mardi, mars 29, 2011
Antilles : Claudy Siar de la scène musicale à la scène politique...Aïe
lundi, juillet 20, 2009
Votre humble serviteur a vu enfin Aliker le film


Entre temps, les infos en boucle de la seule radio hexagonale en continue finissent par me lasser. Et je décide donc de prendre mon courage à deux mains. Soudain Aliker me revient. Ah ce fameux film dont j’ai entendu parler. Ma curiosité malsaine me transporte jusque dans les mailles de la toile. Je consulte le site « allocine.fr » pour voir les séances en région parisienne. A mon grand étonnement, le film n’est diffusé qu’à deux endroits. L’espace st Michel (5e Paris) et Le Brady (Paris 3e) à côté du mythique passage indo-pakistanais du même nom pour les parigos en mal de sensations exotiques. Sur le champ je devine ma galère : les créneaux horaires du film. L’espace saint Michel a réussi à caser le film en semaine à des horaires impossibles (lundi et vendredi à 13H55) pour le commun des mortels que je suis, tandis que le Brady joue les prolongations en weekend.
Ayant mauvais esprit, je me demande pourquoi une telle diffusion restreinte ?. Pourquoi un tel accueil ? Je me suis fait une raison, peut être pas la bonne. Un film politique sur un personnage encombrant au cœur de la colonie de la Martinique dans les années 30 ne pouvait que déranger. Pour vous donner la mesure de quoi il retourne voici le résumé de l’intrigue.
“Antilles. Colonie de la Martinique, dans les années 30.
Un simple militant communiste, André Aliker, malgré l’opposition effrayée de ses proches, va prendre la direction de la feuille imprimée que son Parti fait paraître vaille que vaille.
Par une intuition extraordinaire, Aliker devinera la force d’impact que pourrait atteindre ce moyen d’expression, et il transformera très vite la petite feuille militante en un véritable journal, appliquant des méthodes d’investigations et une éthique dignes de la presse moderne.
Dans cet univers colonial, hiérarchisé et clos, soumis à la toute-puissance des usiniers et des planteurs, ce nouveau journalisme aura l’effet d’un cyclone. Aliker s’attaquera directement au plus puissant des usiniers : Le Dragon.
Ce dernier a la réputation de détruire tout ce qui s’oppose à ses intérêts. Mais, André Aliker, affrontant sa propre peur, défiant sa propre mort, avec juste l’idée qu’il se fait du journalisme, ira jusqu’au bout de son intransigeant souci d’information et de vérité. De liberté aussi.”
A 17 heures pétantes j’arrive au Brady. L’endroit est drôlement chouette. Une petite salle avec ses allures de cinéma d’art et d’essai complètement à l’opposé des mastodontes comme UGC. Le guichetier n’est pas là. Il doit sûrement être polyvalent, caissier et technicien en même temps. Classique pour les petites salles dont on peut imaginer le budget de fonctionnement. En attendant, je m’éloigne brièvement du cinéma pour enfin emprunter le célèbre passage Brady. En foulant le sol de cet endroit particulier, je suis un peu déçu au regard du tapage médiatique dont il fait l’objet dans une certaine presse touristique. Quelques commerces et deux ou trois restaurants, ensuite des ombres enturbannées tapies dans ce décor qui rappelle étrangement l’Inde.
C’est un autre décor qui ouvre le film Aliker dans la Martinique des années 30. Ce sont des images en noir et blanc de femmes, d’hommes et d’enfants qui s’activent, balluchons sur la terre sur fond de bombardements. Le réalisateur a voulu peut être montré le contexte et la condition de l’homme noir en colonie dans une période post-esclavagiste. En tout cas il plante ce décor émaillé d’images de guerre en arrière plan.Le personnage principal d’Aliker campé par Stomy Bugsy met du temps à émerger. Il parle peu. Il reste effacé et introverti malgré les gros plans du visage matérialisant l’importance du personnage. Finalement ce sont les autres personnages, les compagnons de route d’Aliker qui vont porter le film du moins dans la première partie. Faut-il ou pas créer un syndicat ? Va-t-il accepter la gérance de « Justice » sur l’insistance de ses amis? Quelles orientations donner à la feuille de choue ? Les doutes puis l’engagement au final d’André Aliker aux côtés de ses camarades communistes vont progressivement faire sortir de l’ombre le personnage Aliker, mais sans grand éclat.
Pourtant tous les ingrédients sont réunis pour creuser sous le vernis du personnage. D’abord l’intransigeance d’André Aliker sur la manière de gérer le journal. Visiblement c’est un militant épris de justice qui ne marchande pas sa conscience pour un sou. Mais les considérations du journaliste vont prendre le pas sur son engagement militant le mettant parfois en porte à faux avec la vision de ses camarades. Grâce à son intransigeance, sa rigueur, son exigence de vérité et de justice, que « Justice » va passer de la feuille de chou locale à un journal d’investigation digne de ce nom. Sa renommée dépassant même les frontières du Lamentin.
Mais il y a aussi un autre aspect du personnage qui ressort dans ce portrait du journaliste. L’humaniste proche du peuple qui arpente les rues de la Martinique avec son deux roues pour distribuer le journal. Le petit peuple dont il défend les intérêts dans « Justice » lui est d’ailleurs reconnaissant.
