lundi, mars 31, 2008

Africain, Noir, Black, Kamite… : quels enjeux autour de l’auto-désignation ?


Une importante littérature scientifique eurocentriste tend à imposer l’idée selon laquelle les Noirs des temps anciens n’avaient aucune représentation d’eux-mêmes ni d’autres groupes humains. Cette littérature donne l’impression que le Noir n’a ni réfléchi sur lui-même ni sur les autres, et est réduit éternellement au statut d’objet de l’Histoire de l’humanité. « Plongé dans la couleur noire de la nuit » d’après le philosophe allemand Hegel, « l’homme noir » aurait été défini et pensé essentiellement par l’Autre. Et cet « Autre » aurait définitivement figé d’avance dans le marbre de l’histoire la nature de son être et de son statut. Mais bien avant la littérature scientifique européano-centriste, les écrits arabes ont aussi versé dans le dénigrement de l’homme de couleur. Al Kindi, un auteur arabe du XI siècle parle des Zendjs (noir en arabe) des peuples aux lèvres pendantes, au nez aplati et gros et au cerveau réduit.

Depuis « Nations nègres et culture » (1954) du savant sénégalais Cheikh Anta Diop, l’histoire des peuples noires semble s’être remise en mouvement. La vulgarisation des travaux du scientifique sénégalais a sonné le glas à plusieurs siècles d’ignorance et de fraudes scientifiques. C’est à partir de ces travaux que semble se mettre en place un processus salutaire de labellisation identitaire se traduisant par l’abandon des dénominations classiques, lourdement chargées, Noir, Africain, Black, Homme de couleur au profit de l’ethnonyme très underground « kamit » issu du négro-égyptien (Km-(niw)t). L’usage substitutif de cet « ethnonyme » authentique illustre un mouvement profond de remise en cause des assignations identitaires subies par « l’homme noir » dans le passé, mais surtout frappe de caducité une certaine écriture de l’histoire qui a souvent réduit celui-ci à un statut d’homme sauvage, maudit, esclave, simplet, arriéré, a-historique.

Pendant la période antique, plusieurs vocables ont servi à désigner l’humanité noir : Maure, Maurus, Sudan, Africanus, Aethiopios, ces dénominations ont tantôt désigné le lieu géographique, tantôt décrit l’anatomie de l’homme noir.

Maure, habitant de l’ancien Mauretania, région du nord de l’Afrique, qui désigne aussi le conquérant musulman de l’Espagne (D’après le dictionnaire Robert) ;

Africanus renvoie à (Afrique), de Ifriqya, nom d’origine latine désignant une tribu berbère ayant colonisé la Turquie ;

Aethiopia correspondrait au pays des Couschites, déscendants de Cousch fils de Cham d’après la littérature théocratique.

Les termes Noir, Black sont d’usage plutôt récent et contemporains de la période esclavagiste, contrairement au terme plutôt neutre de Nègre qui est antérieur « à l’émergence historique des primitifs francais, anglais, portugais, espagnols, belges, hollandais, polonais, allemands, etc., c’est-à-dire avant les indigènes de l’Europe actuelle » (Cf : Bilolo Mubabingé, africamaat). Contrairement aux anciennes dénominations génériques de l’homme noir ( maure, aethiopios, coushites…), les termes black et Noir sont racialement connotés et chargés négativement et font référence à la saleté, à la souillure, à la clandestinité, à l’illégalité (marché noir, travail au black etc). Il est surprenant de voir d’ailleurs que le peuple noir est le seul à être identifié, fixé, rattaché à sa couleur de peau de façon presque quasi systématique et exclusive. Il y a donc un usage idéologique des ethnonymes précédemment cités. De la même manière qu’elles signent l’instauration d’un type de relations intergroupes, ces désignations du « Kamit », devrait-on dire désormais, sont des indicateurs symboliques des contenus représentationnels associés à l’humanité nègre.

S’il y a un lien étroit entre le nom d’un groupe et son « identification », il apparaît donc nécessaire que les peuples de Kemet aspirent à une redéfinition des désignations formulées par d’autres et qui collent à leur peau. L’acte de s’autonommer va de pair avec l’autonomie, il fixe les limites aux autres et permet de se mettre au centre de sa propre histoire.

Dans le cas précis du CRAN (Conseil représentatif des Associations noires de France) par exemple, bien qu'il s'agisse de réappropriation du "stigmate" dans une dynamique politique, il faut craindre un enfermement, une clôture des peuples noires dans une identité racialisée, uniquement mélanodermique. Certes la société d'accueil renvoie aux déscendants de Kemet, leur noiritude, mais c'est aux déscendants de kemet de répondre par l'histoire et la culture. Une conscience identitaire fondée sur la matrice de l'histoire et de la culture s'inscrit d'avance dans le temps.

dimanche, mars 23, 2008

Les Egyptologues africains ne sont pas admis au Congrès international des Egyptologues




34 ans après le colloque du Caire, les egyptologues africains continuent d'être ignorés par leurs homologues occidentaux. Racisme, discrimination, xénophobie ou ignorance des travaux de l'égyptologie africaine ? On penche pour la première explication tant les arguments avancés, scientifiquement infondés, par ces derniers, transpirent la mauvaise foi, voire un certain racisme (ci-dessous le refus signifié à M. Bilolo). Voici la protestation que l'egyptologue, Mubabingué BILOLO, d'origine congolaise a fait part aux organisateurs du X ème Congrès international des Egyptologues (Grèce Mai 2008).

Congrès International des Égyptologues Mai 2008 : refus de participation au Professeur Biloloiel de refus envoyé à BILOLO :
"Dear Prof. Bilolo, For this congress we have had a high volume of abstract submissions. Of course there is always a limit to the number of submissions we are able to accept due to the constraint of physical facilities and the demand for original and scholarly research that advance our Egyptological knowledge. After the completion of the peer-review process we have had to turn away a number of submissions. We regret to inform you that your abstract entitled “Ancien Égyptien - Langue Bantu ? Résultats provisoires du Projet de Traduction en ciLuba de "Ägyptisches Handwörterbuch" (Berlin 1921) de A. Erman et H. Grapow” has not been accepted for presentation at the Tenth International Congress of Egyptologists. Once again we would like to thank you for your interest and submission. The X International Congress of Egyptologists Committee"


Protestation contre la Discrimination de l’Afrique Noire par le Comité d’organisation du Xème Congrès International des Égyptologues (Grèce, Mai 2008)

§ 1. Que signifie Congrès de l’Association Internationale des Égyptologues ?

Si le Xème Congrès IE était un Congrès de l’Association des Égyptologues Européens, je n’aurais pas protesté.
Si le Xème Congrès IE était un Congrès de l’Association des Égyptologues Occidentaux, je n’aurais pas protesté.
Si le Xème Congrès IE était un Congrès de l’Association des Égyptologues Leucodermes, Rouges ou Blancs, je n’aurais pas non plus protesté.
Je n’ai aucun droit de déranger les Européens, les Occidentaux ou les Leucodermes, lorsqu’ils veulent se rencontrer entre-eux pour imaginer et conjecturer leur histoire.
Le Congrès AIE est un Congrès International, Interculturel, Intercontinental et Interracial.

§ 2. Discrimination raciale des Noirs au niveau du Comité Scientifique

Comme il s’agit d’un Congrès Mondial, d’une Association regroupant les scientifiques Asiatiques, Américains, Australiens, Européens et Africains, l’Afrique ne devrait pas manquer au sein du Comité qui retient des thèmes.
Étant donné la mondialité de ce Congrès, regroupant les scientifiques Leucodermes ou Blancs, Xanthodermes ou « Jaunes / Basanés » et Mélanodermes ou Nègres (au sens aristotélicien de Nations Nègres), les scientifiques mélanodermes ou noirs ne peuvent manquer au sein du Comité Scientifique et au sein des autres comités.
Est-il nécessaire, Cher(e)s Collègues, que Théophile Obenga, Mubabinge Bilolo, Oum Ndigi, Karenga, Gilbert Ngom, Molefi Asante, Alain Anselin, puissent venir s’agenouiller devant leurs Collègues Blancs, afin d’être acceptés dans ces commissions ou invités à donner une Conférence d’ouverture ou pendant les séances plénières?
Le Monde Nègre en général et l’Afrique Noire en particulier sont scandalisés par la monopolisation du Xème Congrès IE par les Égyptologues Européens et surtout par la tentative de discriminer l’Afrique Noire en refusant tout simplement des thèmes qui s’annoncent absolument révolutionnaires. C’est pourquoi, je viens au nom de la Communauté Scientifique Africaine ou Kame exiger que justice soit faite.

