5 juin 1997. Un Sassou « neuf » est porté au pouvoir par les armes d’une coalition impliquant plusieurs milices de la sous région avec la complicité de la compagnie pétrolière Elf. Le président démocratiquement élu Pascal Lissouba prend la fuite et se réfugie à Londres laissant derrière lui un pays exsangue, à feu et à sang. Ainsi va la vie dans ce petit pays coincé en Afrique centrale entre le fleuve Congo et la forêt équatoriale. Vivant au rythme des crises politiques tantôt violentes, tantôt feutrées, les habitants semblent avoir intériorisé cette fatalité politique les précipitant sur les sentiers de l’exile et de l’exode. Pendant ce temps, le champagne coule à flots dans les beaux quartiers nord de Brazzaville, où une certaine élite dirigeante coule de beaux jours, insouciante, ivre des milliards récoltés grâce à l’exploitation du pétrole, principale source de revenus du pays.
En moins de deux ans, alors que la paix est soi-disant à l’œuvre depuis la date du coup d’Etat du 5 juin 1997, les armes et l’irresponsabilité tuent encore. A l’instar du drame survenu dimanche 4 mars 2012. Plus de 200 morts pour rien comptabilisés, selon un bilan encore provisoire, à la suite d’une explosion intervenue dans un dépôt de munition dans le régiment blindé de Mpila.
Entre banalisation, déresponsabilisation et minimisation, la rhétorique mortifère des autorités a surpris plus d’un habitant de ce pays se demandant encore comment peut-on stocker des armes de destruction massive à proximité des lieux d’habitation. Amateurisme, insouciance, ivresse de l’argent et du pouvoir ? Toutes les suppositions folles sont de mise à la suite de cette tragédie qui a encore arraché à la vie des centaines de congolais qui n’ont rien demandé.
Déjà en mars 2011, cet amateurisme de bas étage avait causé la mort d’une vingtaine de personnes et plusieurs centaines de blessés à la suite du crash d’un avion cargo, L’Antonov 32, de fabrication soviétique, propriété de la compagnie aérienne privée Trans Air Congo (TAC) qui faisait la navette entre Brazzaville et Pointe Noire. Aucun coupable, aucun responsable arrêté et condamné. Est-ce normal ?
Toujours dans le sillage de cette folie meurtrière, c’est encore l’amateurisme insouciant des dirigeants qui serait mis en cause dans la mort de 60 personnes, 80 blessés et plus de 200 touchées dans un accident de train dans la nuit de lundi à mardi 22 juin 2010 dans le sud du Congo sur la ligne Pointe-Noire-Brazzaville. Là aussi pas de coupable pas de responsabilité.
Pays riche (bois, pétrole, minerais, sol et sous-sol généreux), le Congo fait partie étrangement des PPTE (pays pauvre très endetté) depuis 2006. La nouvelle fut annoncée avec fracas à l’époque par les dirigeants à la population comme s’il s’agissait d’une victoire olympique. Le comble de l’idiotie et de la mentalité de la cueillette. Un occidental dirait, voilà encore une bizarrerie dont affectionnent particulièrement certains dirigeants du sud embourbés dans la fainéantise atavique et légendaire qui sied à la race des « petits gens incapables » d’innover, d’inventer et de laisser quelque chose à la postérité. A part cette comptabilité macabre à laquelle ils nous ont habitué et visiblement qui ne semble pas les interpeller.
Une comptabilité macabre aux relents mystico-politiques
Il va de soi que ces morts, intervenus dans un intervalle temporel aussi réduit, ne vont pas sans alimenter des fantasmes et susciter des interrogations légitimes. D’autant plus qu’ils sont entourés d’un fort soupçon criminel aux effluves d’offrandes sacrificiels. Si l’hypothèse d’une rébellion et d’un coup d’Etat a été évoquée, elle n’a pas longtemps résisté aux rumeurs les plus folles. D’aucuns avancent l’hypothèse d’un pacte avec le diable conclu par le pouvoir de M’pila afin de renforcer ses pouvoirs et son rang au sein des cénacles occultes. D’autres parlent d’une dette de sang à payer liée à la fois à des luttes franc-maçonniques dans la sous-région et à des guerres mystico-politiques fratricides inter et intrafamiliales. Donc le mystère demeure entier.