nulle, la politique des « deux poids, deux mesures » encouragerait les tentatives d'instrumentalisation des instances internationales par des acteurs crapuleux, voire alimenterait guerres ethniques et tentatives de sécession - toutes choses absolument contraires aux intérêts de l'Afrique. L'alternance régulière au pouvoir en Afrique ne peut guère être fille du droit d'ingérence. Le « droit d'ingérence » n'est pas un droit. Il est une perversion du droit. Exception faite des situations d'extrémité (cas des génocides), les appels au « droit d'ingérence » visent surtout à consacrer l'asymétrie au coeur des relations internationales. Dans le cas de l'Afrique, il faut craindre que le « droit d'ingérence » ne soit, in fine, que l'équivalent du « droit de conquête » et d'occupation qui, au temps de la colonisation, justifiait l'asservissement des « races inférieures », c'est-à-dire justement celles qui, de force, avaient été déclarées incapables de se gouverner par elles-mêmes.

Sortir du piège électoral

Serions-nous par conséquent condamnés à la paralysie et à l'inaction ? Non, certes.

Dans le cas de la Cote d'Ivoire, il ne reste malheureusement qu'une palette de mauvaises solutions. S'il est désormais impossible de déterminer de façon indiscutable sur la base de procès-verbaux non falsifiés qui a gagné les élections ; si les deux prétendants au trône peuvent compter chacun sur une certaine force militaire et mettre dans la rue des dizaines de milliers de partisans convaincus de leur bon droit et décidés à en découdre, alors le scénario d'une révolution démocratique visant à neutraliser Gbagbo ou Ouattara n'a pas beaucoup de chances de réussite. D'ailleurs, il est de plus en plus évident, quelle que soit l'issue de la confrontation, qu'aucun des deux hommes ne pourra, à moyen ou long terme, gouverner sereinement la Cote d'Ivoire entière et tenir les rênes de l'État sans se lancer dans des « purges » de l'administration et des chasses aux sorcières dans l'armée ou au sein de la population, faisant ainsi le lit de la prochaine rébellion ou de la prochaine tentative de putsch.

L'on pourrait, à la limite, envisager la partition du pays et un divorce par consentement mutuel, à l'exemple de l'ancienne Yougoslavie. Mais une telle solution n'est pas seulement écartée par les deux « Présidents ». Les grands ensembles ethno-régionaux de Cote d'Ivoire - notamment dans le sud - sont très hétérogènes et les populations y sont tellement mélangées que les déchirements et le coût économique et humain d'un éclatement seraient insupportables.

Le bras de fer qui consiste à étouffer le régime de Laurent Gbagbo à coup de sanctions internationales, de retraits d'accréditation d'ambassadeurs nommés par lui, d'exclusion de ses représentants au sein des instances politiques et économiques régionales - y compris de l'Union économique et monétaire ouest-africaine et de la Banque centrale des États d'Afrique de l'ouest -, de fermeture des guichets de la BCEAO, de menaces d'embargo sur les exportations de cacao qui sont avant toute chose la principale source de revenu de millions de pauvres paysans, pourrait plonger davantage la Cote d'Ivoire dans une crise économique et financière profonde et durable dont souffrirait l'ensemble de la sous-région. À cet égard, le recours à l'asphyxie monétaire comme instrument de combat politique révèle les véritables enjeux de la Zone franc. Celle-ci montre enfin au grand jour son vrai visage d'union monétaire asymétrique, de vestige du pacte colonial, de camisole de force bridant la compétitivité et la flexibilité des économies africaines et de piège politique pour tout adversaire désigné à la vindicte des pontifes de la bonne conscience internationale.

Si l'on écarte l'hypothèse d'un nouveau coup d'état militaire à la Nigérienne qui neutraliserait les deux principaux protagonistes du conflit actuel et certains de leurs affidés, il reste alors une dernière (mauvaise) solution - celle qui consisterait à reprendre le second tour de l'élection présidentielle, dans de meilleures conditions de surveillance et de décompte des voix, notamment par les Ivoiriens eux-mêmes.