§ 3. Statistiques du Comité Scientifique

Représentation par pays :
UK :
3
France :
3
Allemagne:
2
Italie :
1
USA :
1
Égypte:
1
Représentation continentale :
Europe :
10 + les organisateurs Grecs
Amérique du Nord :
1
Amérique du Sud :
0
Asie :
0
Afrique du Nord :
1 (Égypte)
Afrique au Sud d’Assouan :
0
Représentation par sexe :
Hommes :
100 %
Femmes :
0 %
Représentation par couleur :
Leucodermes ou Blancs :
100 %
Xanthodermes ou Jaunes :
0 %
Mélanodermes ou Nègres /Noirs :
0 %

Tout en constatant la sur-représentation de certains pays comme la France, l’Angleterre et l’Allemagne dans ces comités, je constate également la sous-représentation, voire l’absence de nos collègues-femmes dans ce Comité stratégique.
A quoi sert-il de spéculer sur la Maât lorsqu’on discrimine si ouvertement la Race Noire ? Je vous rappelle que le Pape de la Philosophie et de la Science Occidentales, le grand philosophe ARISTOTE, place les anciens Égyptiens à la tête des Nations Nègres ou pour utiliser son expression à la tête des Nations trop noires.

§ 4. Compétences scientifiques

Combien des Collègues avons-nous dans tous ces Comités qui ont des compétences scientifiques sur la Vallée du Nil et la Grèce égales ou supérieures aux compétences de Théophile Obenga ou de Bilolo ? Nous sommes le produit de meilleures Écoles de l’Afrique et de meilleures Écoles de l’Europe. Les Africain(e)s ont une double-formation : africaine et occidentale. Les Occidentaux ont une seule formation. Ils sont très faibles par rapport aux Africain(e)s. Ne confondez pas la crise économico-politique, entretenue par les armes de l’Occident, avec les compétences scientifiques négro-africaines. Relisez la biographie de Cheikh Anta Diop, il était très bien formé. Relisez la biographie de Théophile Obenga, vous remarquerez que c’est un scientifique d’une rare formation et d’une rare capacité de recherche et de production.
Permettez de vous rappeler ou de vous informer qu’en ce qui concerne les compétences scientifiques nécessaires à une approche scientifique de l’Égypte Pharaonique, je fais partie de la crème scientifique de notre époque.
Après plus de 25 ans de formation universitaire au cours de laquelle j’ai dû étudier dans quatre phases plusieurs disciplines : I. Philosophie, Anthropologie-Sociologie et Religions Africaines ; Théologie et Sciences Humaines ; II. Philosophie, Sciences Sociales et Théologie Fondamentale; III. Égyptologie, Ethnologie-Africanistique et Sciences de Religion ; IV. Sciences Politiques, Sociologie, Economie des infrastructures et Gestion environnementale. Je suis formé par le meilleur spécialiste de la Linguistique Africaine et Bantu, le feu Prof. Dr. Kadima Kamuleta ; par le meilleur spécialiste de la Littérature Orale Africaine, le Prof. Mufuta Kabemba et par les meilleurs spécialistes de Religions Africaines.
J’ai enseigné la Religion Pharaonique et les autres Religions Africaines en 1978-1979 ainsi que les Religions Orientales, Philosophie Africaine, l’Herméneutique Philosophique et la Philosophie du Langage (Ptah-Hotep, Kagemni, Wittgenstein, Austin, Searle, Ricoeur, Heidegger, Gadamer). J’ai enseigné le concept de la Nature chez Echnaton, Platon, Aristote, Augustinus, Descartes, Kant, Hegel, Edgar Morin, etc. avant de venir en Europe et je répète déjà au cours de l’année académique 1978-1979. Nous sommes aujourd’hui en 2008, donc 30 ans plus tard. Je ne crois pas qu’il existe plus de cinq égyptologues en vie ayant une formation semblable.
Ajoutez à celle-ci la compétence et l’expérience inter-culturelles, inter-continentales et inter-raciales.
Maîtrisant plus de trois langues africaines Bantu –en adoptant la classification occidentale, plus de 10 langues Bantu-, à côté de l’allemand, du français et de l’anglais, langues auxquelles il faut ajouter l’ancien égyptien, le copte, l’ancien grec et les notions de l’hébreux biblique, italien élémentaire, je suis surpris de constater que les Collègues européens savent d’avance l’impact de ces connaissances, dans la tête d’un individu, sur l’étude de ciKam ou de l’Ancien Égyptien.
Sur le plan purement formel, ce parcours, ce degré d’interdisciplinarité et de connaissances de langues anciennes et modernes, est une rareté au sein de la Communauté Mondiale des Égyptologues. Est-ce que je me trompe ? Pour parler égyptien : « Mon semblable n’existe pas encore» au sein de l’Association Internationale des Égyptologues.
Bref, il n’y a personne parmi tous mes collègues occidentaux qui a des compétences linguistiques qui peuvent lui permettre de savoir si le thème de CiKam et de Cyena-Ntu peut faire avancer les recherches linguistiques ou pas.

§ 5. Critère du thème original

Vous dites que le thème “Ancien Égyptien - Langue Bantu? Résultats provisoires du Projet de Traduction en ciLuba de "Ägyptisches Handwörterbuch" (Berlin 1921) de A. Erman et H. Grapow” ne serait pas assez original. Existe-t-il un travail ou un projet semblable en égyptologie aujourd’hui ? Il est possible que je sois sous-informé sur l’existence de Dictionnaires Ancien Égyptien et Zulu, Ancien Égyptien et Luba, Ancien Égyptien et Kongo.
Existe-t-il un thème plus original en égyptologie que la Traduction de « Ägyptisches Handwörterbuch » de Erman et Grapow comme préparation à la traduction complète de WB dans une Langue de la Famille Linguistique Bantu? Y-a-t-il un thème plus original que la présentation de résultats provisoires d’un Projet de Traduction de l’Instrument par excellence du travail de tout égyptologue, à savoir le WB ?
Quel est cet autre collègue Leucoderme qui connaît les langues bantu, qui les parle, qui a déjà traduit Erman et Grapow en Kikongo, en Basa, en Zulu ou en Luba, et qui peut présenter à la Communauté Scientifique Internationale les conclusions de sa traduction de WB au niveau de la grammaire, de la transcription et de la traduction ? Qui peut me remplacer à Congrès ? Ce travail n’a jamais été fait et aucun(e) de collègues occidentaux actuellement en vie ne peut le faire. Le thème proposé opère une rupture épistémologique en égyptologie et en linguistique.
Étant donné la rareté des égyptologues qui maîtrisent deux ou trois autres langues africaines de la Vallée du Nil ou aux Sources du Nil, pourquoi le Xème Congrès International refuse-t-il de retenir, dans la section Philologie, le Projet proposé ? Il ne s’agit pas d’un pur projet. Il est question de présenter les résultats d’une partie du travail accompli aux Collègues de tous les Continents.
Et c’est justement cette révolution épistémologique, ce surgissement du Champollion Noir , que vous voulez étouffer avec une indicible platitude au niveau de l’argumentation.
Pensez-vous que le thème de la Grèce et de l’Égypte dans l’Antiquité, sur lequel il existe déjà plus de 3000 publications, est plus original et répond mieux à la « demand for original and scholarly research that advance our Egyptological knowledge » que le thème de l’Ancien Égyptien et la Famille Linguistique Bantu sur lequel, exception faite de travaux de T. Obenga, A. Anselin, Ngom et de Oum Ndigi, il n’y a encore rien? Avez-vous déjà vu, dans une bibliothèque un Dictionnaire « Ancien Égyptien – Langue Bantu » ?

