jeudi, septembre 17, 2009

Ecole : enfants d’immigrés par ici la sortie


« Entre les mûrs », « La journée de la jupe », plusieurs films récents ont tenté de nous offrir une photographie pour le moins inquiétant de ce qui est l’école en banlieue avec ses élèves intrépides, perturbés, démotivés, incultes et violents. Le prof apparaissant en héros, un peu à l’image du missionnaire du XIX ème siècle qui allait à l’assaut de l’Afrique pour le sortir de la barbarie, « la fameuse mission civilisatrice ». Devant ce tableau idyllique qui n’échappe pas aux images d’Epinal qui collent à la peau des quartiers périphériques, le manichéisme nous tend presque les bras. D’un côté le professeur, ce messie avec son catalogue de bonnes intentions, qui se pose en victime et de l’autre des sauvageons « en mal de France » décrits comme des êtres indéfiniment irrécupérables et des empêcheurs de tourner en rond. Et si ce portrait dichotomique de la périphérie urbaine n’était qu’un conte de fée qui voulait généraliser des cas particuliers ? Des cas particuliers qui se résument aux rôles de caïds que veulent bien camper certains jeunes nourris au lait du laxisme et de la démission parentale. Mais aussi au poison de la République qui a fait de sa devise « Egalité, fraternité », un beau slogan creux.
IL n’a pas échappé à plus d’un que ce que les jeunes de banlieue veulent c’est s’en sortir. Et ils sont nombreux. Tous ne veulent pas jouer aux caïds, squatter les halls d’immeubles, s’ériger en bourreaux de leurs cadettes. La fille voilée bosseuse et le grand frère macho branleur, disons, c’est un peu fort le café. Tous ne veulent pas ressembler aux « caille-ra » comme ils disent eux-mêmes. Et si l’école de la République n’était pas cette victime que l’on nous présente souvent ? Et si c’était l’école de la république qui fabriquait du « caille-ra » ?.
Plusieurs témoignages de parents aujourd’hui parlent de l’école comme d’une véritable machine à broyer des talents, des individualités dont l’unique voie de sortie se résume à la voie professionnelle. Ainsi de nombreux jeunes ont été ainsi poussés vers la sortie en dépit de bons résultats scolaires. CAP coiffure, médico-social, BEP attaché commercial, Brevet de technicien de surface et de manutentionnaire…, voilà l’éventail des possibles du banlieusard en termes d’orientation dès la troisième.
Dans ce couloir prématuré de la survie professionnelle du banlieusard, les conseillers pédagogiques d’orientation jouent un rôle capital. Ils sont un maillon important dans cette machinerie à broyer la réussite du banlieusard. La fille d’une amie, qui veut devenir médecin, s’est vue ainsi proposer à la fin de la troisième avec insistance par la conseillère d’orientation le CAP médico-social alors qu’elle venait de réussir brillamment son brevet avec mention. Au grand étonnement des parents et du professeur principal. Heureusement, les recommandations de notre chère conseillère ont essuyé un refus catégorique des parents qui avaient eu vent de ces pratiques dans les banlieues. Mais tous les enfants d’immigrés n’ont pas la chance d’avoir des parents bien informés. Hélas, l’école de la République que l’on présente souvent comme une victime de la loi des caïds des banlieues est en réalité elle-même une machine à kärcheriser les bancs d’école. En guise de conclusion, voici le témoignage accablant d’une des meilleures journalistes françaises qui a failli faire les frais des méthodes de l’école républicaine…Bonne rentrée à tous.



8 commentaires:

Anonyme a dit…

Malheureusement, c'est pas uniquement le ca sen France. En Allemagne, c'est pareille : les enfants immigrés, même très intelligents, ont du mal à avoir l'éducation scolaire qu'il méritent. Heureusement, peu à peu, les politiques s'en rendent compte (au moins quelques un).

La lionne

Pascale a dit…

Pareil en Belgique ! Les politiques ont tenté d'imposer une "mixité sociale" dans les écoles pour en finir avec les "bonnes écoles" et les "écoles difficiles". Ca a été un fiasco, les mentalités étant très difficiles à changer. Ils se dirigent maintenant vers la discrimination positive, les écoles fréquentées essentiellemnt par les élèves provenant de milieux défavorisés se verront octroyer plus de moyens financiers, pour engager du personnel supplémentaire (profs, éducateurs, assistants sociaux...) Ca devrait se mettre en place cette année. Reste à voir si la "crise" n'aura pas bouffé le budget (dans ce cas, si tj sur le dos de l'éducation que les économies se font, alors qu'il s'agit d'un secteur primordial dans une société) et si les "bonnes volontés" suivront.

Pascale a dit…

La première école canadienne destinée aux Noirs ouvrira ses portes à la rentrée prochaine. Le conseil scolaire de la ville vient d'approuver le projet, estimant qu'un tel établissement permettrait de diminuer le taux de décrochage scolaire chez les jeunes Afro-Canadiens, qui, selon leurs origines, varie entre 30 et 40 %.

L'école n'accueillera pas exclusivement les jeunes Noirs ; elle sera ouverte à tous. Ses programmes feront toutefois une place particulière à l'histoire et à la culture afro-canadienne. Son personnel devrait être majoritairement noir, donc, soulignent les initiateurs du projet, «pas hostile aux jeunes qui parlent l'argot ou portent des dreadlocks».