Dans tous les cas, si les Ivoiriens doivent sortir de l'impasse dans laquelle ils se trouvent et retrouver les chemins d'une réconciliation durable, il n'y a guère d'alternative à une négociation entre les parties en conflit, à un renouveau de l'imagination morale et institutionnelle, et à une refonte radicale de leur système politique. Cette réforme pourrait prendre la forme d'une conférence nationale de laquelle sortirait une assemblée constituante. À une nouvelle constitution fondée sur le principe d'une décentralisation fédérative viendrait s'ajouter une réforme du scrutin. Celle-ci inclurait, de nécessité, une dose de proportionnelle à même d'assurer une représentation minimum de la diversité des « terroirs », tandis qu'un président fédéral honorifique serait élu au suffrage universel.

Cela dit, il n'y aura pas de progrès de la démocratie en Afrique tant que les Africains ne seront pas à même de choisir librement leurs dirigeants, c'est-à-dire, également, de congédier ceux d'entre eux dont ils ne veulent plus. Afin de parvenir à un renouvellement des élites, de la culture et des pratiques du pouvoir, il est absolument impératif que le nombre de mandats à la tête de l'État soit limité et que l'alternance au pouvoir devienne une réalité. L'une des raisons de l'enkystement des structures politiques africaines est bel et bien l'impossibilité dans laquelle se trouvent bien des peuples de se débarrasser pacifiquement de tyrans décidés à mourir au pouvoir.

Mais pour que les conditions d'une alternance pacifique soient réunies, il faut repenser de fond en comble la politique, l'économie et l'architecture des élections. Ce remodelage doit être l'œuvre des Africains eux-mêmes qui se doteraient, à l'occasion, d'un cadre juridique et de moyens de pression contre les pouvoirs délinquants. Ces moyens de contrainte pourraient inclure - dans de très rares cas étroitement circonscrits - des interventions militaires. La démocratie ne se réduit cependant, ni au multipartisme, ni aux élections même si elle est impensable sans ces ingrédients. De graves divisions traversent les sociétés africaines contemporaines. La plupart sont exacerbées par l'accélération de leur structuration objective en classes antagonistes, même si pour le moment, la conscience de classe est sinon détournée, du moins subsumée par d'autres formes de subjectivation. Dans ces conditions, le jeu démocratique dans le continent ne saurait être un jeu à somme nulle. Il est par conséquent impératif que soient « constitutionalisés » les statuts et droits de l'opposition et que, là où cela est possible, le gouvernement par coalitions l'emporte sur l'arithmétique purement majoritaire.

De façon plus décisive encore, un effort intellectuel colossal doit être consacré non seulement à l'approfondissement du sens de la démocratie elle-même, mais aussi à une extension progressive de ses multiples dénotations dans les conditions africaines contemporaines. Ceci implique que, dans la mise en forme des institutions de la démocratie, l'on prenne au sérieux la morphologie complexe des sociétés et surtout les pratiques quotidiennes par le biais desquelles les gens s'efforcent de soigner le lien social là où il a été endommagé, d'entretenir le minimum de cohésion nécessaire à la reproduction de la vie, bref de « faire communauté ».

Si les Africains veulent devenir les initiateurs d'une impulsion potentiellement innovatrice pour la démocratie dans le monde de notre temps, alors ils doivent arrêter de réciter les catéchismes et de psalmodier les versets des autres et faire oeuvre de créativité et d'imagination philosophique, politique et institutionnelle. Ils doivent forger une alternative historique à un modèle postcolonial de pouvoir qui, un demi-siècle après la décolonisation, ne sait toujours se nourrir que de la mystique du sang versé et ne sait, en conséquence, vivre que de la mort en masse de ceux qu'il est supposé servir.