§ 6. Critère du thème pouvant faire avancer les connaissances sur l’Égypte

Sur base de quelle science, de quelle révélation, pouvez-vous prévoir ou déduire que les résultats de recherche sur l’Ancien Égyptien et les Langues de l’Afrique Centrale ne feront pas avancer « our Egyptological knowledge »? Quelles sont les races qui sont contenues dans ce « Our », dans ce « notre »? Les recherches sur CiKame ou DiKema et les autres langues de la Vallée du Nil ne font pas seulement avancer nos connaissances égyptologiques, mais elles révolutionnent l’égyptologie, la linguistique africaine, la grécologie et l’orientologie. Elles révolutionnent la Grammaire, la Transcription, la Traduction, l’Interprétation et la Vocalisation.
Quel manque de curiosité lorsqu’un collègue vous dit que « J’ai l’impression que l’Ancien Égyptien n’est pas une langue morte et qu’il se parle encore jusqu’à nos jours. Je constate que le vocabulaire de base est d’une vitalité déroutante dans la Famille Linguistique Bantu » ? Vous lui répondez que vous avez des thèmes plus originaux sur l’Égypte et la Grèce. De qui se moque-t-on.
Un Comité de sélection véritablement scientifique aurait répondu : « C’est incroyable cher Collègue, apportez-nous des preuves. Nous sommes très curieux ». Mais lorsqu’on a peur des preuves devant une telle affirmation, il y a de quoi s’interroger sur les causes de cette épistémophobie ? Toute personne qui n’exige pas de preuves est hostile à la science et à la vérité.
En toute sincérité, certains de nos collègues n’aiment pas l’Afrique. Ils n’aiment pas l’Égypte Antique. Ils sont là pour fausser les sources et voire, pour faire disparaître les preuves. Ils haïssent les Nègres, les Arabes et les Sémites. Lorsque je parle de la Philosophie Pharaonique, les Occidentaux se fâchent. Lorsque je rappelle que Plotin est un Égyptien, les philosophes occidentaux crient : « Aux armes contre Bilolo »; « Ils ne partagent pas les prémisses de notre Pensée Occidentale » ; « Il est profondément Africain – ‘Er ist durch und durch Afrikaner’ ». Quand Assmann rappelle l’impact de la Pensée égyptienne sur la Pensée Occidentale ou parle de « Moïse l’Égyptien », on se met à l’injurier. N’oublions pas les réactions et les coalitions contre le collègue Bernal, après la publication de Black Athena.
Si quelqu’un n’aime pas les Nègres, qu’il aille étudier la Grécologie, la Francologie, la Germanologie, la Britanologie ou l’Occidentologie, mais il ne peut
Le drame est que la majorité que je connais, que je fréquente, ne parvient pas à se mobiliser pour contrecarrer cette négrophobie ou afrophobie de leurs collègues.

§ 7. Le ciKam ne s’est pas volatilisé

La plupart des collègues formés par les « érudits en mensonge » croient que l’Ancien Égyptien s’est volatilisé vers + Vème siècle. Ils confondent la fin d’une écriture ou la mort de personnes capables de lire une écriture avec la mort de la langue parlée et de la tradition orale.
Au moment où l’on parlait l’ancien égyptien, on parlait le grec, le berbère, le perse, l’arabe, le latin, etc. Toutes ces langues se parlent encore, avec de transformations certes, mais elles se parlent.
La preuve est que les organisateurs Grecs parlent le Grec. C’est le nouveau grec. Il est différent, mais toujours identifiable comme grec. Il n’est pas possible qu’une langue qui était parlée au début de l’époque romaine par plus de 7.000.000 de personnes et comprises jusqu’à Méroé, donc jusqu’en Ouganda et au Sud du Tchad, puisse disparaître, se volatiliser sans laisser des traces –à l’exception du copte- sur l’ensemble du Continent. Le CiKam moderne existe au même titre que le Grec, l’Arabe, le Perse ou le Berbère moderne. L’égyptologie doit se tourner vers les sources du Nil. Une démarche contraire relève du registre de la mystification scientifique.
L’anti-nigrisme est ridicule et ne mène nulle part. Les résultats provisoires de la traduction du Dictionnaire de Erman et Grapow m’ont amené à ce constat :
1. Une Langue Bantu, du sous-groupe Afrique Centrale et Afrique du Sud.
2. Le Négro-Africain est antérieur au Proto-bantu.
3. Le Proto-Bantu est antérieur au ciKam (ancien égyptien)
4. Le ciKam fait partie de la Famille Linguistique Bantu
5. Le ciKam est une sous-famille au sein de la Famille Bantu.
6. Le ciKam est une langue à ton.
7. Le T de suffixe dans la transcription actuelle est en réalité un préfixe : non pas Km.t, mais t.Km (Ti-Kam, Di-Kam, Ci-Kam), mais il y a des contextes où T peut être un suffixe : KamaT).
8. Son vocabulaire est en usage jusqu’à nos jours.
9. La transcription actuelle cache la vie actuelle de ciKam
Il n’y a personne qui a fait les constats et formulé, avec cette clarté, les hypothèses de travail semblables.
Je vous informe que je maîtrise très bien le ciLuba, ma langue maternelle. J’ai découvert, après plus de 25 ans de contacts permanents avec le ciKam, que la langue que j’avais apprise à Munich, était l’ancêtre de la langue que je parle. La langue que je parle est comprise en Ouganda, au Rwanda, Burundi, Tanzanie, Zimbabwe, Malawi, Zambie, Angola, une grande partie du Gabon, du Cameroun, de la Namibie et de l’Afrique du Sud. Donc, je prends plus 300 millions d’Africains à témoin et plus de 500 millions à propos du Substrat Négro-Africain ou du Proto-bantu.
L’univers de contrôle et de correction est sociologiquement représentatif.
Quel est l’égyptologue moderne qui a déjà formulé l’hypothèse de la vitalité de l’ancien égyptien ? Qui a proclamé publiquement : « Le ciKam se parle encore de nos jours. Le problème est de trouver une sous-famille dans la Grande Famille Linguistique Bantu qui se rapproche le plus du vocabulaire et du parler attestés par les textes pharaoniques » ?

§ 8. Racisme et Apartheid : 150 ans de l’égyptologie anti-nubienne et anti-nègre

Il existe une sorte d’Apartheid en égyptologie. Les études nubiennes sont victimes d’un racisme indescriptible. Certains égyptologues se permettent, à propos des Nègres, des injures de toute sorte. Ayant travaillé sur « La discrimination de la Nubie en Égyptologie » je sais de quoi je parle.
La conséquence est qu’au nom de ce racisme anti-nubien et anti-nègre, d’aucuns tentent d’étouffer les recherches sur l’Égypte Antique et l’Afrique Centrale. Ils encouragent les recherches sur l’Égypte Antique et la Chine, mais étouffent les recherches sur les autres cultures de la Vallée du Nil et du Congo. J’ai eu moi-même à présenter en ethnologie et africanistique un séminaire sur le « Chemin suivi par les anciens Égyptiens pour aller en Amérique latine ». Il s’agissait d’une synthèse des recherches de l’Académie des Sciences de Vienne. L’auteur avait bien documenté les traces égyptiennes en Chine et en Amérique Latine. Tout en encourageant les recherches sur la Chine et l’Égypte, on s’oppose à l’étude de la Vallée du Nil ou du Bassin du Nil dans sa totalité. N’est-ce pas curieux ?
Quand Ebers exposait son anti-nigrisme en égyptologie, représentait ses pseudo-arguments contre les Nègres, C. A. Diop n’était pas né. La guerre des races et des cultures en égyptologie datent du 19ème siècle. Quand Westermann injuriaient les scientifiques Noirs à propos de l’Égypte, Diop et Obenga étaient encore jeunes. Faute des cours sur l’égyptologie et le racisme, cette guerre se poursuit jusqu’à ce jour.
Lorsque David Livingstone qui venait visiter le Musée Egyptologique à Londres (BM) est arrivé en Angola et au Congo, il n’a pas manqué de signaler l’actualité et la vitalité de la culture pharaonique dans cette région. Les témoignages de ce genre sont légion, mais on veut les ignorer.

§ 9. Représentation de l’Afrique parmi les « Key-Note Speakers » : 0

Observez la liste des « Key-Note Speakers » :
« Prof. Emer. Jan Assmann (Heidelberg);
Prof. Manfred Bietak (Vienna) - Title: The nature of the relationship between Egypt and the Minoan World in the Tuthmoside Period;
Prof. Christopher J. Eyre (Liverpool);
Prof. Richard Jasnow (Johns Hopkins) -Title: From Alexandria to Rakotis: progress, prospects, and problems in the study of Greco-Egyptian literary interaction;
Prof. Emer. Geoffrey T. Martin (Cambridge) - Title: Re-excavating KV 57 (Horemheb) in the Valley of the Kings”.
Il ressort de cette liste que tous les conférenciers principaux sont des Occidentaux, à majorité européenne et blanche. L’internationalité, l’inter-continentalité et l’inter-racialité de l’Association Internationale et du Congrès International des Égyptologues sont foulées aux pieds sans que personne ne proteste.
Pourquoi ne pas réduire le nombre des Conférenciers occidentaux et blancs afin de donner la parole aux Conférenciers de l’Afrique Noire, de l’Asie, de l’Amérique Latine, etc. En quoi réside l’originalité de thèmes ici retenus ?

§ 10. Liste des Membres du Comité Scientifique

La constitution du Comité Scientifique demeure aussi largement européen et largement occidental. L’Afrique Noire n’est représentée et cela n’est pas normal. Voici la Constitution du Comité :
« Prof. John Baines (Oxford University) ;
Prof. Christopher J. Eyre (University of Liverpool);
Prof. Nicholas Grimal (Collège de France & Institut de France, Académie des Inscriptions et Belles Lettres) ;
Prof. Zahi Hawass (Supreme Council of Antiquities, Egypt) ;
Prof. Yvan Koenig (Institut Catholique de Paris & Centre National de la Recherche Scientifique) ;
Prof. Alan B. Lloyd (University of Wales, Swansea) ;
Dr. Ludwig Morenz (Universität Leipzig) ;
Prof. Joachim Friedrich Quack (Ruprecht-Karls-Universität Heidelberg) ;
Prof. Robert K. Ritner (University of Chicago) ;
Prof. Alessandro Roccati (University of Turin) ;
Prof. Pascal Vernus (Université de Paris Sorbonne, Paris IV) ».
Comment ne pas remarquer l’absence de l’Afrique Noire, de l’Asie et de l’Amérique Latine dans ce comité ? Ce n’est même pas le racisme, c’est du clanisme primitif. L’Europe n’est représentée que par ses super-puissances économiques.
C’est anormal. C’est pathologique. C’est un crime culturel, indigne de tout homme qui a eu la chance de connaître les exigences de la Maât.

