Hommage aux mille et une facettes de Paris ou détail de trop ? Les clichés du noir parisien, maladroitement imposés à notre regard, dans le dernier film « Paris » de Cédric Klapish, apparaissent comme un odieux furoncle au milieu du visage de la ville lumière. Notre spécialiste de la comédie sociale a donc décidé dans ce dernier film de nous plonger dans son Paris à lui, mais un « Paris » qu’il semble entrevoir surtout à travers ses « binocles » de bobo franchouillard, avec le risque de grossir un peu les traits de certaines réalités. Parmi lesquelles, celle du clandestin camerounais. Au-delà de la galerie de portraits magnifiquement campés par plusieurs personnages (la boulangère, le poissonnier, le maraîcher, le prof d’histoire, le danseur, l’assistance sociale, l’architecte…), il est des images dont la charge symbolique mérite qu’on s’y attarde. Un « air de déjà vu », on dirait que notre réalisateur parigo cherche non pas « son chat » mais les travers de l’immigration africaine via le péril black. C’est presque bamboula et compagnie.
Curieux regard que celui qui « meut » le parisien Klapisch sur « l’hôte » africain, étrange représentation que celle du cinéaste sur l’immigré noir africain. Dans le Paris de Klapish, celui-ci est ramasseur de poubelles vit en couple avec enfants et attend l’arrivé d’un frère resté au pays bientôt clandestin et réfugié économique. Qu’il s’agisse de la traversée du désert de ce dernier ou de la présence du couple chez l’assistance sociale pour les allocs, la neutralité de la pellicule ne peut qu’être remise en cause. On semble retrouver là une version cinématographique du fameux « bruit et des odeurs », avec le braillement de la progéniture en toile de fond. Les échanges du couple en dialecte africain, lorsqu’il est question du nombre de personnes dans le foyer, sont un autre moment d’anthologie. Ce ramassis de stéréotypes misérabilistes vous bouche un coin. Notre guide parisien a sûrement voulu prendre des raccourcis. Car, l’immigré noir africain parisien, fut-il clandestin, ne serait se résumer à cette figure du mendiant à la prolificité génésique redoutable et gros consommateur d’allocs. Cette scène chez l’assistance sociale est assez emblématique de ce regard condescendant mâtiné de mièvrerie agaçante sur l’immigré africain. Au lieu de s’intéresser aux vraies causes de l’immigration africaine, on préfère, par mauvaise conscience, la caricaturer en montrant à la loupe les images tronquées de celle-ci.
Au-delà du combat sans issue, que livre ce jeune homme contre la maladie en l’occurrence Romain Duris, qui n’est qu’un prétexte pour introduire de la gravité dans ce portrait plutôt intime de Paris, Klapisch succombe vite aux déterminismes de son milieu. Il n’en sort d’ailleurs pas au point de rester prisonnier des images préfabriquées de son univers mental de bobo crypto - philanthrope qui se croit obliger de montrer le « Paris noir ». Histoire de dire que je n’oublie pas ces réalités là, plutôt ces « gens là », selon lui, tout aussi touchantes que les interrogations philosophico-nihilistes d’un prof d’histoire en mal d’amour et à l’affût de la fraîcheur. Tout comme le désespoir de cette assistante sociale joué remarquablement par Juliette Binoche élevant seule trois enfants et, qui a visiblement cessé de vivre depuis ses deux ruptures. Mais l’allusion à ce Paris noir s’apparente vite à un cheveu dans la soupe. Tant mieux puis qu’il s’agit d’un Paris plus fantasmé que vécu.
Le Paris noir de Cédric Klapisch est un « Paris » glauque, underground, sombre, miséreux, misérabiliste, sans issue, une grosse tâche sur la ville lumière. Le Paris noir de notre réalisateur est forcément un pari immigré, cet eldorado, que l’Africain se doit coûte que coûte d’atteindre, même au péril de sa vie en se jetant dans des embarcations de fortune au large de côtes marocaines. L’horizon du parisien noir est bouché, c’est une longue nuit d’enfer, de calamités, qui se termine chez le travailleur social en compagnie de sa tribu avec en ligne de mire les allocs. Pourtant depuis les tirailleurs sénégalais, bien de l’eau a coulé sous le pont de l’île de la Cité. D’histoire de Paris il est aussi question dans ce film. Faut-il rappeler que Paris doit son nom à la déesse négro-egyptienne ISIS. Oui Paris est la ville d’ISIS, Paris ou « Par Isis », en raison du culte de la déesse qui y fut pratiqué jadis. Paris, c’est aussi la ville du soldat inconnu, chair à canon, qui pourrait être l’aïeul de ce clandé dans l’auberge parisienne. Au-delà de la caricature du parisien noir, des clichés en vogue pour appuyer le discours de l’inintégrabilité du Nègre, il est des vérités qu’il est urgent de rappeler surtout en ces temps-ci où l’amnésie confine à une relecture par trop sélective et tendancieuse de l’histoire.
2 commentaires:
Étymologie
Paris tire son nom du peuple gaulois des Parisii (un Parisius, des Parisii). Le mot Paris est en fait dérivé du latin Civitas Parisiorum (la Cité des Parisii), désignation qui l'a emporté sur Lutetia (Lutèce).
C'est une éventualité, mais certains historiens penchent pour l'hypothèse que j'ai reprise dans l'article. N'étant pas historien, mais je ne peux que m'incliner face à d'autres hypothèses, mais d'après mes lectures, le culte d(isis ne serait étranger au nom de la ville. CN
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