Dans un contexte où l'inégalité des personnes semble mieux tolérée que l'exclusion des sujets, c'est au principe représentatif lui-même qu'il faut donner un nouveau contenu politique et juridique. Le but en la matière ne serait certes pas de pérenniser l'inégalité en tant que telle, mais de multiplier les répertoires grâce auxquels l'on conjuguerait désormais systématiquement différence et inclusion, afin justement que nulle composante du corps politique ne soit abandonnée sur le bord du chemin. Au demeurant, compte tenu des réalités socio-anthropologiques du Continent, aucune expérience d'auto-gouvernement ne saurait faire fi de l'existence objective d'une pluralité de corps titulaires de pouvoirs divers. Il n' y a pas jusqu'à l'idée même de société civile qui ne doive être repensée en fonction de cette multiplicité. Faute d'un déplacement substantiel de ses différentes dénotations dans différents contextes, l'idée de la démocratie en Afrique sera réduite à l'état de simple surface, vidée de tout contenu positif ; et loin de refléter la volonté du peuple, les élections resteront des moments de condensation explosive de conflits anciens - la guerre de tous contre tous.

Pour le reste, le besoin de transformations radicales n'a jamais été aussi pressant qu'aujourd'hui. Mais les forces sociales capables de porter ces transformations semblent manquer à l'appel. C'est à les rassembler et à les nourrir qu'appelle le présent. Telle est l'aride tâche à laquelle doivent s'astreindre les mouvements sérieux d'opposition et la coalition de tous ceux qui, contre la spirale dégénérative, veulent entreprendre la construction d'une liberté neuve en Afrique. Celle-ci doit redevenir son propre centre, sa force propre. Si, pour y parvenir, la guerre est inévitable, alors le Continent devra apprendre à choisir judicieusement ses guerres, faute de quoi consciemment ou non, il se fera chaque fois enrôler dans celles d'autrui, avec des conséquences chaque fois plus catastrophiques pour son avenir.

Achille Mbembe est l'auteur de Sortir de la longue nuit. Essai sur l'Afrique décolonisée (Paris, La Découverte, 2010).

Célestin Monga est l'auteur de Nihilisme et négritude (Paris, PUF, 2009).

Sources : médiapart

mardi, janvier 11, 2011

Côte d’Ivoire : Les 10 erreurs de Ouattara


1) Ouattara est sorti de la légalité constitutionnelle aussitôt le verdict des urnes proclamé par la CEI. Au lieu de placer son combat sur le terrain juridique en contestant par exemple les annulations effectuées par le Conseil constitutionnel et en réclamant de nouvelles élections transparentes dans toutes zones où il y a eu fraudes, il s’est engagé dans un bras de fer avec le pouvoir sortant. Comme si son souci était d’abord le pouvoir et non la reconnaissance par le peuple ivoirien de sa victoire. Ce n’est pas la communauté internationale qui décrète la légitimité d’un dirigeant, mais le contrat tacite passé entre le futur représentant et le peuple qui lui accorde sa confiance via son suffrage.

2) Il s’est entouré de rebelles après sa victoire pourtant reconnu par la communauté internationale. Or il aurait été plus simple pour lui de se placer sur le terrain de la réconciliation nationale avec un premier ministre neutre. Il a pris Soro, l’ex-rebelle, opportuniste et imposé comme premier ministre par cette même communauté internationale à Gbagbo, qui est une épine dans son pied. Ce qui le décrédibilise complètement en tant que démocrate puisque les intentions de Soro sont connues de tous.

3) Avoir laissé sa communication aux diplomates mandatés par la communauté internationale et à Soro le rebelle aux premières heures de la crise post-électorale. Il aurait dû s’affirmer comme seul maître à bord. Aujourd’hui il apparaît non pas comme un candidat indépendant mais un comme un pion de l’Occident, de la communauté internationale aux mains liées, dans une Afrique plus qu’excédée par les outrances impunies de ce curieux arbitre. Encore une erreur d’apprenti communiquant.