§ 11. Mépris de l’appel de Jean Leclant

Les maîtres comme Leclant, Vercoutter, Thausing ont réitéré des années durant la nécessité d’insérer les recherches sur l’Égypte dans leur contexte africain et de promouvoir les contacts entre les chercheurs africains et leurs collègues européens. Il n’est ni nécessaire ni souhaitable d’avoir les mêmes thèses. Car du choc des idées, du choc des positions jaillit la lumière. Le vœux semblable était dans les années 80, au cours du Congrès de Munich, par le maître Erik Hornung et par le feu Prof. Quagebeur de Leuven.
Le Prof. Grimal de Paris reprochait, au cours d’un entretien que j’avais eu avec lui en 2007, aux égyptologues africains de refuser de participer aux rencontres égyptologiques internationales. A Cambridge, en 1995, beaucoup d’autres collègues avaient aussi regretté la sous-représentation de l’Afrique Noire.
Mais je constate qu’ils méconnaissaient tous par-là le degré de l’anti-nigrisme, l’anti-mélanisme dans la Communauté Égyptologique Occidentale. On écarte l’Afrique, car elle dérange les préjugés et les prémisses non-critiques. La preuve est là. Les Africains sont victimes du racisme primitif, de « l’Apartheid », de l’exclusion, voire de tentatives d’anéantissement existentiel de la part de certain(e)s de leurs collègues occidentaux.
Certains égyptologues, minoritaires certes, mais occupant des positions stratégiques ; sont tellement aveuglés par l’anti-nigrisme égyptologique qu’ils ne voient plus la vitalité de l’Égypte et de la Nubie en Afrique contemporaine.

§ 12. Tout scientifique engage sa propre réputation

Tout scientifique porte la responsabilité de ses résultats. Il met en jeu sa réputation lorsqu’il expose ses résultats devant la Communauté Internationale. Il n’y a aucun, absolument aucun égyptologue européen ou occidental en vie, qui peut soutenir que la présentation de résultats provisoires du Projet de Traduction de WB dans une langue Bantu serait sans originalité ou ne contribuerait pas aux études égyptologiques.
Je vous avais demandé de placer ma conférence à la plénière, voire à l’ouverture, de telle sorte que la plupart de nos collègues puissent prendre part au débat. Je voulais prendre la communauté internationale des philologues à témoin afin d’éviter le débat sans-cesse entretenu dans des coulisses. C’est un défi.

§ 13. L’Occident n’a pas le monopole du savoir

L’Afrique n’est pas une colonie scientifique de l’Occident. Ce dernier n’a pas le monopole du savoir et encore moins ne peut avoir le monopole de la Connaissance d’un Pays de la Vallée du Nil. La médiocrité des connaissances égyptologiques sur l’environnement de la Région des Grands-Lacs, aux sources du Nil, jette l’ombre et le doute sur la scientificité et la sériosité de recherches tant vantées. Le dialogue est absolument nécessaire.
§ 14. Approche occidentale de l’Afrique : Acmé du dillettantisme et de l’arrogance
Comme la plupart des Occidentaux rient lorsque je leur dis que je suis Occidentologue, Européanologue, spécialité : Grécologie, Germanologie et Francologie, les Africain(e)s s’amusent aussi devant le dillettantisme égyptologique de l’Occident. Ils se moquent de ces gens qui se croient être « Spécialistes de la Religion Égyptienne, de l’Art Africain», après 15 heures de cours sur la Religion Égyptienne ou sur l’Art Pharaonique. Après quelques séances de Grammaire de Gardiner, on se croit être « Spécialiste de la Linguistique Africaine », capable de corriger Obenga, Ndigi ou Bilolo sur les fondements Bantu de la Langue Pharaonique.
Les gens qui n’ont jamais participé à la cérémonie de l’intronisation d’un roi ou d’un chef africain, qui n’ont jamais participé à l’enterrement d’un chef, qui n’ont jamais pris par aux cérémonies de préparation de la chasse ou de la guerre en Afrique, se croient, après 30 heures de cours sur l’Histoire Égyptienne, être des « Spécialistes de la Culture Pharaonique », capables de la positionner par rapport aux autres cultures africaines qu’ils ignorent complètement.
Nous n’avons pas la même attitude devant la peau d’un léopard, d’un lion ou d’un crocodile. Le léopard « c’est moi, c’est mon double ». Il est la manifestation de mon pouvoir. C’est un symbole de notre royauté, de la divinité. Et lorsqu’un chercheur africain, de la lignée du pouvoir, voit le prêtre égyptien ou le roi nubien portant la peau du léopard, «il sait et il comprends le pourquoi sans passer par l’égyptologie occidentale ». Les égyptologues africains pensent leur culture. Ils ne dissertent pas sur une culture étrangère. Les femmes africaines exposent chaque jours dans les villages, depuis le Nord jusqu’au Sud une série de types de tresse alors qu’elles n’ont jamais été dans un Musée Egyptologique.
Le dillettantisme se manifeste aussi dans l’ignorance coupable des conditions climatiques aux Sources du Nil qui poussent certains à écrire encore de nos jours qu’il ferait plus chaud aux sources du Nil, dans la Région de Grands-Lacs qu’en Égypte. Je vous rappelle que c’est avec cet argument enfantin que d’aucuns ont tenté de justifier la prétendue différence de pigmentation entre les Nubiens et les Égyptiens.

§ 15. Exigences africaines au Xème Congrès International

Comme je l’ai déjà signalé au départ, je n’aurais pas protesté contre votre décision s’il s’agissait d’un Congrès Européen d’Égyptologie ou d’un Congrès des Égyptologues Occidentaux. Mais il s’agit d’un Congrès Mondial avec la participation de tous les Continents et des égyptologues de toutes les Races et de toutes les couleurs. Le racisme ou l’anti-nigrisme n’a pas de place dans une telle Institution. L’Afrique Noire ne peut être écartée sans que cette Institution ne se discrédite.

a) Retenez un(e) Noir(e) Africain(e) parmi les « Key-Note-Speakers »
Au nom de l’internationalité, l’inter-continentalité et l’inter-racialité de l’Association Internationale et du Congrès International des Égyptologues, je vous demande, chers Collègues, de réduire le nombre de « Key-Note Speakers » occidentaux et de garder une place pour une Conférence d’un Noir Africain sur Les résultats provisoires de la traduction du Dictionnaire de Erman et Grapow dans une langue Bantu. Les égyptologues de l’extrême-droite, protagonistes de l’anti-mélanisme, peuvent rester dans leurs chambres s’ils ne veulent pas écouter les enfants d’Osiris, le sang des pharaons. Ne participez pas à la tentative de cambriolage culturel de la Vallée du Nil. Il n’y a qu’un étranger à l’Afrique qui peut penser que la Culture Pharaonique est morte. L’Exode vers Méroé, nom répandu dans toute la région de Grands-Lacs (Congo, Marawi, Tanzanie, etc.), révèle la direction prise par la Noblesse et la Royauté à l’entrée des Légions typhoniennes.

b) Restructuration du Comité de Sélection et du Comité Scientifique
Nous invitons le Comité Scientifique à se réformer et à réserver des sièges aux égyptologues Noirs Africains, Noirs Américains, Amérindiens et Asiatiques. Sa constitution actuelle presqu’exclusivement blanche, européenne ou occidentale est inacceptable. Le Comité des membres situés à moins d’une heure de vol ou de train l’un de l’autre n’est pas international. Le monde est grand, très grand. Il n’y a ni nouveauté ni originalité dans ce Comité. C’est le monologue occidental, l’auto-glorification qui continue. Les mêmes personnes qui se rencontrent trois fois par mois et font la navette entre les différentes villes européennes veulent nous faire croire qu’elles ont des idées plus originales à présenter –entre-eux- en Grèce que leurs collègues Négro-Africains!