Le personnage d’Aliker s’installe vraiment dans le film au moment où commence le face à face tragique auquel il se livre avec le béké Aubery, un homme puissant dans la Martinique des années 30. A l’origine, une affaire de fraude fiscale que l’animateur de « Justice » révèle après enquête dans une édition spéciale du 11 juillet 1933 mettant en cause le Béké grand propriétaire planteur de l’usine Lareinty. S’ensuivront de menaces de mort et de tentatives de meurtres avant sa liquidation.
mardi, février 24, 2009
Les médias hexagonaux face à la crise en Guadeloupe

Si les médias hexagonaux semblent au départ peu s’intéresser au sort des milliers de guadeloupéens dont 20 % vivant en dessous du seuil de pauvreté avec un taux de chômage quatre fois supérieur à celui de la Métropole, ils choisissent en revanche de se concentrer sur le cas Domota. A l'instar du quotidien du boulevard Haussmann qui le considère comme « L’homme qui veut mettre le feu à la Guadeloupe ». Ce titre choisi par le Figaro, dans son édition du 19 février, pour évoquer le combat de celui qu’on surnomme déjà là bas « le messie », ne souffre d’aucune nuance quant au traitement qui est fait par le journal de la crise qui embrase l’île depuis quatre semaines. Le combat du leader du LKP (Liyannaj Kont Pwofitasyon) tout comme son charisme ne sont pas du goût de la feuille de chou. En témoigne cette description pour le moins troublante. « (Elie Domota) est un « Syndicaliste habile ».(…). Un homme qui se proclame pacifiste, mais sa rhétorique est bien celle d'un combattant d'une cause indépendantiste qui ne veut pas dire son nom ». Etrange analyse qui évacue d’un revers de la main la véritable toile de fond du mouvement qu’incarne celui qui représente aujourd’hui l’espoir de toute une île.
Mais, le quotidien conservateur n’est pas à son premier coup d’essai dans ses insinuations qui visent à stigmatiser le syndicaliste en un vulgaire indépendantiste. Déjà dans son édition du 16 janvier, le quotidien de droite avait tenté en vain de piéger le digne héritier des « Neg marrons ». Malgré un usage éhonté des questions insidieuses des journalistes « Vous dîtes toujours « la France » comme si vous n'en faisiez pas partie. C'est votre but, de ne plus en faire partie ? , Elie Domota ne s’est pas pour autant démonté. Bien au contraire, sa maîtrise du sujet et sa fidélité aux objectifs de la lutte du collectif qu’il dirige y sont pour quelque chose. Ces insinuations du quotidien du boulevard Haussmann dissimulent mal une volonté de décrédibiliser, voire délégitimer une lutte qui jette une lumière crue sur 400 ans d’ « exploitation outrancière » d’un peuple par une minorité (les Békés) qui contrôle toute l’économie de l’île.
Si aux premières heures de la révolte, les médias hexagonaux ont préféré jouer au chat et à la souris, les jours qui ont suivi, avec le durcissement du mouvement, ont montré une volonté de couverture partagée entre mépris, déni et disqualification. A l’image de l’hebdomadaire l’Express qui parle du syndicaliste comme un « expert dans l’art de souffler le chaud et le froid ». Le black out des médias généralistes sur le mouvement social amène même le Nouvel observateur à ouvrir un débat sur ses pages : Le black-out scandaleux de la longue grève à la Guadeloupe. « L'attitude des médias dominants, vis-à-vis de l'énorme mouvement social à la Guadeloupe, n'est-elle pas un signe de discrimination coloniale ? » s’interroge l’hebdomadaire.
Si la majorité des journaux font l’impasse sur les causes du mouvement, on se contentera de quelques tentatives d’explication comme celle du journal Le Monde avec cet article de Jérôme Gautheret et Thomas Wieder intitulé « Quatre siècles d’incompréhension (19/02)». La feuille de chou multiplie aussi des articles avec une tonalité plutôt factuelle et descriptive de ce qui se passe sur l’île ( Acteurs syndicaux et associatifs sont partagés entre solidarité et inquiétude (18/02), "Depuis cette semaine, la Guadeloupe intéresse de nouveau la métropole (12 /02). Fidèle à sa tradition institutionnelle, le Journal ouvre ses pages à des spécialistes qui analysent ce soulèvement populaire inattendu à l’instar de l’analyse de Tiennot GrumbachSavine, « c’est tout un peuple qui se soulève (12 /02)». Dans le même sillage, c’est à un spécialiste que l’on doit cette analyse sur les causes profondes dans le quotidien Libération : « L’esclavage a été aboli, les départements ont été mis en place, mais personne n’a jamais touché aux règles de propriété en vigueur dans l’île. La Guadeloupe reste dans un système économique colonial et de monopole. Les plantations ont certes disparu mais les descendants des grands planteurs sont aujourd’hui à la tête des enseignes de la grande distribution ou des entreprises d’import-export. Ce qui n’est pas rien dans une île qui importe 90 % de ce qu’elle consomme. L’absence de concurrence se fait encore plus radicale aux Antilles ». En gros, précise le quotidien bobo franchouillard « la crise qui secoue la Guadeloupe tient à une économie locale bâtie sur de grands monopoles guère éloignée du vieux modèle colonial ».
Toutefois, le son de cloche de certains journaux est carrément injonctif. Guadeloupe: "Nous ferons respecter l'Etat de droit si besoin est", prévient Yves Jégo, peut-on lire sur le site du journal L’Express (15/02). Dans ce refrain médiatique hexagonal sur le coût de la grève et le désarroi des touristes, les revendications des grévistes sont reléguées au second plan : la baisse des prix de tous les produits de première nécessité et des impôts et taxes, la baisse "immédiate" de 50 centimes du prix des carburants, une augmentation salariale de 200 euros et le gel des loyers notamment ». En attendant un improbable dénouement…