4) Avoir crié haut et fort pour les armes contre Gbagbo alors que son adversaire optait pour le dialogue. Encore une erreur d’apprenti démocrate.

5) Avoir écrit au Conseil constitutionnel qui l’a désavoué alors que sa légitimité semblait sortir des Urnes. Erreur de débutant.

6) Avoir cautionné que les résultats soient rendus publiques à l’Hôtel du Golf où il est retranché avec ses amis. Il aurait exigé que ces résultats mêmes partiels aient été donnés dans un endroit neutre et vierge de tout soupçon.

7) De parler au nom de la communauté internationale dans chacune de ses déclarations et non au nom de l’intérêt supérieur du peuple ivoirien. Dans toutes ses déclarations il mentionne « la communauté internationale nous a donné raison ». Or on sait de quoi elle est constituée cette fameuse communauté internationale. S’il cherche un conseiller en communication, il peut me contacter.

8) D’avoir négligé son allié de circonstance Henri Konan Bédié dont le report de voix au second lui a sans doute été bénéfique. Ce qui a été très mal perçu par les électeurs de Bédié qui lui ont fait confiance, maintenant ils lui tournent le dos au nom du refus de la vassalisation de la CI par la Communauté internationale. Exemple : l’appel à la désobéissance civile n’a même pas été suivi.

9) De n’avoir pas su faire confiance aux institutions ivoiriennes représentant le peuple ivoirien et de s’être rangé derrière la voix de la communauté internationale.

10) Son double discours. Lorsqu’on est démocrate, on va jusqu’au bout de sa logique quand les moyens de contestation le permettent. Il ne l’a pas fait. Lorsque vous êtes persuadé que le droit est avec vous, il ne faut jamais abandonner. La justice finit toujours par triompher.

Moralité : Il faut se méfier des faiseurs de roi, ils ont toujours une idée derrière la tête. Qu’il soit placé par la communauté internationale par tous les moyens au poste de président, Ouattara vient s'ajouter à la longue liste des présidents africains installés de la pire manière au pouvoir par l’Occident dans l’Afrique post-indépendance. Et Gbagbo, mort ou vivant, celui qui aura dit non aux puissances occidentales. Même si cette assertion reste infondée.


Abidjan, comment ça va avec la douleur postélectorale ?

Les dernières News sur la CI font état d'un possible gouvernement d'union national (voir article sur Grioo.om). On change de fusil d'épaule ? Après l'échec de l'appel à la désobéissance civile, après l'échec de la menace militaire, il semble que le camp Ouattara revient progressivement vers la raison.

Le sieur ADO vient peut être de comprendre que l'Afrique a changé, et que l'on ne se décrète pas président sous prétexte que l'on a reçu l'onction de la communauté internationale. Une communauté internationale de plus en plus détestée par la jeunesse panafricaine à cause de ses agissements sans cohérence, paternalistes, impérialistes, voire négrophobes. Il est vrai que Laurent GBAGBO n'est peut être pas l'homme qu'il faut à la Côte d'Ivoire, comme le sont de nombreux roitelets tropicaux. Mais de là à vouloir imposer un président à un état souverain au mépris des conventions internationales relève de l’amateurisme au mieux du brigandage diplomatique.

Il est loin le temps où il suffisait entre pays occidentaux de se passer de coups de fils pour déloger les dirigeants africains récalcitrants. Sauf que désormais les peuples africains ont bien compris la leçon. Endormis hier par manque d’information et de formation, ils ne se risquaient pas à attendre de pied ferme les décisions unilatérales imposées par la violence par les puissances impérialistes. Aujourd’hui ils osent se faire entendre et c’est une bonne chose. Dommage que cela se fasse au profit d’individus aussi peu recommandables que Gbagbo lui-même qu’il ne faut pas vite ranger dans la case de pseudo panafricanistes même s’il a bradé les leviers de l’économie ivoirienne aux hommes d’Affaires français et étrangers.