d) Luttez contre le Racisme Anti-Nubien ou Anti-Nègre en Égyptologie
Je lance mon appel à toutes et à tous les égyptologues, blessé(e)s par la façon dont certaines personnes injurient, discriminent les Nubiens et les Noirs en égyptologie et dans la vie courante, à se mobiliser pour mettre fin à ce racisme ouvert. Il faut des cours et des conférences sur ou contre le Racisme en égyptologie. N’est-il pas pathologique de passer son temps à chercher à séparer les Nubiens des Égyptiens ? Les gens protesteraient contre moi en Afrique, si je donnais une Conférence pour différencier les Espagnols de Français et les Français de Suédois ou de Norvégiens.

e) Luttez contre la préparation des tensions inter-raciales en Égypte actuelle par certains Égyptologues occidentaux
Les Collègues qui ne cessent de dévaloriser les Nubiens ou les Noirs dans leurs cours ou dans leurs écrits sont-ils conscients qu’ils injurient les Égyptiens actuels ? Ignorent-ils vraiment qu’ils sont entrain de semer par-là la violence dans la Société Égyptienne Actuelle ? Ce sont les étudiants égyptiens en Europe qui protestent le plus contre la façon dont certains égyptologues parlent de leurs concitoyens, parlent de leurs parents ou de leurs ancêtres. Une partie de la population égyptienne actuelle est noire. L’égyptologie doit divorcer d’avec la Guerre des Races et des Cultures.
Les Africain(e)s s’amusent quand un Européen soutient que Teye est blanche. Pourquoi certains collègues se fâchent-ils quand un Africain dit que Teye est noire comme sa propre mère? S’ils considéraient Teye comme leur sœur, pourquoi rougissent-ils quand on leur dit, par exemple, que Plotin était un Égyptien ?

f) Divorcez d’avec la haute-immoralité, mère de la Shoa
Les Africain(e)s ont des arguments pour injurier et ridiculiser les étrangers « spécialistes de l’Égypte ou de l’Afrique ». Mais ils ne le font pas. Les postulats et les prémisses empruntés à l’herméneutique dévalorisante, la haute-immoralité nourrice de l’anti-nigrisme et par conséquent, de l’anti-sémitisme – et tout cela malgré les tragédies historiques- discréditent scientifiquement l’égyptologie occidentale.
L’Égypte est un Pays Africain. Il devient de plus en plus claire qu’elle est une Culture Bantu. En examinant les églises indépendantes, on constate que ces Bantu réclament la paternité du Judaïsme et de l’essence du christianisme. Ne pensez pas qu’en rapprochant l’Égypte du monde sémitique ou même du monde indo-européen, vous avez résolu un problème quelconque. Les Bakuba prétendent que les Irakiens ont volé leur nom et leurs cultures. Les Kadima en disent autant. Il faut être au courant des problématiques linguistiques et théologiques continentales avant de se pencher sur l’Égypte.
Il faut se rappeler que tous les premiers philosophes et théologiens africains, initiés dans les années 40, à la Philosophie Grecque, ont soutenu la parenté entre la Notion Grecque de l’Être et la Philosophie Bantu de l’Être (Kagame, Mulago, Lufulwabu, etc.). Mais ils ne savaient pas que l’égyptologue Mallet avait déjà soutenu une thèse semblable à la fin du 19ème siècle. En parlant de la Grèce et de l’Égypte, vous parlez sans le savoir de la Grèce et du Monde Bantu, comme l’historien de la philosophie occidentale Masson-Oursel l’a souligné dans sa contribution á l’Histoire d’Émille Bréhier.

g) Mobilisation des ami(e)s
Comme je l’ai souligné et rappelé dans mes différentes publications, j’ai rencontré depuis 1980 des égyptologues occidentaux de toutes les générations. Nous vieillissons ensemble – pardon cher Grimal, nous « grandissons » ensemble - avec la plupart d’entre eux. J’ai été soutenu et encouragé par la crème de l’égyptologie : Wildung, Barta, Leclant, Derchain, Hornung, Assmann, Baines, Görg, Quagebbeur, Vergote, Aßfalg, Thausing, Bergmann, Terence Dusquene, Altenmüller, Burkhardt ainsi que par la plupart de leurs successeurs Grimal, Loprieno, Bickel, Junge, Quack, Buchberger, Régine Schulz et autres ami(e)s de l’Université de Munich. La Bibliothèque de l’Université de l’Institut d’Égyptologie de Munich restait longtemps ouverte pour nous. La Fondation d’Égyptologie Reine Elisabeth, la Bibliothèque du Collège de France et la Bibliothèque de l’Université de Heidelberg nous accueillaient avec beaucoup de joie. L’Université de Barcelona est restée ouverte au dialogue et à la coopération avec les égyptologues africains. La réception de mes travaux est exceptionnelle.
Mais leurs efforts et leur engagement sont sans cesse contrecarrés par ceux et celles qui aiment donner des leçons aux Africain(e)s, tout en refusant d’en recevoir. Ils travaillent dans des coulisses, dans l’obscurité. C’est à cette catégorie des égyptologues anti-nègres que s’adresse notre critique.
Nous demandons à ceux et à celles qui sont convaincus qu’on ne peut continuer à imposer aux Africain(e)s la lecture de l’Occident tout en refusant de donner la parole aux Africain(e)s ou d’écouter leur lecture de l’histoire, à se mobiliser pour protester contre l’actuelle tendance.
Nous demandons à ceux et à celles qui ont constaté que l’Égypte est un pays de la Vallée du Nil et qu’on ne peut étudier la Culture du Delta dans l’exclusion de la Culture de s Pays situés aux Sources du Nil, à se mobiliser pour exiger que le Xème Congrès élabore une sorte de déontologie égyptologique et prenne des mesures afin que l’Afrique Noire soit bien représentée aux prochains Congrès.
En outre, l’herméneutique dévalorisante de la Nubie et l’allusion permanente à la pigmentation pour opposer la Nubie à l’Égypte doit cesser. Ndigi et Bilolo n’ont pas le même degré de pigmentation qu’ Obenga, mais tous les trois sont des Bantu. La pigmentation de BaKongo, de Zulu ou de Luba n’est pas identique à celle de Wolofs, de Noirs égyptiens ou de Soudanais, mais ils sont tous Noirs africains.

§ 16. Conclusion

Pour terminer, le Centre d’Études Égyptologiques de l’INADEP exige 1° la révision de votre décision sur le thème : « Ancien Égyptien : Langue Bantu ? Résultats provisoires de la traduction du Dictionnaire de Erman et Grapow » et 2° la restructuration de différents Comités stratégiques afin d’intégrer les sexes, les races et les continents oubliés.
L’Afrique Noire devrait désormais figurer de droit parmi les « Key-Note Speakers » et être représentée scientifiquement à l’ouverture de ce Congrès. Un scientifique qui maîtrise la Philosophie Grecque et la Philosophie Pharaonique ne peut être transformé en un simple auditeur « de la musique égyptologique extrêmement monotone de l’Occident» et cela, par un Congrès qui a lieu en Grèce. C’est une façon de cracher sur Platon et Aristote.
Le moment est venu de manifester, de concrétiser réellement l’inter-nationalité, l’inter-continentalité et l’inter-racialité de l’Association Internationale des Égyptologues et de ses Congrès Internationaux.

Avec mes salutations très cordiales et maâti


Prof. Mubabinge Bilolo
Chargé du Centre d’Études Égyptologiques de l’INADEP
C/o Ministère National de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique,
Congo-Kinshasa



samedi, mars 22, 2008

Le pillage du patrimoine artistique négrafricain

















De la politique de la terre brûlée à l'exhibition de la Venus hottentote au « Musée (français) de l'homme, innombrables ont été les exactions commises en Afrique pendant les conquêtes coloniales européennes. D'une rare cruauté, cette aventure s'est traduite par un pillage et une destruction sans précédent du patrimoine artistique négrafricain, ayant à la fois dépouillé un continent et souillé sa mémoire. Plus de cent ans d’abus autorisent une relecture de ce passé pour établir un bilan de ce qui est sans discussion le plus grand génocide culturel de l'histoire.

Gravures et peintures préhistoriques, stèles et statuettes funéraires, poteries et bijoux, reliquaires, il ne reste de tous ces supports matériels de la mémoire des communautés qui les ont crées que vestiges épars, livrés à la malveillance de descendants d'envahisseurs, ou cendres enfouis qui nous brûlent encore les pieds.
L'entreprise coloniale eut comme projet macabre le travestissement du patrimoine culturel négrafricain afin de perpétuer la fable d'un continent sans raison (...) sans histoire. Le produit du pillage était répertorié et classé dans le plus grand mépris des traits spécifiques des communautés spoliées.
L'objectif visé était de dépouiller le continent noir de tout ce qui pouvait servir de témoignage positif aux générations futures en confisquant ou en détruisant toute pièce rendant hommage à son génie.