«Il ne s'agit pas de ségrégation, mais d'autodétermination», insiste une mère de famille. Mais pour les opposants, qui rappellent le «rêve» de Martin Luther King, «c'est la boîte de Pandore !». Le conseil scolaire de Toronto a également mis en place un projet pilote visant à enseigner «l'histoire et les contributions de personnes d'origine africaine » dans les écoles de la région.
Le Figaro


Certains n'y voient qu'un enfermement supplémentaire, un ghetto. Mais contrairement aux écoles habituellement fréquentées par les élèves d'origine immigrées et qui sont pointées du doigt ici et là, pour les inégalités qu'elles entretiennent et pour la difficulté de les gérer, il s'agit ici d'une école de la réussite. Le but est diamétralement opposé et il me semble que cette expérience est intéressante. Reste ben sur à s'assurer qu'elle sera tout à fait reconnue et que les diplomes qu'elle délivrera auront même valeur !

Anonyme a dit…

Salut Pascal,

Je ne sais pas si c'est une bonne ou mauvaise chose de s'enfermer. Je crois que l'enfermement communautaire n'est pas une bonne dans un contexte multiculturel canadien. Dans un pays où ces jeunes seront appelés à travailler avec d'autres personnes issues d'autres communautés, il est plus que nécessaire de comprendre le système et non se fermer contre le système. A moins que les parents de ces futurs élèves pensent déjà à leur trouver un travail dans une entreprise communautaire. Ca je n'en suis pas sûr.

Pascale a dit…

Salut "anonyme"

Parler d'enfermement communautaire me semble inadéquat. Il est bien précisé que l'école serait ouverte à tous. Après tout, il peut très bien s'agir d'une école "élitiste", je pense par là non une école ouveerte uniquement au "gratin" de la société, mais une école qui offre, quel que soit le milieu d'origine, la meilleure formation possible, la meilleure éducation, le respect de soi-même et des autres. Pourquoi cette école serait-elle un repli, même si elle est destinée prioritairement aux Noirs ? Parle-t-on en ces termes des soi-disants "bonnes écoles" de France, de Belgique, d'Allemagne, dont la population scolaire est majoritairement, pour ne pas dire exclusivement, composées "d'autochtones" ?

Anonyme a dit…

bonjour,
je suis choquée par votre article cnx... je suis prof et j'ai en face de moi des élèves. Je n'ai pas des minorités, des blancs, des noirs, des sans papier, des immigrés, des riches ou autre mais des élèves. On travaille ensemble pour que chacun donne le meilleur de lui même, pour que chacun se dépasse. Je n'ai jamais entendu un prof dire que le milieu social d'où est issu un enfant est une barrière à sa scolarité surtout si l'enfant est brillant. L'image dépeint dans les films cités n'est peut-être pas la meilleure image que l'on puisse développer mais vous ne devriez pas étendre votre analyse à l'Ecole en général.
De même partir de 2 témoignages pour tirer des conclusions sur la fabrication de racailles par les enseignants est un peu court !! Des prof ou conseillers d'orientation incompétents cela existe mais de là à généraliser et de taxer l'Ecole de producteur officiel de racaille cela me fait bondir !!
L'Ecole peut remotiver ou redonner confiance à certains jeunes mais elle ne gommera pas à elle seule les difficultés sociales de nombreuses familles.
Dans l'Ecole de la République comme vous dîtes on est là pour instruire mais on n'oublie pas d'éduquer, d'aider, de communiquer, d'informer, de soutenir ... les enfants comme les familles qui en ont besoin. On est pas là pour abîmer, salir, discriminer, juger... comme vous semblez le penser.

Pascale a dit…

Je ne crois pas que l'article mette en cause les profs eux-mêmes mais plutôt une dualisation de la société qui se reproduit dans l'école. Car malgré la bonne volonté des profs (on n'en doute pas, là n'est pas la question), malgré des tentatives ici et là de pallier à cette situation génératrice de conflit et de mal-être, le problème est loin d'être résolu et semblerait même s'aggraver. L'école n'est pas un bocal isolé du monde, les problèmes de sociétés s'y engouffrent. Si ce n'est pas le rôle de l'école de résoudre les problèmes socio-économiques, c'est bel et bien sa mission de développer au mieux le potentiel de chaque élève, dans les meilleures conditions possibles. C'esrt dans ce sens que je trouvais intéressant l'initiative canadienne, cette école pouvant être avant tout une école de la réussite, une réele prise en main de leur destin par les 1ers concernés et non une école de "ségrégation". Le nom donné par les médias "école pour Noirs" est d'ailleurs assez malheureux, je préfèrerais "école afrocentriste" qui mettrait davantage l'accent sur le projet éducatif.

cnx a dit…

Bonjour Anonyme Professeure,

Je crois votre réaction est un peu excessive et outrancière. Dans l'article il n'est pas question de généraliser tous les corps de métiers. ici il est question de pointer du doigt un maillon tout aussi important que les autres maillons dans la réussite des gamins. Or ce maillon les conseillers d'orientation sont devenus pour certains des conseillers de désorientation...C'est de cela qu'il s'agit