Ce qui est sûr quelque soit l’issue de ce bras de fer Ouattara-Gbagbo, il est préférable de dire Puissances euro-occidentales contre Gbagbo, via UA et CEDEAO caporalisées, les deux hommes ont contracté une dette envers les peuples africains qu’ils se doivent d’honorer le paiement au risque d’être définitivement rangés dans la case de fossoyeurs des intérêts ivoiriens et africains.

dimanche, janvier 09, 2011

Côte d'Ivoire : la France arme des mains noires

Côte d'Ivoire - Les signes évidents d'une imminente attaque contre la Côte d'Ivoire sont perceptibles. Les chiens de guerre venus de l'Irak et de l'Afghanistan se mettent progressivement en place sur le territoire ivoirien. Deux containers de munitions embarqués depuis le port de Dakar et destinés à l'armée française en Côte d'Ivoire ont été récemment saisis par les autorités ivoiriennes.

Mais la France qui, cette fois-ci, refuse de se salir les mains comme ce fut le cas en novembre 2004 à l'Hôtel Ivoire, à Abidjan où l'armée française a tiré et tué 67 jeunes Ivoiriens aux mains nues, a changé de fusil d'épaule.

On se rappelle encore l'image affreuse de ce jeune homme dont la tête a été broyée par les tirs des chars français, laquelle image a fait le tour du monde. Tirant les leçons de cette entreprise criminelle qui a davantage terni son image sur le continent noir, la France et ses dirigeants actuels, ont décidé d'opposer, cette fois, les Africains, les éternels souffre-douleurs des pays occidentaux, les uns aux autres.

Comme s'il aimait la Côte d'Ivoire plus que les Ivoiriens eux-mêmes, le président français, Nicolas Sarkozy sous le fallacieux prétexte que «Gbagbo refuse de quitter le pouvoir», manoeuvre ferme pour assassiner le président ivoirien. Aussi, ce fils d'immigré a-t-il armé des Africains donc des mains noires aux fins d'accomplir au nom de la France, cette mission macabre.

Pour ce faire, Nicolas Sarkozy a dépêché en Côte d'Ivoire, précisément à Bouaké, la capitale de la rébellion ivoirienne, des cargos militaires qui assurent le transport des éléments de Guillaume Soro et d'Alassane Ouattara en direction du Burkina, du Sénégal et du Nigéria, là où les attendent des instructeurs français chargés de la formation de ces bandes armées.

D'où, la reconstitution de l'Ecomog. Mais à la vérité, ce sont les rebelles ivoiriens qui vont constituer le gros lot de cette force que l'Elysée s'active à déployer en Côte d'Ivoire et dont la mission spécifique serait de déloger le président élu, Laurent Gbagbo et d'installer dans le fauteuil présidentiel ivoirien, Alassane Ouattara, candidat malheureux à la présidentielle de novembre 2010 en Côte d'Ivoire.

Une mission somme toute périlleuse pour toute l'Afrique de l'Ouest et pour laquelle la France refuse d'assumer les conséquences en agissant en sous main sous le couvert de la Cedeao qu'elle a caporalisée. Et dire que la recolonisation de l'Afrique noire a repris de plus belle, il n'y a qu'un pas.

Robert Krassault
Sources : Afrique en ligne

L'ONU recolonise l'Afrique par Tierno Monénembo

Une tribune publiée par le Journal Le Monde daté du 04 janvier 2011

Pauvre Afrique, hier, on lui imposait ses dictateurs, aujourd'hui, on lui choisit ses "démocrates". Les rappeurs, ces Prévert des nouveaux temps, viennent d'inventer un néologisme qui fait fureur d'un bout à l'autre du continent : la démocrature. Entendez, ce système hybride (le visage de la démocratie, le corps diabolique de la dictature) qui a le don de déchaîner les passions et d'ajouter à la confusion.