Aujourd’hui, l'exhibition à laquelle l'art noir est soumis dans un hémisphère qui le voue à la profanation a pour seul résultat de renforcer un effet d'exotisme interdisant, par principe de l'apprécier à sa juste valeur comme élément représentatif du patrimoine commun de l'humanité. C'est pourquoi, il faut le répéter, la restitution des biens culturels volés doit constituer le premier pas vers la réparation de l'immense tort fait à la culture africaine

vendredi, mars 21, 2008

La France à fric : petits meurtres entre amis ?







La France à fric, cette entité politico-mafieux franco-africaine, donne parfois l’impression d’une cour d’écoliers indisciplinés punis pour leur non respect des règles. A en croire certains observateurs, l’ex-Monsieur Afrique de Sarkozy II, Jean Marie Bockel, aurait été débarqué de son poste pour avoir trop tôt annoncé la « fin de petits arrangements politico-financiers entre Etats africains et la France ». Et cela n’avait pas plu, dit-on, à l’un des représentants le plus emblématique de cette françafrique, en l’occurrence l’inénarrable Bongo Odimba. D’ailleurs, d’après la presse gabonaise, le vétéran Omar s’est réjoui de cette éjection de JMB à la tête de la francofolie. Mais notre nabab tropical de Libreville n’est plus à une sortie près tant par le passé il fit preuve déjà d’un zèle équivalent pour défendre la France à fric. Après les déclarations à l’emporte pièce de Bockel sur la fin de la lune de miel franco-africaine, suivies par la révélation par France 2 des biens immobiliers parisiens de Bongo et Sassou, cela faisait un peu beaucoup trop pour les crocodiles du marigot françafricain. Pour autant, faut-il voir dans le changement de tête à la « coopé » un effet de leur vagissement ? C’est vraiment prendre ses vessies pour des lanternes que de croire que les ex-colonies peuvent dicter la conduite de l’ex-colon.

mercredi, mars 19, 2008

Beautés noires, masques blancs : l’assimilation au dominant











Les rues d’Afrique comme celles d’Europe se peuplent de drôles de poupées noires ambulantes ? Non il ne s’agit pas de la dernière lubie d’un artiste contemporain qui veut choquer ses contemporains en parant les femmes noires de drôles de coiffures qui rappellent, à s’y méprendre, les attributs capillaires de l’indo-européenne. C’est à se demander jusqu’où peuvent aller les pratiques esthétiques des femmes noires ?


Une chose est sûre, les extensions ou rajouts leuco-capillaires synthétiques ou pas dont se parent désormais les créatures d’ascendance africaine sont un symbole des rapports sociaux entre dominants et dominés qui se sont installés depuis la rencontre entre les civilisations occidentales et négro-africaines. Du défrisage du cheveu crépu au blanchissement de la peau, la quête de la ressemblance au dominant est devenue une religion dont les femmes noires sont devenues les ferventes pratiquantes. Comme toute religion, dont la fonction principale est de relier l’adepte à une divinité, celles que pratiquent les femmes noires, la chasse au cheveu crépu ou encore aux traits négroïdes, est là pour maintenir et restaurer les chaînes d’aliénation mentale, tout en célébrant le modèle dit de la beauté universelle. Ici le dogme consiste à s’appliquer les attributs du modèle érigé en idéal esthétique suprême.


Intériorisés depuis plusieurs siècles, les rites de cette religion anti-esthético-négroïde, se déclinent en diverses pratiques qui vont de l’utilisation des dermo-corticoïdes hyper agressives pour la peau à des produits défrisant à base de toutes sortes de composants chimiques. Cette imitation du modèle dominant caucasoïde ne saurait se traduire par un simple effet de mode. Il s’agit d’aliénation même inconsciente. L’aliénation c’est la renonciation à soi, à ses codes culturels, qui peuvent être capillaires ou esthétiques. On s’éloigne de sa matrice culturelle pour adopter des codes qui lui sont étrangères. Une forme de renonciation à soi, à sa nature, éloignement de soi-même. Et celle-ci a un coût et pas seulement financier.


En s’imposant une esthétique éloignée de sa nature, non seulement la femme noire perpétue cette forme d’asservissement aux canons de la beauté dit universelle, mais elle enrichit les grandes enseignes mondiales de la cosmétique. En plus du dépouillement somatique, l’imitation du modèle plume les adeptes. Il y a à la fois une exploitation psychologique de la femme noire qui relève de l’aliénation culturo-mentale, et une exploitation économique de la femme noire par l’absence de contrôle économique de son image. Vaste programme donc que celui de la libération de l’homme noir.


Précision: loin de nous l'idée de condamner les usages médicaux de certaines pratiques esthètiques.

vendredi, mars 14, 2008

Le Paris black en images




















Comment tordre le cou aux clichés de l’homme noir qui ont malheureusement la vie dure ? L’esclavage des Noirs a été aboli il y a environ plus de 150 ans en France, cependant les univers mentaux associés à cette servitude qui a duré près de quatre siècles, persistent. Les médias en général et la télévision en particulier, principaux véhicules de construction de la réalité sociale, nous en donnent chaque jour la preuve d’un phénomène devenu presque culturel aux conséquences sociales et psychologiques irréfutables.

Fort de ce constat, le groupe BCD Label, une agence artistique crée en 1998, qui a fait de la valorisation de l’image du noir pas seulement son credo, mais aussi, une démarche professionnelle, s’est penché pendant trois ans sur ce qu’il faut bien considérer comme une visibilité problématique du Noir. Résultat, une galerie sémillante de 120 portraits de noirs et de metis franciliens, donnant à voir une diversité d’hommes et de femmes, tout aussi singuliers qu’authentiques dans leurs univers, va occuper, le temps d’un printemps, à partir du 28 mars jusqu’au 27 avril 2008, l’espace du Musée du Montparnasse.

Sous le titre évocateur, « forces noires photographiées, une source de talents indéniables », l’exposition, conçue par l’artiste et photographe BJL, s’est donnée comme ambition, de déconstruire les récalcitrantes idées reçues et stéréotypes éculés colportés par l’ethnonyme Noir. En substance, elle veut donner à voir une image valorisante du Noir, dans ses multiples aspects contemporains, loin des représentations dépréciatives ambiantes. Les modèles choisis par la tête chercheuse du groupe, BJL, devaient avoir élu domicile depuis 7 ans pour les hommes et 10 ans pour les femmes à Paris ou en Banlieues parisiennes. Look particulier, attitude « urbain », code vestimentaire actuel, attirance physique, tels sont les critères qu’il fallait réunir pour immobiliser l’objectif ou « déclencher les neurones » selon les propres mots de l’homme aux trois initiales.

Il aura fallu donc trois ans au groupe pour finaliser un projet au final riche en couleurs, tant il montre différentes personnalités aux talents sans doute insoupçonnés. Imaginé à l’instar d’un réservoir de « talents indéniables », la galerie de portraits se veut une source réfléchissante d’un vécu noir pluriel, vivant, dynamique, urbain, créatif, dans la ville lumière. A mille lieux des figures médiatiques dominantes, ces icônes d’une « noiritude » souriante et bon enfant omniprésentes dans la lucarne hexagonale.

Ce « Paris Black » moderne, dynamique et créatif est donc à découvrir. Réalisateurs, artistes, recruteurs de France et de Navarre etc. pourront aller y puiser de l’inspiration, histoire de décoloniser son univers mental de représentation de l’homme de couleur, mais aussi de l’énergie que cette fresque humaine dégage à travers ces différentes personnalités, ces « talents physiques évidents» hérauts sûrement de la « Nouvelle donne black » de la capitale. Anonymes d’un jour, et peut être « forces noires » de demain.

Exposition, Black Concept Definition, "120 Forces noires photographiées", au Musée du Montparnasse à Paris, du 28 mars au 27 avril 2008.

mercredi, mars 12, 2008

Le thème du racisme rattrape la campagne démocrate


Barack Obama a remporté mardi dans le Mississippi sa 29e victoire sur la route de l’investiture démocrate pour la présidentielle américaine, au terme d’échanges plus aigres que jamais entre son équipe et celle de sa rivale Hillary Clinton sur le thème du racisme.
Barack Obama, 46 ans, le seul sénateur noir des Etats-Unis, aurait notamment remporté 91% du vote noir dans le Mississippi (sud), selon CNN. En revanche 69% des hommes blancs et 74% des femmes blanches auraient voté Clinton, selon Fox, ainsi que 56% des électeurs de 65 ans et plus, selon CNN.
Ce dernier sondage a également révélé la dégradation des relations entre les deux camps, les partisans de Mme Clinton affirmant à 72% qu’ils ne seraient "pas satisfaits" si M. Obama devenait le candidat du parti pour la présidentielle, alors que 55% des pro-Obama ne seraient "pas satisfaits" d’une victoire de l’ex-Première dame, selon CNN.
"J’ai fait attention à dire que Mme Clinton était quelqu’un de capable, et que si elle emportait l’investiture, je la soutiendrais - je ne suis pas sûr que l’équipe de campagne de Mme Clinton ait la même approche", a déclaré M. Obama, interrogé sur CNN après sa victoire.
Après dépouillement dans 49% des bureaux de vote, M. Obama était crédité de 54% des voix contre 44% à Mme Clinton.
La primaire du Mississippi, devant permettre de répartir 33 délégués à la proportionnelle, s’est déroulée en parallèle avec une vive polémique sur les affirmations aux relents racistes d’une alliée de Mme Clinton.
"Si Obama était un homme blanc, il ne serait pas là où il est maintenant (..) et s’il était une femme (quelle que soit sa race) il ne serait pas là où il est, il se trouve qu’il a beaucoup de chance d’être qui il est", a dit à un journal californien Geraldine Ferraro, une ancienne candidate à la vice-présidence des Etats-Unis qui appartient aujourd’hui à l’équipe des financiers de Mme Clinton.
Mme Clinton, 60 ans, s’est contentée d’indiquer qu’elle n’était "pas d’accord" avec Mme Ferraro, tandis que sa directrice de campagne Maggie Williams voyait dans l’indignation de l’équipe de M. Obama des "attaques fausses, personnelles et politiquement calculées à la veille d’une primaire".
M. Obama estimé, dans un entretien au journal Morning Call d’Allentown (Pennsylvanie, est) qu’il ne croyait "pas que les commentaires de Mme Ferraro aient leur place en politique ni dans le parti démocrate".
"Quiconque connaît l’histoire de ce pays sait qu’ils sont de toute évidence absurdes", a ajouté M. Obama, le seul Noir à siéger au Sénat. Mme Clinton pour sa part a jugé "dommage que nos partisans de part et d’autre disent des choses qui s’égarent sur les questions de personne, (alors que) nous devrions continuer à nous concentrer sur les thèmes" de campagne.
Le stratège de Barack Obama, David Axelrod, a demandé que Mme Ferraro soit relevée de ses fonctions dans l’équipe Clinton, et souligné que "quand vous faites des clins d’oeil et des hochements de tête devant des déclarations insultantes, c’est un signal indiquant que tout est permis".
M. Axelrod a souligné en outre que la remarque de Mme Ferraro faisait suite à plusieurs incidents ayant déjà donné prise à des soupçons de racisme dans l’entourage de l’ex-Première dame.
M. Obama compte désormais 29 victoires contre 15 pour Mme Clinton, relancée par une triple victoire électorale la semaine dernière.
Il possède après sa victoire dans le Mississippi, le soutien de 1.606 délégués à la convention du parti démocrate, officiellement chargée de désigner un candidat en août à Denver (Colorado, ouest). Mme Clinton en compte 1.484, selon le site indépendant RealClearPolitics. Il faut réunir le soutien de 2.025 délégués pour s’assurer l’investiture.
La prochaine grande étape de la course sera disputée le 22 avril en Pennsylvanie (158 délégués).


Source : Linternationalmagazine.com avec Xinhua , publié le 12/03/2008

dimanche, mars 09, 2008

Racisme au travail : ruses et astuces des Néoracistes


Paranos, fainéants, victimisation…tout un imposant arsenal théorique, argumentaire et rhétorique existe aujourd’hui pour disqualifier les résistances qui se développent face au racisme. Et le monde du travail ne semble pas à l’abri de cette mode qui trouve ses fondements dans la théorie de la « déculpabilisation », appelée aussi « mauvaise conscience ». A travers elle, on tente de justifier l’injustifiable. « Dans tous les cas », souligne Pierre Tévanian[1], « ce qui est nié est l’existence de processus sociaux de production des discriminations, en toute légalité, et par les institutions de la République elles-mêmes, masqués par un principe officiel de non-discrimination, rituellement proclamé mais quotidiennement bafoué ». A l’image de ces logiques de discrimination raciale qui interviennent au moment de la prise de fonction de la personne discriminée.
Si certaines pratiques de discrimination avant le processus d’embauche (discrimination par le patronyme, le lieu de résidence, filtre téléphonique, Sigles BBR…) sont connues, la réalité des pratiques après l’embauche est en revanche mal maîtrisée. Bien que moins connues, ces formes post-embauche de discrimination qui peuvent parfois prendre une tournure violente à l’image du cas Théodore Nkambo, s’expriment à travers de nombreuses pratiques allant de la simple blague de mauvais goût au harcèlement moral et racial de la victime. Une double violence, à laquelle en général la victime n’est pas préparée ; et si elle n’est pas sanctionnée, peut compromettre sérieusement la carrière de celle-ci. Malgré l’absence de chiffres officiels, de nombreux témoignages permettent d’apprécier l’ampleur du phénomène.


Dans le procès OSRAM, Théodore Nkambo, camerounais d’origine, victime de racisme dans son lieu de travail, vient d’être honteusement renvoyé à son cher martyr d’immigré indésirable. La justice a choisi son camp : protéger non pas la victime mais les bourreaux. Ceux qui ont érigé le racisme envers les personnes marquées du sceau de la différence culturelle en règle de vie professionnelle. Si le déni, l’hypocrisie, la loi du silence au sein du corps professionnel est souvent avéré, les séances au prétoire ne garantissent pas non plus une réhabilitation de la personne confrontée à ces pratiques. A celle-ci, on oppose souvent, l’insuffisance de preuves, ou encore l’insuffisance professionnelle parfois après plusieurs années de bons et loyaux services dans l’entreprise, pour justifier le délit. De l’ethnocorporatisme à l’ethnonationalisme, il existe une palette de motivations à l’origine de ces pratiques qui s’incarnent en règle général dans un jeu sournois, insidieux de nuisance professionnelle avec l’objectif non avoué d’obtenir le départ ou la démission de la personne.

L’ethnocorporatisme : « j’ai du mal avec ces gens là … »

« On est mieux entre nous, j’ai du mal avec ces gens là… ». L’ethnocorporatisme, version pratique de la préférence nationale, c’est l’ensemble d’attitudes et de pratiques discriminatoires qui permettent de justifier l’inacceptable. Appliqué à la politique, il donne le raisonnement sarkozien suivant : « j’irai les chercher, quoi qu’ils aient fait ». Le sous entendu dans cette phrase c’est de dire, je les défends parce qu’ils sont blancs comme moi, criminels ou pas. L’ethnocorporatisme pourrait s’entendre comme le fait de promouvoir des rapports sociaux sur la base d’une vision racialiste, culturaliste. L’invocation des origines culturelles, nationales est souvent le moteur des personnes que nous appellerons volontiers de néo-racistes en raison du contexte socioculturel et politique des rapports postcoloniaux entre dominants et dominés. Le néo-raciste vit mal la présence dans l’entreprise d’un collègue noir par exemple qu’il juge incongru, injuste, illégitime. Il pense que le collègue de travail noir ou autre a pris injustement la place d’un français de souche. Le néo-raciste a fait sien le slogan frontiste « la France aux français ». Il en est même imprégné de façon irrémédiable. Le néoraciste est torturé par l’idée de devoir travailler avec une personne différente par sa culture ou sa couleur de peau. S’il est supérieur hiérarchique, son horizon indépassable d’appréciation des qualités de son collègue reste les références à sa culture, à sa couleur de peau. Le collègue devient un objet racisé sur lequel va être posé non pas un regard objectif sur la qualité de son travail, mais un ensemble de représentations stéréotypées confinant en tous points à une forme de prophétie auto réalisante.

Solidarité ethnique

Un fonctionnaire raconte avoir été victime d’un odieux chantage de la part d’un collègue blanc qui simulait un détournement de chèques afin de l’accuser lui (on sait que les Noirs sont voleurs). Le supérieur hiérarchique était au courant de ces pratiques, mais au nom de la solidarité ethnique entre blancs, il fermait les yeux au lieu de dénoncer et sanctionner l’auteur des faits. Ce type de néoraciste se retrouve souvent dans les administrations publiques où le tri sélectif étatique par les concours (l’anonymat est la règle dans certains concours de catégorie B OU A) ne permet pas d’éliminer les candidats qui ne sont pas BBR. « Tu as réussi a échappé au filtre étatique par le concours, l’administration (sous entendu le personnel t’attend au tournant ». C’est le discours du néoraciste dont l’attitude va souvent consister à guetter la moindre faille ou à organiser le système de faille compromettant afin de rendre crédible sa compagne de nuisance. Après 7 années de bons et loyaux services dans une entreprise de BTP, M.L., irréprochable dans son travail, s’est quand même vu licencié pour faute grave. Le Chef d’entreprise ayant prétexté la violence de ce dernier à son endroit (les Noirs sont violents). La plainte aux prud’hommes révélera que les accusations de violence étaient infondées. Le néoraciste trouve toujours un argument pour justifier son comportement. Un chef de personnel justifie de ne pas accorder une promotion à D.X. en raison de sa couleur de peau. Les postes à responsabilité étant de postes où il faut entrer en contact avec le client. Pour la petite histoire, D.X formait des nouveaux recrus qui voyaient leur statut évolué en peu de temps. Le cas de Laurent Gabaroum, est à ce titre éloquent, ce franco-tchadien, surdiplômé et plusieurs années de « boîte » à son actif, qui a vu sa carrière bloquée chez Renault.