Qui a gagné les élections en Côte d'Ivoire, qui les a perdues en Guinée ? Cette question qui a l'air d'embraser l'univers n'a aucun sens dans les faubourgs de Conakry et d'Abidjan où, bon an, mal an, la vie politique n'aura jamais qu'un seul régime, la disette, et une seule loi : "tout ce qui n'est pas obligatoire est interdit", pour reprendre le fameux mot de Léon Campo. Là-bas, on préfère d'expérience les mauvaises élections aux guerres civiles bien réussies. Mieux vaut encore Bokassa et Mobutu que les drames du Liberia ou de la Sierra Leone ! La bête humaine s'habitue à l'enfer du despotisme, certainement pas aux massacres à la rwandaise !

Or, les démons de la violence et de la haine hantent à nouveau la Côte d'Ivoire. Comme en 2000, le pays va se couper en deux, il va brûler comme une paille, plus rien ne peut l'empêcher. La faute à qui ? Au monde entier et d'abord et avant tout à cette fameuse communauté internationale qui n'est jamais mieux dans son rôle que quand elle rallume les incendies qu'elle est censée éteindre.

Formellement, ce "machin" derrière lequel se cachent les grosses griffes des Etats-Unis et de l'Union européenne ne pèse pas plus que le poids d'un arbitre. Son rôle se limite à prévenir les conflits et à proposer une solution négociée lorsque ceux-ci s'avèrent inévitables. Aucune circonstance exceptionnelle ne lui permet de déborder de ce cadre-là. C'est du moins ce que croyaient les néophytes, les sorciers de la diplomatie, eux ne manquant jamais d'arguments pour justifier l'injustifiable.

Disons-le clairement : l'ONU n'a pas à décider qui est élu et qui ne l'est pas à la tête d'un pays (le cas ivoirien compte peu en l'occurrence). Le faisant, elle outrepasse ses droits, ce qui lui arrive de plus en plus. Au point que derrière le langage feutré de ses diplomates, on distingue des bruits de bottes coloniales. A la manière dont Barack Obama, Nicolas Sarkozy ou Ban Ki-moon, traite ce pauvre Laurent Gbagbo, on croit revoir Gosier-d'Oiseau (célèbre personnage du Vieux nègre et la médaille, roman du Camerounais Ferdinand Oyono) transpirer sous son casque en engueulant ses nègres dans une plantation d'Oubangui-Chari.

Nous ne soutenons pas Laurent Gbagbo, nous nous contentons de rappeler un principe. D'ailleurs, le pestiféré d'Abidjan n'a pas besoin de notre soutien : l'arrogance des chancelleries et l'hystérie des médias travaillent pour lui. La diabolisation dont il est l'objet a fini par le rendre sympathique aux yeux de ses pires détracteurs. "A force de jeter une grenouille de plus en plus loin, on finit par la jeter dans une mare", dit un proverbe peul...

Nous ne contestons pas non plus l'élection d'Alassane Ouattara (nous sommes même convaincus que psychologiquement et techniquement, il est mieux outillé que n'importe lequel de ses concurrents pour gouverner). Nous disons simplement que le rôle de la communauté internationale ne revient pas à prendre des positions partisanes et à se répandre en déclarations intempestives encore moins dans une situation aussi explosive que celle de la Côte d'Ivoire. Pourquoi le défi et la menace du canon là où la discrétion, la ruse, la prudence et le tact bref, l'art de la diplomatie, auraient suffi ?

Nous n'allons pas apprendre à des géopoliticiens de métier que la Côte d'Ivoire est la pierre angulaire de la sous-région et que, si elle sombre, elle risque d'entraîner ses voisins, alors que la Guinée tente une périlleuse expérience démocratique et que Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI) a déjà ses sanctuaires au Burkina Faso et au Mali. La situation paraît d'autant inquiétante qu'il plane sur la région un "non-dit" tribal lourd de menaces pour l'avenir : tout sauf un Dioula au pouvoir à Abidjan ; tout sauf un Peul au pouvoir à Conakry.

La Côte d'Ivoire mérite-t-elle de brûler pour les besoins des statistiques ou pour les beaux yeux de Laurent Gbagbo ou d'Alassane Ouattara ? Non, assurément non !