« On est chez nous, entre nous… », les « petits meurtres entre collègues »

Les employés d’origine extra-européenne ou non blancs sont parfois l’objet de délires et de fantasmes. Ainsi un supérieur hiérarchique justifia la mauvaise note qu’il attribua à un collègue noir parce que celui-ci l’aurait pris pour un raciste. Une confrontation fut donc organisé au sommet entre l’employé et le supérieur hiérarchique. A la question de savoir, pourquoi avez-vous mal noté Monsieur X alors que son dossier fait état d’une personne sérieuse, rigoureuse et consciencieux dans son travail et toujours bien notée : l’intéressé rétorqua : « je croyais qu’il me prenait pour un raciste au vu de son attitude ». Et le collègue noir de dire « Ah bon, donc sur la base de votre imagination vous vous êtes mis dans la tête que je vous jugeais raciste, avez-vous des preuves de ce que vous avancez ? Le néoraciste fut démasqué. En réalité la question de l’attitude est plus profonde. Il est question que la personne discriminée adopte un comportement qui rassure les fantasmes du néo. « Il est sympa, on rigole bien avec lui ». Il est vrai que le Noir rigolard arborant en permanence un sourire niais à l’image du joyeux batteur de tam-tam rassure le discriminant parce qu’il correspond à un des stéréotypes liés à sa couleur de peau.

S’il y a parfois ce type de dénouement, la majorité des actes de discrimination subit l’omerta administrative, cette loi du silence qui condamne la victime au placard et à l’isolement et réconforte le bourreau dans ses forfaits quotidiens. En général le néoraciste sait que s’il est démasqué il risque gros. Il sait aussi compter sur le silence des autres collègues blancs ou de la hiérarchie qui le protégera ou le réconfortera quoi qu’il arrive. Pour cela, il organise un système de solidarité ethnique en faisant courir des bruits et des rumeurs sur l’employé non BBR afin d’obtenir du soutien ou de l’approbation pour ses actes. Et c’est là qu’intervient la solidarité ethnique. Si le bourreau jouit d’une bonne position hiérarchique, les collègues de travail adoptent soit le silence ou deviennent des co-auteurs des forfaits afin d’être bien vus. C’est le fameux parapluie ethno corporatiste. Les liens de race contre la loi, la justice, le droit. Le fameux « on est chez nous, entre nous ». Certains collègues saisis par le doute de ces rumeurs tentent d’agir parfois en organisant en sourdine de contre-enquêtes. On piège ainsi la personne visée par des « petits services ». Ce sont des « petits meurtres entre collègues » qui visent à vérifier les fantasmes du néo. « L’aide » des collègues « amis » peut aller du sabotage à la rétention d’information en passant par le « contrôle » et le « renseignement » des faits et gestes de la victime. Le seul exemple connu à ce jour où les collègues blancs ont manifesté de la solidarité envers un collègue noir discriminé est celui de Thierry Badjeck, licencié le 16 juin 2006 de son entreprise ADP pour avoir traîné en justice cette institution pour discrimination dans l’attribution d’un poste de cadre[2].

Et l’Administration, les syndicats ? « Tu dois subir jusqu’à crever, si t’es pas content, tu dégages ».


« Avez-vous déjà vu une personne piégée dans le marigot demander de l’aide à un crocodile ? ». Le dicton africain résume assez bien le jeu qui s’instaure entre la victime et le système hiérarchique censé le protéger. La France est un pays organisé en système de réseaux : réseaux professionnels, réseaux amicaux, réseaux familiaux, réseaux syndicaux, réseaux maçonniques etc. Une sorte d’institutionnalisation informelle du népotisme ou du clanisme. Les personnes mises en cause bénéficient souvent de solides appuis au niveau syndical et hiérarchique. Dans une stratégie cousue de fil blanc consistant à ménager le chou et la chèvre, les organisations syndicales tout comme l’Administration ont tendance elles aussi à faire prévaloir les liens de race. Il n’est pas besoin de citer des exemples pour prendre la mesure du phénomène. Et pour preuve, dans le procès de Thierry Badjeck contre l’Aéroport de Paris, les syndicats ont brillé par leur absence de soutien. Le syndicalisme français n’est rien d’autre que la continuation de l’administration sur le registre contestataire, mais il obéit aux mêmes règles et procédés que celle-ci. A propos de l’Administration, la discrimination ou le racisme, c’est la maladie honteuse, la MST dont elle ne veut pas s’avouer contaminée. Elle préfère le silence de la personne à sa parole. Surtout pas de vagues ou sinon c’est le suicide professionnel. En gros tu dois subir jusqu’à crever, si t’es pas content, tu dégages. D’où le recours fréquent au licenciement comme solution pour mettre fin aux conflits liés au harcèlement racial, discrimination et racisme.

Et la médecine du travail ?

Aujourd’hui la médecine professionnelle semble prendre réellement en compte cette souffrance de la personne discriminée en raison des compagnes de sensibilisation. Il arrive parfois que certains médecins professionnels tirent la sonnette d’alarme, mais cela ne résout jamais le problème puisque les personnes en cause ne sont et ne seront jamais sanctionnées.


Et la victime dans tout cela : le combat de David contre Goliath


Avoir le cul entre deux chaises, c’est jamais chose facile dans une vie. Entre protéger son emploi et se lancer dans une bataille interminable contre l’injustice et le respect dans laquelle l’on ne sera pas forcément entendu et gagnant relève d’un exercice d’équilibriste. Mal armées et outillées au niveau de leurs droits, les personnes parlent peu et adoptent une position de victime qui du coup conforte le bourreau. Mais c’est surtout la violence des pratiques qui désarment les personnes sur fond de haine raciale injustifiée. Il s’agit presque d’un viol tant il y a à la fois le déni et le mépris de la personne sur fond d’aryennisme. On peut dire que le racisme et la discrimination dans les entreprises se nourrissent aussi bien du silence des victimes que de la surdité du personnel. Que faire ? On évitera ici un catalogue à la Prévert des démarches à entreprendre dès le moindre incident. Toutefois, on peut recommander aux victimes d’éviter impérativement de rester isoler, consigner par écrit tout acte et avertir par courrier recommandé la hiérarchie dès le moindre écart avéré tout en s’avisant auprès d’un spécialiste le caractère raciste des faits en cause. Elles ne doivent pas oublier que c’est par la tête qu’on achève le serpent.


Et les organisations antiracistes ?


Toutes les études montrent en France que les organisations antiracistes ont échoué dans leur lutte contre le racisme et les discriminations, malgré les moyens colossaux dont elles peuvent bénéficier de la part des pouvoirs publics et le soutien des médias. Réduites aux rôles de plateformes de lancement de carrières politiques, elles sont progressivement devenues de tonneaux vides en raison du bruit qu’elles provoquent dans leurs actions. Celles-ci ne sont malheureusement pas aussi exemptes de hiérarchisation tant elles montrent une différence de traitement, d’empressement, de condamnation en fonction des affaires. Le déclin de l’action anti-raciste s’explique aussi par l’instrumentalisation communautariste de certaines associations.


La Halde et les nouvelles associations communautaires


La faillite du combat antiraciste a précipité l’émergence et la visibilité des associations d’essence communautaire. Pour autant la donne a-t-elle changé ? Ces associations disposent-elles d’expertise viable et crédible en matière de discriminations à l’emploi. Rien n’est moins sûr. Bien qu’il faille reconnaître leur bagout pour leur propre médiatisation, ce qui n’est pas en soi une mauvaise chose, il faut bien se rendre à l’évidence qu’il y a loin entre la dénonciation incantatoire et les actions concrètes (celles qui consistent par exemple à se porter partie civile ou à soutenir les personnes victimes). Toutefois, gardons nous de jeter la pierre, car ces associations sont encore jeunes et c’est l’avenir qui fera leur réputation. Quant à la Halde, instrument de sanction et de prévention, son rôle de bureau d’enregistrement des plaintes est déjà une bonne chose pour les victimes, mais son fonctionnement rappelle trop celui des organisations anti-racistes dont les slogans sont restés de vœux pieux.

article de Welobo






[1] Pierre TEVANIAN, La République du mépris, La découverte, 2007.
[2] Article afrikara du 21 juillet 2006, Discrimination aux ADP ? Historique, un Noir concerné et trois collègues blancs solidarisés accusent !