Henri Konan Bédié, Laurent Gbagbo, Alassane Ouattara, où est la différence ? Ils forment le trio maléfique qui a ruiné le pays d'Houphouët-Boigny. A Bédié, le poison de l'ivoirité, à Ouattara, celui de la sécession, à Gbagbo celui de la confiscation du pouvoir. Chacun de ces caïds a montré combien il était prêt à sacrifier sa patrie au profit de son pouvoir personnel. De ce point de vue, ils n'ont rien d'exceptionnel.

La quasi-totalité des chefs d'Etat africains sont au pouvoir à la suite d'un putsch sanglant ou d'une élection truquée. Une loi non écrite permet à chacun de tuer, de voler et de tricher pour arriver au pouvoir. La nouveauté, ce sont les "scrupules" avec lesquels les grands de ce monde regardent cela. Congo, Rwanda, Somalie, jusqu'ici ils ont encouragé les trucages électoraux et les putschs et fermé les yeux sur les pires atrocités au gré de leurs intérêts. Et voilà que ces messieurs sont soudain pris d'un excès d'états d'âme !

Eh bien, s'ils sont devenus aussi vertueux qu'ils le prétendent, pourquoi ne vont-ils pas fouiller dans les cuisines électorales du Burkina, de la Tunisie ou de l'Egypte ? Sont-ils sûrs que les dynasties présidentielles du Gabon et du Togo sont sorties de la vérité des urnes ? Se seraient-ils comportés ainsi s'il s'était agi de l'Iran, de la Birmanie ou de la Chine ?

Ce raffut fait autour de Ouattara est tel qu'il en devient suspect. Que veut sauver la communauté internationale, à la fin : la Côte d'Ivoire ou un de ses protégés ? Ouattara et Gbagbo sont les loups-jumeaux de la politique ivoirienne : même teint, même sourire carnassier, même poids électoral (l'un contrôlant la Commission électorale et l'autre la Cour suprême). Il y a cependant entre eux une différence de taille : le carnet d'adresses. Dans le monde mesquin et corrompu qui est le nôtre, plus besoin de formule magique, ce joujou-là suffit à ouvrir les plus secrets des sésames.

Ancien directeur adjoint du Fonds monétaire international (FMI), Ouattara se trouve au coeur du complexe réseau qui gouverne ce monde alors que, modeste professeur d'histoire, Gbagbo, hormis un bref exil à Paris, n'est jamais sorti de chez lui. Ce petit détail-là explique mieux que tout (les longs couplets sur la démocratie par exemple) pourquoi une simple élection africaine a pris une dimension mondiale. Le village global est bel et bien là : la planète des copains et des coquins ! Et ses lois s'appliquent partout aussi bien en Côte d'Ivoire que dans la Guinée voisine où, Alpha Condé, le président "élu" est un ami des présidents africains et un vieil habitué des ministères parisiens.

"Je ne me vois pas échouer cette élection", affirma le nouveau président guinéen au lendemain du premier tour alors qu'il accusait un retard de près de 25 points sur son concurrent. Il ne croyait pas si bien dire : l'élection fut prolongée de cinq mois, le temps sans doute que le "bon" candidat soit prêt avec à la clé, l'incendie de la Commission nationale électorale indépendante, les vols du fichier informatique, le tout suivi d'un véritable nettoyage ethnique. Il n'y eut aucune enquête et ces sourcilleux jurés de la communauté internationale n'y trouvèrent rien à redire. Comme pour confirmer ce que tout le monde savait déjà : pour être élu en Afrique, pas besoin de mouiller la chemise. Avec un peu de chance et quelques copains bien placés à l'ONU, à la Maison Blanche, à l'Elysée ou au Quai d'Orsay, vous êtes sûr de passer même à 18 %.

Tierno Monénembo, écrivain guinéen, Prix Renaudot 2008 pour "Le Roi de Kahel" (Seuil)